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Intervention de Roselyne Bachelot-Narquin

Réunion du 29 avril 2010 à 15h00
Recherches impliquant la personne humaine — Discussion en deuxième lecture d'une proposition de loi

Roselyne Bachelot-Narquin, ministre de la santé :

Monsieur le président, monsieur le rapporteur, cher Olivier Jardé, monsieur le professeur Touraine, mesdames et messieurs les députés – qui ne vont pas tarder, j'en suis sûre, à nous rejoindre en masse, à moins qu'ils ne soient avec nous par la pensée –, je commencerai en remerciant M. le rapporteur de cet excellent texte : vous avez su trouver une synthèse remarquable entre les différentes options débattues, parfois avec passion, depuis maintenant plus d'un an.

Je salue aussi l'unanimité que vous avez su créer en commission : j'y vois un signe fort du consensus qui s'établit maintenant autour de votre proposition de loi. Vous avez réaffirmé votre ambition de simplifier les procédures d'encadrement de la recherche tout en augmentant la protection des personnes qui s'y prêtent.

Ce texte est un texte d'équilibre. Le premier de ses enjeux est la simplification de la réglementation de la recherche – devenue, au fil des ans et des révisions législatives, complexe, confuse, dissuasive. Il est paradoxal de constater l'écart entre le souci du Gouvernement d'accroître l'attractivité de notre pays en matière de recherche biomédicale et les difficultés quotidiennes que rencontrent en ce domaine les acteurs de terrain.

Le deuxième enjeu est de réaliser cette simplification non seulement sans diminuer la protection des patients qui s'y prêtent, mais au contraire en l'augmentant. La remise à plat des dispositions concernant la recherche à risque minime et de celles qui vont encadrer la recherche non interventionnelle – jusque-là dans un grand vide juridique – répond à cet objectif.

Le troisième enjeu est de rassembler toutes les catégories de recherche sur la personne sous une ombrelle commune, en leur donnant un socle réglementaire unique. Celui-ci comprendra l'avis obligatoire d'un comité d'éthique de la recherche, le Comité de protection des personnes, et la désignation, dans tous les cas, d'un responsable de cette recherche, le « promoteur ».

La première avancée de votre proposition de loi est l'adaptation des procédures et de la contrainte réglementaire au niveau de risque encouru par la personne qui se prête à la recherche. À cette fin, vous proposez une classification de la recherche impliquant la personne qui va comporter trois grandes catégories : les recherches interventionnelles ; les recherches à risque négligeable, devenues au Sénat des recherches à risque minime ; les recherches non interventionnelles, dites aussi observationnelles.

C'est donc fort logiquement que vous adaptez les exigences en matière de consentement à chacune de ces trois catégories.

Ainsi, pour les recherches interventionnelles, le consentement doit être « libre, éclairé et écrit ». Pour les recherches à risque minime, le consentement est « libre et éclairé », ce qui veut dire qu'il n'a pas à être obligatoirement écrit. Et, pour les recherches non interventionnelles, c'est une simple information avec faculté d'opposition qui sera demandée.

La deuxième avancée de la proposition de loi est l'extension du périmètre de la loi aux recherches non interventionnelles. Ce faisant, vous augmentez le niveau de protection des personnes qui s'y prêtent, parce que ces recherches devront désormais recueillir l'avis favorable d'un Comité de protection des personnes. De plus, le rôle de police sanitaire de l'Agence française de sécurité sanitaire des produits de santé sera étendu à ces recherches, jusqu'ici hors de son périmètre d'intervention.

Dans le même temps, les dispositions réglementaires qui seront appliquées à ces recherches seront simplifiées. Demain, un seul guichet sera nécessaire pour faire autoriser ces recherches – quand il y en a jusqu'à cinq aujourd'hui ! C'est un progrès considérable.

Enfin, en proposant pour ce texte le titre de « loi relative aux recherches impliquant la personne humaine », vous permettez l'intégration des recherches non interventionnelles dans le périmètre désormais élargi de la loi. En effet, la notion d'une recherche impliquant la personne va se substituer à celle de « portant sur » la personne.

La troisième avancée de la proposition de loi est la création d'une Commission nationale de coordination des comités de protection des personnes, destinée à remédier à la trop grande hétérogénéité de ces comités que l'on constate aujourd'hui. Vous proposez de rattacher cette commission au ministère de la santé, aujourd'hui déjà tutelle naturelle des comités.

Mais l'évolution la plus spectaculaire sera sans doute celle du rôle crucial qui sera confié aux comités de protection des personnes, pierre angulaire de tout le dispositif de protection des personnes. Grâce à l'élargissement de leur champ d'action aux recherches non interventionnelles et aux nouvelles missions qui leur sont dévolues, ces comités vont voir leur activité évoluer en profondeur.

Ce sont eux, en effet, qui statueront sur certains cas particuliers de recherches menées sur des personnes non affiliées à la sécurité sociale, ou encore sur des mineurs. Ce sont eux encore qui jugeront de l'opportunité de déroger à l'obligation d'obtenir le consentement de la famille ou des proches pour certaines recherches conduites en situation d'urgence vitale. Leur marge d'intervention et d'interprétation va être accrue.

C'est dire à quel point la coordination des comités va devenir une priorité dès que la loi sera mise en application. Et cela donne tout son sens à la nouvelle Commission nationale, dont ce sera la mission.

Par ailleurs, cette proposition de loi va considérablement simplifier la recherche sur les collections d'échantillons biologiques, un véritable casse-tête aujourd'hui, il faut le reconnaître, pour les chercheurs.

Une simplification supplémentaire a été introduite dans le domaine spécifique de la recherche en génétique. Certaines de ces recherches, cruciales pour le progrès médical, sont aujourd'hui impossibles à mener, lorsque la personne à l'origine du prélèvement ne peut être retrouvée ou est décédée. Des centaines de collections de produits biologiques, certaines uniques au monde, dorment dans nos laboratoires, la législation actuelle ne permettant pas leur utilisation à des fins de recherche. En reprenant une recommandation contenue dans un rapport récent du Conseil d'État, cette proposition de loi résout le problème de façon souple, pragmatique, et sans diminuer les droits des personnes.

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