Découvrez vos députés de la 14ème législature !

Intervention de Yves Cochet

Réunion du 27 janvier 2010 à 15h00
Débat sur la sécurité des réseaux d'approvisionnement en électricité

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaYves Cochet :

Je le reconnais, la gauche a fait la même chose. Mais pas les écologistes ! Nous avions pour notre part anticipé les conséquences d'une telle politique, lesquelles n'avaient pas été envisagées à l'époque par les dirigeants.

Nous avons de nombreux exemples de ces conséquences, comme les aléas climatiques qui entraînent la rupture d'approvisionnement en électricité de nos concitoyens. Je vais démontrer l'aspect pervers du chauffage électrique. Le risque principal est une panne lorsqu'il fait froid ou lors d'une tempête, ou encore, lorsqu'il fait très chaud, la mode nouvelle consistant à climatiser les bâtiments.

Quels sont les perdants de ce surdimensionnement du système électrique français ? D'abord, la sécurité énergétique, nous l'avons constaté avec les deux incidents qui ont eu lieu, cette année et l'année dernière ; ensuite, les émissions de CO2, catastrophiques à cause des pics de consommation ; la collectivité, c'est-à-dire les contribuables, qui financent le surdimensionnement du système électrique français ; EDF elle-même, qui est perdante puisqu'elle investit beaucoup trop dans ce qui pourrait être lissé autrement ; enfin, les consommateurs, qui paient au prix fort cette électricité de pointe.

D'ailleurs, selon Les Echos, l'avant-projet de loi sur la réforme du marché de l'électricité prévoit que les tarifs réglementés seront plus élevés pendant les périodes de pointe. Vous pourrez peut-être, monsieur le ministre, nous éclairer sur ce point. Il y a eu hier un démenti d'EDF. Le président Gadonneix avait dit qu'il faudrait augmenter de manière générale les tarifs de l'électricité. Il a été remercié, notamment pour cette raison. M. Proglio augmentera-t-il les tarifs ? Nous l'ignorons. Cela étant, nous aurons bientôt une nouvelle loi portant sur le marché de l'électricité. Monsieur le ministre d'État, cette loi prévoit-elle d'augmenter les tarifs pour les heures de pointe, qui peuvent se produire pendant quelques jours, voire quelques semaines ? Je vais sans doute vous étonner, mais je ne suis pas opposé à une telle mesure, qui pourrait inciter à ne plus construire de bâtiments tributaires du chauffage électrique, comme c'est le cas actuellement pour 70 % des logements neufs. Il y a eu un véritable matraquage pour convaincre les gens que l'électricité était une énergie formidable. En réalité, elle peut nous conduire au black-out.

Les gagnants sont les traders d'électricité, les constructeurs de logements et les fabricants de convecteurs électriques, ceux que j'ai appelés lors du débat sur le Grenelle, de manière amicale, le « gang des grille-pains » ! Cette tendance est encore renforcée par les dispositions que vous avez prises en faveur d'une mauvaise taxe carbone – qui a certes été retoquée par le Conseil constitutionnel et qui va revenir devant notre assemblée –, qui n'inclut pas l'électricité dans l'assiette de la taxe. Ainsi, vous incitez nos concitoyens à choisir le chauffage électrique, dans la mesure où il n'est pas soumis à la taxe carbone !

Quel choix avons-nous ?

Soit nous poursuivons la fuite en avant à travers les fausses bonnes idées, telles que gérer la pointe, produire plus d'électricité ou créer de nouveaux usages, comme la climatisation – il y en a bien d'autres, telles les pompes à chaleur.

Soit nous choisissons la seule approche rationnelle du point de vue thermodynamique, mais aussi du point de vue politique et des investissements financiers, une démarche de type « négawatt », c'est-à-dire la sobriété, l'efficacité et les énergies renouvelables, par la mise en oeuvre de mesures tarifaires, réglementaires et fiscales simples.

Il existe une contrainte structurelle sur le système électrique : il faut produire à tout instant autant d'électricité que la demande. Il n'y a en effet que très peu de stockage. La pointe de puissance est le moment de l'année où la demande est la plus importante, à cause du chauffage électrique. C'est cette pointe de puissance qui entraîne un surdimensionnement considérable, même pour quelques heures par an, parce que ce sont des centrales à flammes et elles seules qui peuvent être appelées au moment des demandes de pointe.

Ceci est considérable. Par exemple, la consommation due au chauffage électrique durant la pointe hivernale du 7 janvier 2009 est responsable d'une surconsommation en puissance de 34 000 mégawatts, soit l'équivalent de la moitié du parc électronucléaire français.

Nous sommes donc en face d'une contradiction majeure du système électrique français : d'un côté, nous avons un parc électronucléaire excédentaire en base – lorsque la demande est moindre, nous produisons beaucoup trop – et, de l'autre, une demande excédentaire en pointe. C'est ce qui s'est produit le 7 janvier 2009 et qui se produira peut-être ce soir.

L'usage du chauffage électrique représente à lui seul 60 térawattheures de consommation, soit 12,3 % de la consommation annuelle totale de la France en électricité. Mais, pendant l'hiver 2008-2009, nous avons dépassé 70 térawattheures, soit près de 15 % de la consommation électrique totale de la France. C'est l'équivalent de la consommation totale d'un pays comme la Suisse, simplement à cause du chauffage électrique !

Aujourd'hui, et plus encore avec cette mauvaise taxe carbone, 70 % des logements neufs sont chauffés à l'électricité, soit 27 % de la consommation totale du parc résidentiel. Cette situation est unique en Europe. Les conséquences en termes de fragilité du système électrique sont désastreuses.

Je ne parlerai pas du gradient thermique, car ce sujet serait trop technique. J'en viens à ma conclusion.

Le rendement du chauffage électrique est particulièrement faible, alors que l'électricité est une matière noble. Mais la dégrader dans des convecteurs est une bêtise thermodynamique que je n'ai jamais comprise ! le rendement global de la filière est de l'ordre de 25 %, soit la moitié de ce que font les autres pays en Europe. Le rendement thermodynamique est nul. Nous pouvons faire beaucoup mieux.

Quelles sont les orientations que je propose, aujourd'hui, à l'occasion de ce débat ?

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Inscription
ou
Connexion