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Intervention de Jean-Michel Lemétayer

Réunion du 8 octobre 2009 à 9h00
Commission des affaires économiques

Jean-Michel Lemétayer, président de la Fédération nationale des syndicats d'exploitants agricoles, FNSEA :

En effet, et c'est pourquoi je reprendrai à titre liminaire quelques arguments que j'ai développés lorsque le ministre en charge de l'agriculture a lancé le débat sur le projet de loi.

Si ce texte doit être débattu au Parlement au début de l'année prochaine, il nous faut d'abord, pour la sérénité des débats, sortir de la situation actuelle car la quasi-totalité des marchés agricoles sont atteints par la crise, ou du moins par une grave dépréciation des cours : fruits et légumes, porc, lait, viande bovine et ovine, viticulture… et jusqu'aux céréales : lorsque le prix descend à 100 euros la tonne, il n'est plus possible d'équilibrer les comptes ; et je ne parle pas des prix qui vont être pratiqués pour le maïs. À cela s'ajoute la sécheresse qui frappe certaines régions. Il s'agit avant tout de problèmes conjoncturels, mais ils doivent trouver des solutions.

En second lieu, nous subissons désormais pleinement les conséquences des réformes successives de la politique agricole commune (PAC). Comment le projet de loi favorisera-t-il l'adaptation de notre agriculture, étant entendu que la situation conjoncturelle que je viens d'évoquer résulte du basculement de cette politique européenne dans un schéma très libéral du « tout-marché » - lequel, selon la commissaire européenne Mme Fischer Boel, a pour seul « filet de sécurité » les aides directes ? La crise laitière est la résultante du maintien du régime des quotas d'un côté, et de l'abaissement du filet de sécurité de l'autre, avec la réduction de 20 à 30 % des prix d'intervention sur le beurre et la poudre de lait, alors que le marché laitier européen est de plus en plus dépendant du marché mondial. L'abandon de la régulation touchera prochainement la viticulture, la suppression des droits de plantation ayant été prévue pour 2015 dans la réforme de l'organisation commune du marché vitivinicole. Bref, les mécanismes de gestion de marché sont progressivement tous abandonnés.

Dans ces conditions, avant de détailler les articles du projet de loi, il faut bien préciser son exposé des motifs. Qu'attendons-nous de ce texte ?

Notre agriculture, on ne le souligne jamais assez, doit trouver sa place dans un marché européen totalement libre. Les distributeurs peuvent acheter en Allemagne ou dans un pays récemment entré dans l'Union, aussi bien qu'en France, les pommes golden qu'ils vont vendre aux consommateurs français. Il faut donc d'abord viser l'équité entre les producteurs sur tout le territoire de l'Union. À cette question s'ajoute celle des importations extra-européennes, qui fera l'objet de nouvelles négociations dans le cadre de l'Organisation mondiale du commerce (OMC).

C'est dans ce contexte général, marqué notamment par l'échéance de 2013 pour la PAC, qu'il faut néanmoins oeuvrer sur le plan législatif pour défendre l'agriculture que nous souhaitons, une agriculture qui réponde tant en quantité qu'en qualité aux attentes des consommateurs. Mais il faut être conscient qu'aujourd'hui, les agriculteurs sur le terrain n'entendent plus ces arguments : ils ont besoin que des décisions soient prises pour régler ses problèmes de court terme, avant de pouvoir s'intéresser aux réformes structurelles. Un seul exemple : lorsque l'on tente aujourd'hui de parler de contractualisation, sur le terrain, on n'y croit pas. Il ne sera pas possible d'être audible sur un texte de loi si l'on n'apporte pas de réponse aux problèmes conjoncturels. Pour bien vous convaincre qu'il ne s'agit pas seulement de la crise laitière, je vous invite à tourner vos regards le 16 octobre vers Avignon, où se rassembleront des producteurs de fruits et légumes et des viticulteurs des régions Languedoc-Roussillon et Provence-Alpes-Côte d'Azur.

En outre, un article de loi ne vaut que par l'application qui en est faite, donc, en premier lieu, par les décrets d'application.

A la FNSEA, nous travaillons sur trois thèmes : la compétitivité des entreprises agricoles, l'organisation économique des filières et la question du foncier. Le ministre a choisi de regrouper les deux premiers sous le chapitre « Compétitivité et revenus » ; le troisième relève de « l'agriculture durable ».

S'il est nécessaire de légiférer de nouveau sur le foncier, c'est que la pression exercée sur notre outil de production par l'urbanisme et par les grands travaux d'infrastructures - les nouvelles lignes à grande vitesse, par exemple - s'accroît. Au-delà de l'obligation de zonage existante, il nous semble indispensable de mettre en place une commission départementale à compétence décisionnelle en matière de gestion du foncier, rassemblant tous les acteurs - notamment agricoles. Il faut davantage associer la profession agricole aux décisions en matière de gestion du foncier, en allant au-delà du rôle actuel des sociétés d'aménagement foncier et d'établissement rural (SAFER) et de l'avis rendu par les chambres d'agriculture.

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