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Intervention de Patrick Braouezec

Réunion du 16 février 2010 à 15h00
Projet de loi d'orientation et de programmation pour la performance de la sécurité intérieure — Explications de vote

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaPatrick Braouezec :

Nul doute que celui-ci n'aura pas plus d'effets que les précédents et que nous en aurons bientôt un seizième ou un dix-huitième selon le décompte choisi.

S'agit-il vraiment de protéger davantage les citoyens ou bien d'un effet d'annonce alors que les élections régionales approchent ? Nous sommes nombreux sur ces bancs à pencher pour le second terme de l'alternative. Cette loi pourra-t-elle d'ailleurs être appliquée avant cette échéance ? En effet, le Gouvernement a oublié de notifier la LOPPSI à Bruxelles, conformément à la directive n°98-48 de la Commission, en date du 20 juillet 1998. À moins que le Gouvernement ne brandisse la menace de l'imminence de risques graves et imprévisibles pour la sécurité et l'ordre public, notamment pour la protection des mineurs.

Quoi qu'il en soit, il faut bien constater que ce projet est conforme à l'idéologie primaire et dangereuse qui préside depuis plusieurs années au traitement des questions de sécurité. Il y a de quoi s'inquiéter quant à l'évolution de la société. Dans quel monde voulez-vous faire vivre les hommes et les femmes de ce pays ?

À cause de votre refus de la discussion, nous avons assisté à une parodie de débat, indigne des valeurs démocratiques que nous sommes censés défendre, alors que ces questions préoccupent à juste titre nombre de nos concitoyens. Il est invraisemblable de ne penser qu'à dresser les gens les uns contre les autres, avec pour seul objectif de surveiller et punir.

Surveiller dans les moindres recoins : plus aucun lieu de l'espace public ne doit échapper à l'oeil de Big Brother. Nous pensions y échapper mais il vient, grâce au Gouvernement, d'acquérir son droit de cité. À cause de ce projet, toutes les entreprises privées vont pouvoir implanter sur la voie publique des systèmes de vidéosurveillance. Les préfets pourront, quant à eux, autoriser la mise en place de tels dispositifs « en cas de manifestation de grande ampleur présentant un risque pour l'ordre public ». L'objectif est clair : généraliser la surveillance des espaces publics au nom d'une efficacité d'autant plus hypothétique que le fameux exemple anglais s'apparente à un véritable fiasco.

Pourquoi ne pas écouter et analyser les constats élaborés par ceux qui ont déjà mesuré les limites de la folie sécuritaire ?

L'obsession du fichage policier marque également ce projet. Non content de reconduire les dispositifs actuels, pourtant détournés de leurs objectifs initiaux, truffés d'erreurs et incontrôlables, le Gouvernement veut les interconnecter et même les étendre.

Que dire par ailleurs du couvre-feu pour les mineurs de moins de treize ans qui ne manquera pas d'engendrer des contrôles d'identité abusifs ? Je ne reviendrai pas sur ce qui vient d'arriver à la jeune Anne, âgée de quatorze ans, victime d'une garde à vue entachée d'un acte arbitraire commis par plusieurs agents détenteurs de l'autorité publique, contrairement aux dispositions de l'article 3 de la convention européenne des droits de l'homme.

Avez-vous si peur des jeunes que votre seul projet consiste à les maintenir enfermés ? Leurs parents aussi vous font peur : en cas de manquement à leurs devoirs, ils seront soumis au contrat de responsabilité parentale ; vous renforcez en cela la pénalisation de familles qui vivent déjà de grandes difficultés.

Que dire encore de l'inquiétante ébauche d'un traitement administratif des mineurs délinquants par la transmission systématique au préfet et au président du conseil général de toutes les décisions judiciaires les concernant ?

Les internautes ne sont pas oubliés avec le filtrage policier des sites internet, aussi inefficace que lourd de menaces pour les libertés individuelles.

Même le conducteur voit réintroduites les peines automatiques en matière routière.

Je ne serais pas complet si je ne signalais la création d'une milice policière baptisée « réserve civile » et si je ne mentionnais pas l'augmentation des pouvoirs de la police municipale.

Et l'on ne saurait oublier que ce projet veut imposer une justice virtuelle, délocalisée et déshumanisée, ce qui est contraire au droit à un procès équitable.

Ainsi, le Gouvernement, faute de pouvoir répondre aux causes réelles des insécurités – je pense au chômage, au manque de formation, aux problèmes liés à l'école et à l'éducation, au mal-logement – dessine les contours d'un nouveau pays où la répression serait la meilleure des préventions. Pour toutes ces raisons, le groupe GDR ne votera pas ce projet attentatoire aux libertés privées et publiques et qui ne réglera en rien les problèmes qu'il est censé résoudre. (Applaudissements sur les bancs du groupe GDR.)

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