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Intervention de Abdoulatifou Aly

Réunion du 3 décembre 2009 à 15h00
Planification écologique — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaAbdoulatifou Aly :

Monsieur le président, madame la secrétaire d'État, mes chers collègues, la proposition de loi qui nous est présentée aborde un sujet fondamental : l'adaptation de nos politiques publiques à l'urgence écologique. L'objet de ce texte, l'instauration d'une « planification écologique », m'amène à formuler deux remarques liminaires sur les termes mêmes de son intitulé.

Tout d'abord, la référence à la planification me semble intéressante. Elle tend en effet à réhabiliter un concept invalidé par sa traduction collectiviste et impérative dans les pays de l'ancien bloc soviétique, qui a totalement échoué et s'est traduite, permettez-moi de le faire remarquer, par un désastre écologique total. Toutefois, en lui donnant une forme indicative, le général de Gaulle avait su adapter de manière intelligente à notre pays cette « ardente nécessité » du Plan, qui n'a pas peu contribué au redressement de la France de l'après-guerre. À cet égard, on peut regretter l'abandon de cet outil sous le précédent quinquennat.

Ensuite, le caractère écologique de cette planification se justifie par l'urgence environnementale dans laquelle nous sommes aujourd'hui. Je rappelais ce matin la vulnérabilité de notre petite île-lagon de Mayotte aux phénomènes liés au réchauffement climatique mis en lumière par les scientifiques. Comme les Grenelle I et II au plan national et le sommet de Copenhague au plan mondial, le texte dont nous débattons s'inscrit dans cette salutaire prise de conscience.

C'est donc sans a priori défavorables que j'aborde l'examen de la proposition qui nous est présentée. Elle a le mérite de d'exposer de manière directe la situation dans laquelle nous sommes et la nécessité d'y apporter des réponses fortes, en faisant toute sa place au volontarisme de l'action des pouvoirs publics.

Néanmoins, je me permets de faire les remarques suivantes, qui témoignent, sinon d'une inquiétude, tout au moins d'une vigilance quant à la démarche qui sous-tend cette proposition.

Il convient tout d'abord de bien se mettre d'accord sur les objectifs recherchés. S'agit-il de rendre le développement économique et social de notre pays compatible avec la préservation des ressources de la planète ou bien de s'inscrire dans une logique de décroissance, voire de malthusianisme, faisant de l'homme un suspect par nature et de ses activités économiques de dangereuses pratiques à combattre ? Mon ami et collègue Jean Lassalle a souvent souligné le risque d'une conception uniquement punitive et, parfois même, hélas ! dans ses versions extrêmes, anti-humaniste de l'écologie. Permettez-moi également de vous rappeler combien, compte tenu des retards économiques et sociaux très lourds qui sont ceux de Mayotte, est forte chez nous l'attente d'un vrai développement, et non d'une décroissance. Cette clarification sur les fins de la planification écologique semble donc nécessaire.

Se pose également la question du degré de liberté laissé aux acteurs de terrain ; je pense en premier lieu aux collectivités locales, qui sont explicitement mentionnées dans la proposition et qui pourraient se retrouver extrêmement contraintes par des orientations s'imposant à elles, en contradiction avec le principe de leur libre administration. On peut également légitimement s'interroger sur la pertinence d'une planification à l'échelle strictement nationale, alors que les enjeux environnementaux relèvent de décisions en grande partie européennes.

Enfin, il est peut-être quelque peu dérisoire d'attacher une telle importance à la dénomination des dispositifs et structures, que vous souhaitez rebaptiser « Commissariat à la planification écologique » et « Délégation interministérielle à l'aménagement écologique des territoires ».

Trouver un juste équilibre entre la réponse à l'urgence écologique, le développement économique et la justice sociale : tel est le défi que nous devons relever, dans le respect des valeurs de notre République, au premier rang desquelles figure la liberté, et avec le souci constant d'associer au maximum les citoyens à ces choix décisifs. En conclusion, j'attends avec une certaine circonspection de notre débat les éléments qui me convaincront que cette proposition s'inscrit effectivement dans cette vision équilibrée.

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