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Intervention de François Rochebloine

Réunion du 18 mai 2010 à 15h00
Débat sur les relations entre l'union européenne et les pays d'afrique des caraïbes et du pacifique

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaFrançois Rochebloine :

Monsieur le président, madame la secrétaire d'État, monsieur le président de la commission, messieurs les rapporteurs, mes chers collègues, représentant d'un groupe parlementaire qui place le souci du développement au coeur de son projet, je voudrais aborder ce débat en saluant la volonté de ceux qui ont contribué à donner un contenu concret à cette idée au lendemain de l'indépendance des nouveaux États issus de la colonisation. C'est la fidélité du Nouveau Centre à cette tradition toujours vivante qui le pousse à souhaiter le renouveau d'une politique qui se cherche encore, dans un contexte de relations internationales complètement transformé.

Ce contexte explique les réactions de défiance qui se sont manifestées, parmi les pays du groupe ACP, à l'égard d'accords de partenariat économique vécus, du côté des pays dits développés, comme un moyen de renouveler efficacement la coopération entre ce qu'il est convenu d'appeler le Nord et le Sud.

On se souvient de l'appel à la mobilisation lancé, en décembre 2007, par le Président de la République du Sénégal, contre ces accords, alors en cours de négociation. M. Wade dénonçait la menace qu'ils constituaient à ses yeux pour des économies africaines exposées aux périls de la mondialisation.

Lorsque, en 1957, les pères fondateurs de la Communauté économique européenne avaient mis au point les premiers éléments d'une politique d'association avec des territoires d'outre-mer en chemin vers l'indépendance, ils avaient bien en vue la marche parallèle de l'intégration européenne et de l'aide au développement. Dans cette ligne, les conventions de Yaoundé, puis de Lomé, ont dessiné les contours d'une coopération originale, fondée sur le principe d'accords commerciaux asymétriques. Par l'ouverture non réciproque du marché européen aux produits des pays ACP, l'Europe entendait garantir des débouchés à leurs économies naissantes.

L'évolution des relations commerciales internationales a mis à mal cette relation bilatérale entre deux ensembles politiques. L'Europe a recherché la cohérence entre sa politique de relations avec les pays ACP et son implication dans la libéralisation progressive des échanges mondiaux, dans le cadre de l'Organisation mondiale du commerce.

Pour beaucoup, il n'y avait pas contradiction entre les deux démarches. Au moment où les États de l'ex-bloc soviétique adoptaient les règles du libéralisme avec un enthousiasme sans doute exagéré, il était communément admis que, parallèlement, l'ouverture des marchés était un préalable utile à la poursuite du développement.

Au 31 décembre 2007, date butoir fixée par l'OMC, seul l'accord avec les Caraïbes était signé. Les autres négociations ont achoppé, la Commission européenne adoptant une interprétation systématiquement dérégulatrice des règles de l'OMC, au-delà de l'inspiration déjà très libérale de celles-ci.

Cette attitude agressive a surpris nos partenaires ACP. L'affaiblissement apparent du souci de l'aide au développement dans l'attitude de l'Union européenne amenait de fait ces pays à voir les négociations sur de nouveaux accords comme une menace économique. Au même moment, un grand nombre d'entre eux continuaient de figurer parmi les moins avancés au monde, selon les critères des Nations unies.

Il est vrai qu'à l'époque, l'Union européenne était prioritairement préoccupée par l'urgence politique de la réforme institutionnelle et par les difficultés multiples de l'élargissement. Les instruments politiques de l'aide au développement ont malheureusement fait les frais de cette conjoncture délicate.

La relative clarification de la question institutionnelle dans l'Union offre l'occasion d'une refondation pour ses relations avec les pays du groupe ACP. Les conclusions du Conseil européen de novembre 2008 en constituent la première étape. À l'Europe d'en prolonger les orientations. Le rapport d'Hervé Gaymard et Jean-Claude Fruteau apporte à ce débat une contribution très intéressante.

Parmi les thèmes qui devraient donner lieu à des décisions concrètes, je voudrais retenir la souveraineté alimentaire et les projets d'intégration régionale.

La souveraineté alimentaire, d'abord. La dangereuse volatilité des cours des matières premières met tout simplement en cause la survie matérielle des populations dans les pays ACP. Les émeutes de la faim qui ont éclaté voici quelques mois ont rappelé que l'agriculture n'était pas une activité économique comme les autres. Les futurs accords ne sauraient remettre en cause le droit des pays du Sud à la souveraineté alimentaire. Il faut une garantie politique de la stabilité des cours.

À plus long terme, l'appui aux dynamiques d'intégration régionale est une nécessité du développement. Cet appui implique un financement stable et garanti des organisations régionales. Cette garantie est un impératif politique qui doit être rappelé à chaque menace de remise en cause au cours des négociations commerciales.

Le groupe Nouveau Centre souhaite que la préoccupation du développement retrouve sa vraie place dans les priorités politiques de l'Union européenne. Plus encore qu'un impératif humanitaire, cette préoccupation est, comme vient de le rappeler une haute autorité spirituelle, une condition nécessaire au bon fonctionnement d'un marché pensé à l'échelle de l'homme. (Applaudissements sur les bancs des groupes NC, UMP et SRC.)

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