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Intervention de Guy Geoffroy

Réunion du 24 novembre 2009 à 15h00
Application de l'article 61-1 de la constitution — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaGuy Geoffroy :

Monsieur le président, madame la ministre d'État, mes chers collègues, le groupe UMP se réjouit que, dans un délai relativement bref, ce texte revienne dans cet hémicycle après avoir fait l'objet d'un travail que nous jugeons globalement tout à fait positif de la part de nos collègues sénateurs.

La question que nous appelons aujourd'hui prioritaire de constitutionnalité, que nous nommions, au tout début de nos réflexions, l'exception d'inconstitutionnalité, est essentielle, vous l'avez rappelé, madame la ministre d'État, et nous devons, au moment du vote définitif, bien en mesurer la portée.

De quoi s'agit-il ? Lorsque, au cours d'un procès ou même de l'instruction d'un procès, un justiciable estimera que la loi qui va lui être appliquée n'est pas conforme aux droits et libertés garantis par la Constitution, il pourra, grâce à la procédure mise en place, le faire valoir auprès du Conseil constitutionnel.

Le corpus législatif couvert est très vaste, puisque, a priori, toutes les lois sont concernées, sauf bien sûr – mais elles ne sont pas en vigueur –, les lois qui ont été annulées au préalable en tout ou partie par le Conseil constitutionnel. À l'arrivée, si le Conseil constitutionnel donne droit à la personne qui a soulevé cette question prioritaire de constitutionnalité, le texte législatif en question sera purement et simplement sorti du champ des lois applicables, de la même manière qu'un texte n'est pas applicable et est présumé non conforme à la Constitution lorsqu'il est soumis, par des parlementaires ou par le Président de la République, à l'examen du Conseil constitutionnel. Nos concitoyens ne manqueront pas, sans doute, d'accorder à ce texte toute l'importance qu'il mérite pour la défense de leurs droits et libertés.

Pour donner ces droits nouveaux à nos concitoyens, le projet de loi initial du Gouvernement était de très bonne qualité. À partir de ce texte, nous avons pu nous livrer à une analyse fouillée, consensuelle, positive, qui a débouché, grâce aux améliorations apportées par notre assemblée, à un document sur lequel le Sénat ne pouvait, et nous en sommes satisfaits, que confirmer la ligne qui avait été fixée, pour aboutir au texte qui nous est aujourd'hui soumis.

Je voudrais rapidement rappeler les modifications que nous avions souhaité apporter et celles que le Sénat a introduites à son tour, en mettant en exergue le point sur lequel députés et sénateurs n'étaient pas d'accord, qui concerne les délais d'examen de la demande présentée en première instance par le justiciable.

Nous avions tout d'abord décidé, j'en parle au passé fort heureusement, que la question de la constitutionnalité deviendrait une question prioritaire, traduisant ainsi la primauté du constitutionnel sur le conventionnel. À l'heure où se développent les droits associés aux droits nationaux, avec parfois des droits qu'il nous faut ensuite inscrire dans notre droit national, il est important de réaffirmer que notre Constitution, le socle de tout ce qui fonde nos valeurs communes, a la primauté sur tous les autres textes.

La deuxième amélioration que nous avions apportée concernait le champ d'application. En retenant la formule « applicable au litige » plutôt que « qui commande l'issue du litige », nous avons voulu donner à ces nouvelles dispositions toutes les possibilités d'être retenues et proposées par le justiciable.

Ensuite, nous avons traité la question des délais. L'amendement de nos collègues socialistes a constitué un pas en avant important. Il fallait que la décision du juge saisi en première instance soit prise sans délai. Nous avions souhaité que ce délai ne soit pas laissé à la seule appréciation du juge, au risque d'être extrêmement long, et nous avions souhaité fixer les deux notions de « sans délai » et de « deux mois maximum » sachant que, si ce délai n'était pas respecté, le justiciable aurait la possibilité, ce n'est pas automatique, de transmettre lui-même à l'échelon supérieur, c'est-à-dire soit au Conseil d'État, soit à la Cour de cassation.

Pour le Conseil d'État et la Cour de cassation, nous avons proposé et décidé que le délai soit fixé à trois mois et que si ce délai n'était pas respecté, la transmission soit automatique.

La quatrième amélioration a été de considérer que les lois du pays de Nouvelle-Calédonie entreraient dans le cadre d'application de ces dispositions.

Une autre modification, dont les conséquences ne seront probablement pas mineures, a été de prévoir qu'en cas d'extinction de l'instance qui a permis de soulever la question prioritaire de constitutionnalité, si cette question est déjà parvenue devant le Conseil constitutionnel, celui-ci aurait à en juger, parce qu'il aurait été saisi après toutes les étapes de la procédure et qu'il lui reviendrait de prendre toutes les dispositions qui s'imposent.

Le Sénat a maintenu cette ligne. Il a modifié une disposition qui nous paraissait importante, et notre rapporteur a rappelé les raisons qui font que, après une nouvelle analyse de la part de la commission des lois de l'Assemblée nationale, nous pouvons nous en remettre à la sagesse de la Haute assemblée. Le Sénat a souhaité que l'on n'enfermât pas de manière trop rigoureuse ce premier délai de première instance et que nous en restions à la formule, proposée par Jean-Jacques Urvoas et nos collègues du groupe socialiste, du « sans délai ». Ce sera donc probablement la formule qui sera retenue dans le texte définitif.

Le Sénat a ensuite ajouté quelques nouvelles améliorations, qui méritent d'être soulignées.

Tout d'abord, l'obligation de motivation de la part des juges qui auront, au premier ou au second stade, soit à transmettre, soit à ne pas transmettre. Cette précision me semble très intéressante.

Ensuite, nos collègues sénateurs ont jugé, fort opportunément, que toute instance devant les juridictions financières entrerait également dans le cadre d'application de ces nouvelles dispositions constitutionnelles.

Au final, ce texte peut tout à fait donner satisfaction, sans qu'aucune des assemblées n'ait le sentiment de n'avoir pas été écoutée par l'autre ou de n'avoir pas été écoutée par le Gouvernement.

Nous avons fait du bon travail, ici même, avec vous, madame la ministre d'État, et avec nos collègues sénateurs. Le texte définitif qui sera adopté bientôt, je l'espère, apportera à nos concitoyens ce que le constituant a souhaité, à savoir un droit nouveau, moderne, puissant, un droit dont les conséquences ne seront pas négligeables, un droit qui donnera à notre démocratie encore plus d'éléments affirmant la prise en compte du citoyen.

Cette question prioritaire de constitutionnalité étant parvenue au terme de son examen par les deux assemblées, et en parfait accord avec le Gouvernement, le groupe UMP, sans aucune surprise mais avec une totale détermination, votera le texte en l'état, dans la rédaction qui nous a été transmise par nos collègues sénateurs. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

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