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Intervention de Jean-François Copé

Réunion du 7 avril 2010 à 9h00
Commission des affaires culturelles et de l'éducation

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaJean-François Copé :

Peu importe, j'ai regretté votre absence.

J'ai jugé utile de dresser un bilan après une année d'application de la réforme. Ce bilan est, d'un avis unanime, très positif. Aucune des prédictions alarmistes qui avaient été faites lors du vote de la loi ne s'est réalisée. On nous avait dit que la réforme allait mettre en péril le service public de l'audiovisuel : elle a au contraire renforcé France Télévisions. On nous avait dit qu'il y aurait de graves difficultés de financement parce que l'État ne tiendrait pas ses engagements : en dépit de la crise économique, il les a tous tenus – de l'avis même des dirigeants de l'entreprise, « le compte y est ». Imaginons en revanche ce qu'auraient été les recettes publicitaires de France Télévisions sans la réforme ! On nous avait dit que la réforme constituait un cadeau pour les chaînes privées, sur lesquelles se transférerait automatiquement la publicité supprimée sur les chaînes publiques. Je l'avoue, je pensais que ce transfert serait beaucoup plus important, n'y voyant d'ailleurs nul cadeau, seulement des recettes supplémentaires pour les chaînes privées, dont je souhaitais qu'elles servent à financer davantage de fiction française et européenne. Personne n'était lésé dans cette réforme. La gauche ne peut être défavorable à ce que ce soit le contribuable qui finance la télévision publique, puisqu'elle l'a préconisé durant des années – c'est plutôt nous qui étions contre à l'époque et nous sommes convertis. Avec l'irruption de la crise, le transfert n'a pas été suffisant, déjà en volume sans même parler des prix. La crise a assurément eu une incidence, mais les chaînes privées doivent peut-être aussi revoir leur modèle économique et réfléchir aux moyens d'aller capter une ressource, partie certes sur les chaînes de la TNT mais surtout dans d'autres médias. J'ai quelques idées sur le sujet, mais tel n'est pas l'objet de ces tables rondes...

On se demandait en 2009 quel serait le résultat de la suppression de la publicité après 20 heures sur les chaînes publiques. Eh bien, cela a imprimé un nouveau rythme aux soirées. Une deuxième partie de soirée commençant à 22 heures, c'est tout à fait différent pour des personnes qui ont eu une longue journée de travail que si elle ne commence qu'à 23 heures ou plus tard. C'est d'ailleurs une bonne nouvelle pour nous, les émissions politiques étant plutôt programmées en deuxième partie de soirée : plus de téléspectateurs pourront les regarder et ainsi participer au débat politique. Cela permet aussi d'accroître l'audience des documentaires, des émissions culturelles… Toutes les études d'opinion sans exception indiquent que les Français approuvent massivement la suppression de la publicité après 20 heures – 78 % d'entre eux selon une étude menée par le CSA pour Le Parisien.

S'agissant de la création et de la programmation, le travail des équipes de France Télévisions est unanimement salué. Apocalypse est citée comme emblème de qualité, mais beaucoup d'autres émissions pourraient l'être. France Télévisions a su prendre la balle au bond et diffuser des émissions vraiment remarquables.

En matière de réorganisation de l'entreprise, tout ne peut pas avoir été fait en un an. Mais reconnaissons que l'entreprise unique sera l'outil majeur de la modernisation. Beaucoup reste à faire dans les deux domaines éditorial et technologique, mais au moins dispose-t-on de l'outil nécessaire.

Au total, voilà beaucoup de points positifs pour une réforme « funeste » !

Cela étant, je ne le nie pas, il reste des points à améliorer. Ce sont les défis à venir. S'agissant d'organisation, le concept même d'entreprise unique commande qu'on gagne en cohérence, en productivité aussi, en trouvant des synergies entre les différentes fonctions supports et en rationalisant les moyens. Il existe incontestablement des marges d'économies. Pour ce qui est des contenus, aux nouvelles soirées thématiques déjà organisées, pourraient s'en ajouter d'autres, et ce n'est là que mon avis de simple téléspectateur, sur les thèmes de l'Europe, de la santé, de la science, de l'économie, de l'environnement… Chacune des chaînes doit aussi renforcer son identité, je pense notamment à France 3 et France 4. Nous ne sommes pas allés aussi loin que nous l'aurions souhaité pour la première, pour diverses raisons sur lesquelles je ne reviens pas. France Télévisions pourrait opportunément s'inspirer de Radio France qui a su conjuguer entreprise commune et antennes distinctes. Plusieurs initiatives très intéressantes ont été prises concernant les nouveaux supports afin de faire de France Télévisions un média global. On peut aller encore plus loin, même si le site Internet est d'ores et déjà très riche avec de plus en plus de contenus complémentaires, de « bonus », de « coulisses »…

Je précise que je ne formule pas toutes ces observations à titre personnel. Nous les avons évoquées avec tous les membres de la commission que je préside, qui les partagent.

Je voudrais maintenant aborder la question de la publicité en journée. Je juge sain d'avoir dès maintenant un débat sur le sujet. Nous l'avions toujours dit, il importerait d'abord d'être pragmatique et d'évaluer la réforme. C'est une preuve d'intelligence politique que de savoir s'adapter. Le bilan de la suppression de la publicité sur les chaînes publiques en soirée est, je le répète, extrêmement positif : ce n'est d'ailleurs pas un hasard si c'est ce que nous avions commencé par préconiser et avions prévu une clause de revoyure en mai 2011. Ayant beaucoup réfléchi sur le sujet, je mets en débat, à titre personnel, la proposition de ne pas la supprimer en journée. Il me semble en effet que la véritable attente des téléspectateurs concernait le soir, où cette suppression pouvait vraiment modifier les habitudes, ce qu'elle a fait. Je ne suis pas sûr qu'en journée, sa suppression constituerait une avancée équivalente. Nous avions par ailleurs estimé le coût de la mesure à 200 millions d'euros par an, s'ajoutant aux 450 millions qu'il faut déjà compenser. N'étant pas, pour ma part, du tout favorable à l'augmentation de la redevance et connaissant la situation de nos comptes publics, je pense que le rapport coûtavantage de la suppression de la publicité en journée mérite d'être évalué.

S'agissant de la taxe de 0,9 % sur les opérateurs de communications électroniques, le combat continue à Bruxelles. Je suis, pour ma part, très réservé sur les arguments avancés par la Commission. Le Gouvernement français demeure offensif et saura se défendre. Dans la mesure où nous avons une clause de revoyure pour mai 2011 au plus tard, il n'est pas prématuré de soulever la question en avril-mai 2010, si nous sommes un certain nombre à penser que la suppression de la publicité en journée n'aurait pas le même impact positif qu'en soirée. Pourquoi rester dans l'incertitude et l'ambiguïté pendant un an ? Mieux vaut que les annonceurs et les chaînes soient rapidement éclairés. Je souhaiterais donc qu'un petit groupe de travail se constitue sur le sujet, auquel je convie bien sûr les députés de l'opposition à participer, s'ils le souhaitent.

Un dernier mot, sur l'avenir de la régie publicitaire de France Télévisions. Je considère qu'il n'appartient pas au Parlement de se prononcer sur l'opportunité d'ouvrir le capital de cette régie ou de la privatiser. Cette décision relève de la seule responsabilité de l'entreprise et de son conseil d'administration. La procédure est déjà très avancée, un repreneur ayant été présélectionné. Je profite de l'occasion pour dire combien je suis choqué par le procès d'intention fait au consortium pressenti. Les attaques contre les personnes ne sont jamais glorieuses…

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