Découvrez vos députés de la 14ème législature !

Intervention de André Vallini

Réunion du 17 novembre 2009 à 21h30
Réduction du risque de récidive criminelle — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaAndré Vallini :

Madame la présidente, madame la ministre d'État, mes chers collègues, nous sommes tous d'accord ici : il est hors de question de relâcher dans la nature des gens considérés comme dangereux, même si la notion de dangerosité est bien difficile à cerner. Mais au lieu d'attendre la fin de leur peine pour se demander s'ils sont encore dangereux, c'est pendant leur peine qu'il faut faire en sorte qu'ils ne le soient plus quand ils sortiront. Et s'il faut parfois les surveiller après leur sortie, il faut d'abord, à l'évidence, les soigner avant leur sortie.

À cet égard, le cas Évrard est révélateur.Dominique Raimbourg a rappelé le film tragique qui a conduit au viol du petit Enis. Je ne reviendrai sur les dysfonctionnements que mon collègue a rappelés, mais le cas Évrard est à lui seul un résumé tragique de la problématique de la récidive, notamment sexuelle : une surpopulation carcérale qui empêche toute politique de réinsertion ; un manque d'éducateurs, de travailleurs sociaux et de psychiatres dans les prisons ; un manque encore plus cruel de juges d'application des peines et une sous-utilisation de mesures pourtant efficaces, tel le suivi socio-judiciaire avec injonction de soins créé par la loi de 1998.

La commission de suivi de la récidive a écrit dans un rapport récent : « En raison de la pénurie de personnels soignants en détention, de nombreux condamnés sollicitent des soins mais ne peuvent pas être reçus par des soignants débordés. Que dire à ces condamnés auxquels on enjoint de suivre des soins sans leur permettre d'y accéder ? ».

Au 1er janvier 2009, 3 000 agents d'insertion et de probation devaient suivre 61 300 détenus et 160 000 personnes soumises à une obligation de justice en milieu ouvert. Un rapport de Jean-Luc Warsmann concluait, en 2003 – il n'était pas encore président de la commission des lois –, que pour que leur travail soit efficace, 3 000 conseillers d'insertion et de probation supplémentaires devraient être recrutés. Combien l'ont été depuis ce rapport ? À peine la moitié.

Jean-Jacques Urvoas, dans un exposé brillant, nous a décrit les deux écoles de pensée, quasi philosophiques, s'agissant de la peine. Elles remontent au XIXe siècle, mais sont toujours d'actualité. À l'instar de Jean-Jacques Urvoas, je dirai que deux écoles s'opposent sur le sujet de la récidive. L'une défend l'idée que la justice doit bien sûr punir et aussi sévèrement que nécessaire, mais qu'elle doit aussi essayer de guérir, et donc qu'elle doit soigner le mieux possible et tout au long de la détention. L'autre estime que la justice doit d'abord éliminer les individus réputés dangereux, qu'elle doit donc les enfermer le plus longtemps possible, en tentant même de le faire une fois la peine purgée.

Or si aucune de ces deux logiques ne garantit le risque zéro de récidive, la première essaie au moins d'y parvenir, alors que la seconde semble y renoncer par avance.

Mes chers collègues, nous avons tous le même souci, je devrais dire le même devoir : lutter contre la récidive, notamment la récidive de délits et crimes sexuels sur laquelle j'ai centré mon propos. Nous devrions donc récuser les postures trop commodes qui consistent à distinguer d'un côté ceux qui défendraient les victimes – Mme Barèges se place dans ce camp – et de l'autre ceux qui défendraient les principes. Pour notre part, nous sommes fiers de défendre des principes !

Loin de ce clivage vraiment absurde, monsieur Nicolin, nous devrions commencer par mesurer ensemble les effets des nombreux textes adoptés depuis quelques années. Il nous apparaîtrait vite que c'est non pas de lois que nous manquons, mais des moyens de faire appliquer celles qui existent. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Inscription
ou
Connexion