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Intervention de Christian Blanc

Réunion du 24 novembre 2009 à 21h30
Grand paris — Ouverture de la discussion

Christian Blanc, secrétaire d'état chargé du développement de la région capitale :

Il lui donne deux pieds, deux missions – une relative au transport, l'autre à l'aménagement – quand certains préféreraient créer un monstre à une seule jambe et à deux têtes.

Regardons un instant ensemble ce dont il est au juste question, si vous le voulez bien.

En premier lieu, en ce qui concerne les transports, que fera au juste la Société du Grand Paris ?

Dès sa constitution, elle va élaborer un schéma de transport et préparer le dossier de débat public lui correspondant. Elle va écouter les avis exprimés par les citoyens lors de ce débat et prendre en compte les avis demandés à toutes les collectivités territoriales d'Île-de-France. Puis elle va faire évoluer ce schéma pour tenir compte de l'ensemble de ces suggestions et avis. Le tracé définitif et l'emplacement des gares feront alors l'objet d'un décret pris en Conseil d'État.

Passée cette première année, la Société du Grand Paris va s'assurer de la réalisation de ce schéma : elle rédigera les cahiers des charges, lancera les consultations, notifiera les marchés, vérifiera la bonne réalisation des prestations, conduira les procédures administratives.

En second lieu, qu'en est-il en ce qui concerne l'aménagement ?

Beaucoup de fausses idées circulent au sujet de la Société du Grand Paris, comme si le texte examiné aujourd'hui en était resté à sa version primitive, avant la concertation que j'ai menée avec les élus.

Or, je tiens à le rappeler ici, cette concertation, depuis le mois d'août, a été importante et elle m'a amené à faire évoluer sur ce point le projet de loi, en plein accord avec le Premier ministre.

Dans l'exaltation du débat des prochaines élections régionales, j'ai entendu certains manier des chiffres pour le moins surprenants : 37 000 hectares seraient préemptés au profit de la Société du Grand Paris ! Il est curieux de voir les mêmes affirmer que le projet de loi du Grand Paris, rétréci par rapport aux ambitions annoncées le 29 avril dernier par le Président de la République, est ramené à un seul réseau de métro, et que ceci les entraîne à demander – nous le verrons plus tard – la modification de l'intitulé du texte. Alors, mesdames, messieurs les députés, choisissez : mais pas tout et son contraire.

Plutôt que de faire référence à des chiffres obtenus on ne sait comment, regardons ce que dit le texte. À l'article 7, il est écrit que la Société du Grand Paris pourra conduire des opérations d'aménagement là où elle dispose d'un droit de préemption. Et plus loin, à l'article 18, que les contrats de développement territorial définissent les zones d'aménagement différé. On pourrait ajouter qu'ils définissent les bénéficiaires des droits de préemption ainsi institués. Ces bénéficiaires peuvent être la Société du Grand Paris, un établissement d'aménagement, ou encore les communes elles-mêmes.

Concrètement qu'est-ce que cela signifie ? Cela veut dire que la Société du Grand Paris pourra être aménageur là où les communes et l'État auront décidé ensemble, par contrat, des modalités de son intervention.

La compétence d'aménagement de la Société du Grand Paris est donc une compétence encadrée par les termes du contrat qui lie les maires et l'État. Le pouvoir des maires sur les opérations qui les concernent directement s'exerce donc au travers des contrats, qu'ils sont libres de signer ou non.

Enfin, le projet du Grand Paris, porte aussi en son coeur le savoir et l'innovation avec l'élan nouveau que nous voulons donner au territoire de Saclay.

Nous entrons dans un siècle qui sera, plus que les précédents, marqué par la fluidité et la rapidité : fluidité et rapidité des transports, des communications, de l'innovation.

La gageure, pour nos sociétés modernes, est immense : il s'agit de mobiliser toutes nos forces et de libérer toutes nos énergies pour être disponibles et nous adapter constamment. La nouvelle économie de la connaissance signifie, pour nous, être perpétuellement à la pointe de l'innovation dans les technologies nouvelles. Nous devons mener un combat stratégique dans le domaine des TIC, des nanotechnologies, des biotechnologies. Et la clé d'une innovation pleinement efficace est le lien entre la recherche scientifique, la formation universitaire et le monde de l'entreprise. C'est tout l'enjeu des dispositions concernant le territoire de Saclay.

Dans l'histoire de la région capitale et de la France, Saclay occupe une place singulière : au XVIIe siècle, ce territoire, qui compte parmi les terres agricoles les plus riches du pays, a été drainé, au prix d'innovations techniques remarquables pour l'époque, afin d'alimenter Versailles.

Aujourd'hui, Saclay est riche d'un potentiel d'excellence scientifique, universitaire et industriel incomparable, auquel il s'agit de donner plus de dynamisme. Saclay concentre 10 % de la recherche publique française, soit 17 000 chercheurs, 10 % de la recherche-développement privée française, soit 20 000 personnes, et plus de 47 000 étudiants, en sciences dures, mais aussi en médecine, en droit, en management. Ce ne sont pas des chiffres, ce sont des talents et des espoirs. Nous avons le devoir de leur donner les meilleures conditions de vie et de travail, parce qu'ils sont, avec beaucoup d'autres, l'avenir de la France.

Nous devons y attirer encore plus de nouveaux talents : nous y construirons le campus du XXIe siècle, qui sera moderne, écologique et humain. Il constituera l'articulation vivante du monde académique avec le monde économique. Nous y favoriserons l'implantation de davantage de jeunes entreprises innovantes.

Pour autant, la concentration des talents dans chaque domaine ne suffit pas : encore faut-il que le territoire où ils vivent et travaillent soit favorable à leur travail en commun. Les institutions et les entreprises doivent y être en synergie entre elles, et avec le reste du territoire régional, national et international.

C'est d'ailleurs pour partie déjà le cas. En matière de nanotechnologies, Saclay est articulé avec les autres centres du réseau Nano-INNOV de Toulouse et de Grenoble ; le futur regroupement des sites franciliens d'AgroParisTech sera un moteur mondialement visible, en réseau avec les pôles régionaux. En informatique, l'INRIA collabore déjà avec Grenoble et Rennes.

Les travaux du Prix Nobel 2007, le professeur Albert Fert, et de ses équipes à l'université Paris-Sud, au sein de l'unité mixte de recherche CNRS-Thales, ou ceux des équipes du professeur Patrick Couvreur en matière de nano-médicaments, sont deux exemples des collaborations internationales qui donnent un rayonnement mondial aux établissements du plateau de Saclay. Ces collaborations et ces complémentarités sortiront renforcées du projet du Grand Paris.

Le projet de loi réaffirme aussi la protection de l'activité agricole, des espaces naturels, agricoles et forestiers, ainsi que la pérennité du patrimoine hydraulique de ce territoire exceptionnel.

Là encore, il nous faut une structure adéquate pour piloter, à sa juste mesure et avec une pleine efficacité, ce projet essentiel d'intérêt national : ce sera l'établissement public scientifique et technologique de Paris-Saclay.

Pour signifier toute son ambition, son conseil d'administration sera composé de représentants de l'État, d'élus représentants des collectivités locales, de personnalités du monde académique, scientifique, et du monde de l'entreprise. Il sera secondé d'un comité consultatif formé de personnalités représentatives du mouvement associatif, des organisations professionnelles agricoles, des chambres consulaires, des organisations syndicales, ainsi que des associations agréées dans le domaine de l'environnement.

Oui, décidément, Saclay est emblématique de l'alliance de la technologie et de la richesse agricole, forestière et paysagère, du passé, du présent et de l'avenir de la région capitale. Et il montre que, sous des visages très divers, en imaginant cette ville-monde, ce moteur de croissance, cette capitale du XXIe siècle, c'est l'histoire de notre pays que nous continuons à écrire.

Monsieur le président, mesdames, messieurs les députés, depuis Shanghai ou Los Angeles, aux yeux des étrangers, la question du Grand Paris ne se pose déjà plus. Ils sont en avance sur la réalité, comme le sont les idées qui transforment le monde. Regardons notre pays avec leurs yeux, car leur regard est celui du monde en marche.

Un jour sans doute, la question de la gouvernance du Grand Paris sera à l'ordre du jour : nous n'en sommes pas là. Nous avons aujourd'hui entre les mains les moyens de réaliser une ville-monde compétitive et attractive qui soit un phare de croissance, d'innovation et de création artistique et intellectuelle au XXIe siècle.

Notre défi est celui de l'ambition et de la confiance. Je sais qu'il est plus facile de réaliser de vastes projets de développement urbain en temps de prospérité et d'expansion économique. Les projets colossaux et volontaristes du Grand Shanghai ou de São Paulo, auxquels participent nos meilleurs architectes, nous le rappellent. Toutefois, nous avons le devoir d'entreprendre, en regardant au-delà de la crise actuelle. C'est de l'avenir de notre pays que nous parlons aujourd'hui.

En lançant le Grand Paris, le Président de la République a rappelé, le 29 avril dernier : « Le Grand Paris, c'est un projet qui ne peut réussir que s'il est partagé par tous ».

Monsieur le président, mesdames, messieurs les députés, je vous propose de saisir aujourd'hui l'élan créé par ce projet historique et d'apposer ensemble notre signature à son acte de naissance. (Applaudissements sur les bancs des groupes UMP et NC.)

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