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Intervention de Christine Lagarde

Réunion du 18 mai 2009 à 21h30
Organe central des caisses d'épargne et des banques populaires — Discussion d'un projet de loi après engagement de la procédure accélérée

Christine Lagarde, ministre de l'économie, de l'industrie et de l'emploi :

Les deux groupes partagent une culture coopérative commune qu'ils conserveront dans l'opération, les caisses d'épargne, qui contribuent à la lutte contre l'exclusion bancaire, au financement du logement social et à l'amélioration du développement économique, autant que les banques populaires, qui sont attachées au développement de la culture de l'entreprenariat et qui financent une fondation pour développer ces valeurs.

Ce rapprochement permettra au nouveau groupe d'atteindre deux objectifs. Tout d'abord, il confortera la solidité financière des deux groupes. Dans le respect des deux identités et des deux marques, le nouveau groupe pourra s'appuyer sur deux réseaux autonomes et complémentaires : l'un – le réseau des caisses d'épargne – sera plutôt orienté vers le crédit aux particuliers tandis que l'autre, celui des banques populaires, sera davantage tourné vers le crédit aux entreprises. Fort d'une activité plus diversifiée reposant sur tout l'éventail des métiers de la banque de détail sur un marché domestique, le groupe renforcera ainsi son positionnement comme banque universelle de dépôts. Les synergies que permettra ce rapprochement ne remettront donc pas en cause l'identité de chacun des deux réseaux.

Autre avantage : ce rapprochement permettra d'améliorer le pilotage de Natixis, avec une gouvernance claire et simplifiée. Un actionnaire unique au lieu de deux : voilà évidemment ce qu'il faut à Natixis pour affronter l'avenir. Natixis – vous le savez – regroupe pour l'essentiel des activités de banque de financement et d'investissement, qui sont les plus exposées à la crise financière. C'est sur ce même segment d'activités que les grandes banques françaises et internationales ont enregistré l'essentiel de leurs pertes depuis le début de la crise financière. Les pertes de Natixis doivent donc être relativisées à l'échelle du nouveau groupe qui rassemble les caisses d'épargne et les banques populaires. En effet, leur rapprochement permettra d'intégrer Natixis dans un ensemble au profil plus diversifié et assis sur des réseaux solides et des métiers moins volatils que la stricte banque de financement et d'investissement.

Natixis a par ailleurs engagé un plan de réduction de ses risques, grâce à la mise en gestion extinctive de certains actifs. Ce portefeuille, dont on peut dire dans ces conditions qu'il est « cantonné », couvre 33,7 milliards d'euros de risques pondérés. Il comprend les actifs dits « toxiques » de Natixis, à savoir les actifs exposés à la crise immobilière américaine, mais également des actifs de marché complexes tels que les dérivés de taux ou les structurés de fonds. Ce portefeuille, qui s'apparente donc en quelque sorte à une structure interne de cantonnement, fait l'objet d'un suivi rapproché de la part de la Commission bancaire, en sus du suivi « classique » de l'établissement réalisé par le superviseur.

Les pertes de Natixis au premier trimestre 2009 s'expliquent par les pertes enregistrées sur ce portefeuille en gestion extinctive, le reste de ses activités dégageant des bénéfices. Le rapprochement des caisses d'épargne et des banques populaires permettra donc d'améliorer la gouvernance de cette filiale et de l'intégrer dans un groupe au profil de risque beaucoup moins élevé.

Cette union passe par la création d'un organe central commun, détenu à parité entre les deux groupes. Une telle opération relève du domaine législatif – tout comme il avait été nécessaire de passer par la loi pour créer les organes centraux des banques populaires et des caisses d'épargne en leur temps.

Dans ces conditions, il va de soi que l'État souhaite accompagner cette union qui, je vous le rappelle, ne procède pas de la volonté de l'exécutif, mais de celle des deux groupes, qui l'avaient d'ailleurs annoncée et anticipée depuis longtemps. Dans le cadre des opérations de renforcement des fonds propres des banques pour soutenir le financement de l'économie, le Gouvernement s'est engagé à accompagner la création du nouveau groupe par un apport de fonds propres, à hauteur de cinq milliards d'euros, qui seront affectés au titre de la deuxième tranche que j'évoquais à l'instant.

L'État réalisera cet apport de fonds propres, d'une part, dans les conditions de droit commun sous la forme de titres super-subordonnés à concurrence de 2 milliards d'euros, titres qui pourront être souscrits avant le 31 août par les deux groupes, comme c'est le cas pour les autres établissements bancaires français qui n'auraient pas auparavant fait appel à ce refinancement complémentaire.

D'autre part, l'État apportera au nouveau groupe un complément de fonds propres sous la forme d'actions de préférence sans droit de vote pour un montant de 3 milliards d'euros, actions qui seront émises par le nouvel organe central, une fois la fusion réalisée. Ces apports permettront au nouveau groupe de bénéficier d'une structure financière robuste et pérenne et d'afficher un ratio de solvabilité « Tier 1 » proche de 9 %, à l'instar des banques européennes les mieux capitalisées à ce jour.

Toutes les conditions sont réunies pour assurer l'intégrité de l'investissement de l'État, objectif qui est au coeur de la démarche du Gouvernement et que souligne dans son rapport votre rapporteur général. Les actions de préférence seront injectées au niveau du nouvel organe central. La rémunération et le remboursement de cet apport seront en revanche assis sur l'ensemble du groupe.

L'apport en fonds propres de 5 milliards d'euros dépasse de 3 milliards d'euros l'apport proposé aux autres banques de la place. Ce surcroît, sur lequel j'ai eu l'occasion de m'expliquer en détail devant la commission des finances, a été approuvé par la Commission européenne le 8 mai dernier.

Bien entendu, là comme ailleurs, l'État a demandé des contreparties.

Il disposera tout d'abord de droits de gouvernance dans le nouveau groupe. Le nouvel organe central possédera un directoire et un conseil de surveillance. Celui-ci comprendra, outre deux représentants des salariés, dix-huit membres : sept issus du groupe Banque Populaire, sept issus du groupe Caisse d'Épargne et quatre désignés sur proposition de l'État, dont deux membres indépendants.

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