Découvrez vos députés de la 14ème législature !

Intervention de Bruno Le Maire

Réunion du 25 septembre 2008 à 15h00
Revenu de solidarité active — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaBruno Le Maire :

Monsieur le président, monsieur le haut-commissaire, mes chers collègues, il y a vingt ans, sur proposition de François Mitterrand et de Michel Rocard, le Parlement décidait à l'unanimité d'instaurer le RMI. Vingt ans plus tard, sur proposition de Nicolas Sarkozy et de François Fillon, nous allons mettre en place un nouveau dispositif qui permettra à chacun en France de vivre dignement des revenus de son travail. J'espère donc que l'opposition d'aujourd'hui aura le courage et l'ouverture d'esprit de l'opposition d'hier et qu'elle défendra et votera le RSA.

Martin Hirsch, à qui nous devons cette révolution sociale, n'a pas élaboré le RSA pour les gens de droite ou pour les gens de gauche, mais pour tous les bénéficiaires de minima sociaux qui hésitent à reprendre un emploi parce qu'ils perdraient de l'argent en retrouvant une activité. Il l'a fait pour tous les travailleurs pauvres pour qui un emploi ne veut pas nécessairement dire une vie décente. Il l'a fait pour tous les chômeurs de longue durée dont la volonté de retrouver une activité se heurte au manque de formation ou à la complexité administrative.

À titre personnel, je suis fier que le gouvernement Villepin ait été le premier à autoriser par décret une expérimentation du RSA dans l'Eure avant sa généralisation par la loi.

Trois points de fond sont au coeur de la nouvelle donne sociale, sur laquelle je vais m'arrêter un instant.

Le premier point, c'est la simplicité.

À force de vouloir combler les lacunes du RMI, nous avons empilé les dispositifs d'assistance en tous genres, sans nous préoccuper réellement ni de leur efficacité, ni de leur cohérence. En mettant en place le RSA, nous inversons les choses : la reprise du travail devient la priorité. Et un seul dispositif remplace au moins cinq prestations différentes.

Le deuxième point, c'est la souplesse.

Le RSA n'est pas un carcan. Il constitue au contraire un dispositif sur mesure, qui prend acte des changements profonds intervenus sur le marché du travail depuis plusieurs années. Il se veut réaliste. Il avance par étapes, pour permettre à chacun de définir ou de reconstruire une vraie trajectoire professionnelle. À cet égard – je rejoins ici de nombreux intervenants – notre débat devra répondre à des questions majeures : comment poursuivre cette progression une fois l'emploi retrouvé, pour éviter le creusement du phénomène de trappe à bas salaires ? Quelle réponse apporter aux jeunes de moins de 25 ans qui prennent un emploi avec une faible qualification ?

Le troisième point, c'est l'équité qui est le pilier du RSA.

En effet l'équité, ce n'est pas donner plus à ceux qui n'ont rien sans se préoccuper de leur insertion sociale. L'équité, c'est compenser les handicaps qui freinent le retour à l'emploi pour que chacun, quel que soit son niveau de qualification, quelle que soit sa formation, quel que soit son parcours personnel, puisse reprendre sa place dans la vie active. De ce point de vue, le RSA n'est pas une réforme idéologique ou partisane. C'est une réforme républicaine.

Bien entendu, ce dispositif a un coût. Il demande donc un financement adéquat.

Il y a quelques semaines, le Président de la République a annoncé que ce financement serait supporté par une taxe de 1,1 % sur les revenus du capital. Je ne crois pas trahir le sentiment général de notre groupe en affirmant que cette annonce n'a pas soulevé un élan d'enthousiasme. Cependant je ne crois pas non plus trahir notre majorité en affirmant que cette décision est à la fois nécessaire et responsable : nécessaire, parce que nous ne pouvons pas courir le risque d'un défaut de financement du RSA ; responsable, parce que l'état de nos finances publiques ne nous permet pas d'envisager une quelconque aggravation de la charge de la dette.

Pour que cette taxe de 1,1 % soit acceptable, elle doit répondre à trois conditions.

La première, c'est la solidarité. Le poids de la taxe ne doit pas être supporté par quelques-uns. Il doit l'être par tous. Pour répondre à cette condition, nous avions différentes options.

Nous aurions pu sortir la taxe de 1,1 % du bouclier fiscal. C'est d'ailleurs l'option que j'avais défendue, avec d'autres, devant la commission des finances. Tout simplement par cohérence, parce que j'ai toujours estimé, au moment de la création du bouclier fiscal à 60 % comme au moment de la discussion sur la loi TEPA, que les cotisations sociales devaient rester à part.

Une autre option est possible, qui a le double mérite de la cohérence et de l'efficacité : c'est le plafonnement des niches fiscales, dont le principe a été adopté par l'ensemble de la majorité. Je suis convaincu que c'est une option juste, qui permettra à la fois de mettre fin à la situation surréaliste des très hauts revenus qui ne paient pas l'impôt et de financer correctement la solidarité. Nous serons vigilants, avec la commission des finances, sur l'effectivité de ce plafonnement comme sur la réalité de l'attribution de son produit au seul financement du RSA.

La deuxième condition, c'est le contrôle. Avec l'ensemble des députés de la majorité, nous souhaitons que le produit de la taxe, son attribution comme l'équilibre financier du dispositif fasse l'objet d'une évaluation précise dès l'année prochaine.

La troisième condition, c'est la cohérence. À force de compléments successifs, notre système fiscal est devenu incompréhensible pour beaucoup de nos concitoyens. Un impôt légitime est un impôt équitable, mais un impôt efficace est un impôt clair. De ce point de vue, il nous reste du chemin à parcourir. La remise au goût du jour de la revue générale des prélèvements obligatoires pourrait nous permettre de relever le défi et de remettre de la cohérence dans notre système de prélèvements obligatoires.

Vous le voyez, le RSA a les vertus des grandes réformes : il apporte de vraies réponses, mais il soulève aussi de nouvelles questions. Ce sera l'honneur de notre assemblée, dont les pouvoirs ont été renforcés par la réforme constitutionnelle, d'y répondre. Vous savez, monsieur le haut-commissaire, que vous pouvez compter sur la mobilisation et la volonté de notre majorité, qui est fière d'examiner aujourd'hui un texte audacieux et fondateur. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Inscription
ou
Connexion