Découvrez vos députés de la 14ème législature !

Intervention de Pierre Gosnat

Réunion du 1er décembre 2009 à 15h00
Grand paris — Explications de vote

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaPierre Gosnat :

Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'État, chers collègues, le projet de loi relatif au Grand Paris est soumis au vote des députés aujourd'hui, mais, puisque vous avez décidé l'urgence, il n'y aura qu'un passage, c'est-à-dire un passage en force.

Le Président de la République et sa majorité s'y connaissent en urgence comme moyen d'affaiblir le débat démocratique. L'urgence se retrouve au fil des annonces publicitaires à la radio et dans les journaux où, sans attendre le vote de ce jour, vous proclamez : « Le Grand Paris, une grande idée qui a besoin de vos idées. »

De quelles idées parlez-vous ? De celles qui ont été formulées par les dix équipes d'architectes missionnées par Nicolas Sarkozy quand, le 29 avril, il déclarait : « Voilà le plus grand défi de la politique du XXIe siècle », ajoutant « C'est cela l'ambition du Grand Paris. »

Je le dis sans détour : le Président a trahi la confiance, l'intelligence, la créativité de ces femmes et de ces hommes de l'art qui avaient répondu à un appel qui aurait pu être réellement innovant s'il n'avait été le prétexte à une opération politicienne. De cette confiance, il ne reste rien !

De quelles idées parlez-vous ? De celles que nous avons travaillées au sein de la commission Carrez, traçant des pistes qui, pour une fois, sans être totalement consensuelles, méritaient d'être approfondies par tous ? Elles ont été détournées.

De quelles idées parlez-vous ? De celles issues du schéma d'aménagement d'Île-de-France, adopté par le conseil régional dont c'est la compétence, par la majorité des conseils généraux et par un grand nombre de villes ? « Pas assez d'ambition », avez-vous déclaré, monsieur le secrétaire d'État, comme pour mieux justifier l'arbitraire qui a conduit à ne pas valider ce schéma et à gagner du temps pour rédiger ce projet de loi sans aucune concertation avec les élus franciliens, malgré vos multiples déplacements.

Vous n'avez pas compris ou pas voulu comprendre qu'il y a dans cette région, la plus riche de France, les plus grandes inégalités territoriales. Bien évidemment, elles se calquent sur les inégalités sociales, fiscales, culturelles et économiques. Des poches de misère côtoient, à quelques centaines de mètres, des richesses insolentes.

Ainsi, vous n'avez pas compris ou pas voulu comprendre que, pour devenir ville-monde, la région capitale de la France devait résoudre ses inégalités : le « mal-logement », l'asphyxie des transports collectifs, les inégalités d'accès au savoir et à la culture, l'inégalité de traitement entre les quartiers défavorisés rejetés par l'État et les villes délinquantes qui refusent d'appliquer la loi SRU, et tant d'autres inégalités encore.

Vous n'avez pas voulu comprendre que, pour être exemplaire, le Grand Paris devait être innovant, ambitieux sur le plan de l'urbanisme, de l'architecture et de l'environnement, nécessairement maîtrisé par la puissance publique.

En définitive, votre projet se résume à un réseau de transport rapide, jalonné de quelques dizaines de gares reliant prioritairement neuf pôles dits stratégiques, les clusters, comme pour mieux faire comprendre que les autres territoires sont de seconde zone. Comme toujours !

Où donc est passé ce grand projet du XXIe siècle ? C'est de la supercherie, car en aucun cas il ne s'agit d'un réel projet d'aménagement. Pour autant, il y a bien un projet politique : l'État veut s'emparer de l'aménagement d'une grande partie de l'Île-de-France, en totale contradiction avec les lois de décentralisation, au détriment des prérogatives dévolues aux instances élues, dans le mépris complet de la citoyenneté.

De ce point de vue, votre Société du Grand Paris est un morceau d'anthologie dans la rubrique du bétonnage politique où l'État s'attribue tous les pouvoirs, jusqu'à missionner un commissaire de la République, afin d'avoir l'assurance d'une ultime censure.

N'allez pas proclamer que la discussion en commission a permis de réaliser des avancées ! Tout cela est faux ! En toutes circonstances, l'État restera majoritaire. Un maire un seul ! participera au conseil de surveillance et les villes seront en définitive dans l'obligation de signer des contrats de développement territorial.

En revanche, ce qui a changé par rapport au texte initial et que vous avez accepté, monsieur le secrétaire d'État, c'est un amendement visant à l'éclatement de la RATP, mesure qui, liée au démantèlement des actifs du STIF introduit dans la loi relative au fret ferroviaire, annonce la privatisation des transports collectifs en Île-de-France. C'est inacceptable, et pas seulement pour les députés franciliens. Accepteriez-vous en effet, mes chers collègues, que l'avenir de Lyon, de Marseille, de Bordeaux, de chacune de nos villes et de nos régions, échappe à la légitimité de nos assemblées élues ?

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Inscription
ou
Connexion