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Intervention de Jean-Pierre Brard

Réunion du 17 novembre 2009 à 15h00
Projet de loi de finances pour 2010 — Explications de vote

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaJean-Pierre Brard :

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, à peine un an après le début de la crise financière, et au moment même où les prévisionnistes les plus optimistes, ou les plus naïfs, nous disent déceler les premiers signes timides d'une hypothétique reprise ; au moment même où la dette de l'État atteint un niveau record – comme le soulignait, à juste titre, Charles de Courson, il y a un instant –, le Gouvernement veut nous imposer un budget par lequel il s'obstine à poursuivre dans la voie de l'injustice fiscale.

Il faut toute l'adoration que ressent Jérôme Chartier envers le Gouvernement pour trouver des mérites à ce budget. En l'entendant, j'hésitais à le comparer à La Fontaine ou à La Rochefoucauld pour son côté moraliste, mais ses propos me font plutôt penser à Pierre Dac : pour résumer sa pensée, c'est moins grave que si cela avait été pire. (Sourires.) C'est un peu la philosophie gouvernementale.

Monsieur le ministre, en supprimant la taxe professionnelle, vous vous livrez cette année à une attaque en règle contre les communes, les départements et les régions. En supprimant la taxe professionnelle, vous privez la collectivité nationale de près de 6 milliards d'euros par an. Le projet de loi de finances pour 2010 est tout simplement celui de l'étranglement financier des collectivités territoriales. La taxe professionnelle représente en effet aujourd'hui 41 % des recettes fiscales des communes, 44 % de celles des départements et 64 % de celles des régions.

Or le Gouvernement n'est pas sans savoir que ces collectivités réalisent 73 % de l'investissement public, et que la taxe professionnelle finance près d'un quart des écoles, des crèches et des équipements sportifs. Le Gouvernement sait également que les collectivités locales emploient 1 700 000 personnes.

Pourquoi alors vous obstinez-vous, monsieur le ministre, à vouloir priver nos collectivités des moyens qui leur permettraient, tant bien que mal, d'assurer un minimum de solidarité, et donc de cohésion sociale, dans notre pays ? Je crains qu'au clientélisme en faveur des plus riches s'ajoute ici la croyance aveugle dans un dogme libéral qui voit dans l'impôt, quelle que soit l'utilité qu'il puisse objectivement avoir, une sorte d'essence du mal, comme aurait dit Mme Thatcher.

Dans votre déni de la réalité, vous allez même jusqu'à refuser, contre l'avis de votre propre majorité, l'instauration d'une surtaxe de 10 % sur les bénéfices des banques, dont tout le monde sait qu'elles réalisent à nouveau des profits considérables.

Alors que la crise aurait dû vous permettre de sortir de vos ornières idéologiques, vous vous obstinez à proposer un budget qui s'avère particulièrement irresponsable dans le contexte actuel.

Irresponsable, il l'est, à dire vrai, à plus d'un titre. Ainsi, au-delà des déclarations d'intention et de l'inflation communicationnelle dont le Président de la République détient le secret, le Gouvernement n'a toujours pas pris ses responsabilités en matière d'urgence climatique. Je pense, évidemment, à la contribution climat-énergie dite « taxe carbone », au sujet de laquelle le Président de la République avait déclaré que la France devait « montrer l'exemple ».

La réalité, vous la connaissez bien mes chers collègues : ce n'est pas seulement que la France a plus de vingt ans de retard par rapport à des pays comme la Suède, c'est que cette nouvelle taxe est une supercherie, aussi inefficace que socialement injuste. Les Espagnols, par exemple, n'ont pas attendu pour couvrir, le 8 novembre dernier, plus de 50 % de leur consommation électrique grâce aux énergies renouvelables.

On le voit, qu'il s'agisse de la fiscalité locale ou de la fiscalité dite écologique, votre projet de budget est dangereux.

En matière d'injustice fiscale, que dire de votre obstination à vouloir maintenir le bouclier fiscal en exonérant ainsi les plus aisés de nos concitoyens de l'effort de solidarité nationale ? Que dire de votre obstination à vouloir étrangler les services publics avec un total de 33 749 postes supprimés dans la fonction publique pour la seule année 2010 ?

Alors que sa majesté impériale avait déclaré à Toulon, en septembre 2008, que « nous ne pouvons plus attendre pour investir dans la formation et dans la recherche », le budget pour 2010 prévoit la suppression de 16 000 postes dans l'éducation nationale.

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