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Intervention de Marylise Lebranchu

Réunion du 27 mai 2010 à 9h30
Réforme des collectivités territoriales — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaMarylise Lebranchu :

Dans les territoires en difficulté, les élus locaux tiennent bon, malgré tout. Ils savent, eux, le lien entre démocratie et développement. Ils savent bien que les réponses à la crise ne viennent pas de la seule gestion, aussi irréprochable soit-elle. Ils savent qu'ils doivent faire émerger les projets portés par les hommes et les femmes qui habitent là, mobiliser leur énergie, retrouver espoir et fierté.

Les élus locaux veulent faire de la politique, et c'est noble ! Est-ce un crime aux yeux du Gouvernement ?

Si vous reconnaissiez l'importance, pour le pays tout entier, du travail politique des élus locaux, vous auriez cherché à les aider plutôt qu'à réduire leur nombre, vous auriez accru leurs prérogatives et leurs moyens, vous n'auriez pas réduit leurs marges de manoeuvre.

Effet pervers de vos arbitrages, vous maintenez la clause de compétence générale mais, sous le masque trompeur de la rigueur, vous asphyxiez financièrement les collectivités. Celles-ci seront le bas de laine auquel le Gouvernement recourra pour respecter nos engagements européens en matière de dette.

Pourtant, oui, en étant « seulement » responsable des politiques sociales, on répond à des enjeux politiques majeurs. Il faut cependant, pour y parvenir, pouvoir faire des choix, en conscience, et les assumer devant les citoyens par l'impôt.

Cette liberté a disparu. Une de plus ! C'est le signe d'une défiance vis-à-vis des élus locaux, que ne fait qu'envenimer, dans ce contexte précis, la discussion sur la clause de compétence générale. Il faut donc rappeler que les élus locaux sont, tout autant que le Président de la République, les représentants du peuple et qu'ils doivent, à ce titre, pouvoir assumer leur éminente fonction politique.

En 2012, nous aurons un projet. Réfléchissons-y aujourd'hui. Approfondissement politique, mobilisation des énergies : c'est grâce à ces principes simples que nous retrouverons le sens historique d'une décentralisation que le Gouvernement appauvrit en la réduisant – tout le monde l'a démontré – à une manoeuvre électoraliste et budgétaire. Ces finasseries tactiques ne parviendront qu'à faire obstacle au mouvement en faveur de la démocratie territoriale, mais ne parviendront pas à le tarir, car la décentralisation rappelle cette autre idée neuve : la démocratie repose avant tout sur la coopération sociale et sur le débat public. Ce ne sont pas seulement des textes de loi ou des périmètres institutionnels qui ont fait la décentralisation, c'est aussi l'envie qu'ont les gens de construire une société plus juste et plus respectueuse des différences et des créativités.

Les citoyens ont compris depuis longtemps qu'il faut pour cela une démocratie qui fonctionne bien et qui soit à l'échelle de leur action et de leur engagement, mais le Gouvernement a perdu ce fil d'Ariane. Je déplore qu'il fasse faire marche arrière, dans ce domaine aussi, à notre pays et à nos concitoyens.

Il nous revient à nous, forces de progrès, au-delà de notre résistance d'aujourd'hui, de nous préparer à mener la vraie réforme de l'organisation territoriale de la République.

Anticipons de, je crois, 696 jours. Que sera la réforme que nous devrons proposer pour remettre d'aplomb notre démocratie ? Les principes sont assez éloignés de la perfide réforme-patchwork que vous nous proposez.

La justice sociale et l'égalité des possibles entre les citoyens, quel que soit leur lieu de résidence sur le territoire national, est, nous semble-t-il, le premier principe à partir duquel penser ce qui doit changer dans notre organisation territoriale. La qualité des services publics, par exemple, dépend beaucoup des moyens des collectivités. En outre, les territoires les moins denses doivent payer plus cher pour le même service ; je pense à Internet aussi bien qu'au transport scolaire.

Il faudra articuler le débat entre compétences et refonte de la fiscalité, pour s'assurer que les collectivités aient les moyens de leurs compétences. Il faudra également mettre en place des fonds de péréquation qui les fassent entrer dans un jeu solidaire propice au renforcement de la cohésion territoriale de la France. Dans ce cadre également, la construction d'infrastructures publiques, notamment de fibres optiques, doit permettre des péréquations tarifaires entre usagers, sur le modèle du prix unique du timbre, d'une grande modernité. (« Très bien ! » sur les bancs du groupe SRC.)

Le deuxième principe est l'efficacité de l'action publique, que nous devons à nos concitoyens. Je suis convaincue, malgré les allégations diffamatoires de certains membres du Gouvernement, que les collectivités locales sont bien gérées, mais nous devrons continuer, avec sérieux et respect, de chercher à améliorer l'efficacité publique dans son ensemble, notamment en évitant les doublons inutiles, par exemple avec les services de l'État.

Le troisième et dernier principe est celui de la qualité de démocratie locale. Je pense que nous pouvons progresser, en matière de diversité, de parité et de représentation politique. Améliorer la démocratie locale, c'est aussi permettre le vote des étrangers aux élections locales.

Enfin, comme il n'y a pas de démocratie sans élus, nous devrons régler dans la transparence, j'y insiste, la question de leur rémunération, de leur protection sociale, de leur protection juridique et de leurs conditions de retour dans la vie professionnelle.

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