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Intervention de Roland Muzeau

Réunion du 3 novembre 2009 à 15h00
Projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2010 — Explications de vote

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaRoland Muzeau :

Monsieur le président, madame la ministre, monsieur le ministre, ce budget d'ambition modeste, disiez-vous, se caractérise en réalité par un record : le déficit annoncé atteint 31,5 milliards d'euros. Face à cette situation inédite, loin de choisir la responsabilité, le Gouvernement fait une fois de plus preuve d'imprévoyance, d'inefficacité et d'injustice.

À vous entendre, le déficit de la sécurité sociale serait avant tout conjoncturel, amplifié par la crise, et devrait donc être rapidement résorbé par le retour miraculeux de la croissance en 2011. Si vos hypothèses d'évolution moyenne pour 2010 sont plus réalistes que l'année dernière, vous vous hasardez déjà à envisager pour 2011 une croissance atteignant 2,5 % du PIB et 5 % de la masse salariale, chiffre jamais atteint depuis vingt ans. Cet optimisme irréaliste nous indigne d'autant plus qu'il vous permet de justifier une politique attentiste de la terre brûlée en matière de protection sociale.

Plus grave, votre texte ne comporte aucune réforme de structure. C'est le PLFSS de tous les renoncements. Vous renoncez tout d'abord à trouver de nouvelles recettes, ce qui hypothèque l'avenir de notre système solidaire de protection sociale. L'exemple des exonérations de cotisations sociales patronales accordées par l'État est à cet égard emblématique : elles représentent 31,5 milliards, dont 3 milliards à la seule charge de la Sécurité sociale en 2010 ! Vous n'avez pas jugé bon de retenir la proposition des députés GDR tendant à abaisser le seuil d'exonération de 1,6 à 1,3 SMIC et à en limiter le bénéfice aux entreprises de moins de vingt salariés, mesure qui, selon les calculs de la Cour des comptes, rapporterait sept milliards d'euros.

Vous renoncez ensuite à faire participer l'ensemble des revenus au financement de la protection sociale. Ce choix politique est scandaleux : les plus fortunés de notre pays, protégés par le bouclier fiscal, ne contribuent pas à hauteur de leurs revenus au remboursement de la dette sociale, donc à l'effort demandé à tous les Français au nom de la solidarité nationale.

Vous renoncez également à taxer de manière dissuasive les cigarettiers, comme à mettre à contribution les industries pharmaceutiques à la mesure de leur part de responsabilité dans l'accroissement des déficits. Vous renoncez en outre à encadrer véritablement les retraites chapeau ; à supprimer la niche sociale des restaurateurs ; à encadrer les dépassements d'honoraires des médecins en secteur 2 ; à revaloriser les aides familiales au moment même où les ménages subissent de plein fouet la crise économique.

En revanche, vous persistez dans la voie des déremboursements ; vous augmentez le forfait hospitalier, qu'une forte proportion de patients très modestes ne pourra payer ; vous imposez la fiscalisation des indemnités journalières des salariés victimes d'accidents du travail annoncée par M. Copé. De plus, vous avez remis en cause la majoration de durée d'assurance accordée aux femmes pour le calcul de leur retraite. Rappelons que les pensions de retraite des femmes sont en moyenne inférieures de 38 % à celles des hommes, en raison des discriminations multiples et intolérables dont elles sont victimes sur le marché du travail, en termes de traitement salarial comme de déroulement de carrière. Enfin, vous persistez dans votre politique de déréglementation de l'accueil des enfants par les assistantes maternelles.

Nous ne pouvons que fustiger la pauvreté des dispositions du volet AT-MP de ce PLFSS : le Gouvernement se refuse manifestement à promouvoir la santé au travail, à améliorer l'indemnisation des victimes ou à responsabiliser les chefs d'entreprise. Bien au contraire, il contribue à entretenir l'irresponsabilité des employeurs en matière de prévention des risques au travail.

Peu vous importe qu'au fil des ans s'installe une inégalité d'accès aux soins de plus en plus marquée, assortie d'une dette sociale dont le remboursement des intérêts coûte chaque année plus de sept milliards d'euros de prélèvements sociaux et fiscaux. En réalité, vous avez décidé de remettre en cause notre système solidaire de protection sociale, hérité du programme du Conseil national de la Résistance, et qui permet à chacun, quelles que soient ses ressources et la gravité de son état, de bénéficier de soins de qualité.

Aux antipodes de cette politique, les députés du groupe GDR, communistes, verts, ultramarins et membres du Parti de gauche, considèrent que la bonne santé d'une population constitue, comme son éducation, un atout pour le présent et un investissement pour l'avenir. Les dépenses de santé ne sont pas un boulet, mais une source de richesse humaine et économique.

Face au démantèlement méticuleux et délibéré d'un système auquel nous sommes très attachés, comme l'immense majorité de nos concitoyens, nous voterons donc contre ce texte. (Applaudissements sur les bancs du groupe GDR.)

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