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Intervention de Sylvia Pinel

Réunion du 15 octobre 2009 à 15h00
Résolution sur l'extension du référendum — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaSylvia Pinel :

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, la loi constitutionnelle de modernisation des institutions de la Ve République a institutionnalisé, le 23 juillet 2008, une procédure de référendum dite « d'initiative populaire ».

Avancée démocratique sans précédent depuis le 4 octobre 1958, l'adoption du nouvel article 11 de notre constitution ouvre aux citoyens l'opportunité d'organiser un référendum à l'initiative de leurs représentants avec le soutien des électeurs inscrits sur les listes électorales. Pour autant, dans les faits, force est de constater qu'il n'en est rien. Le recours au référendum, trop longtemps demeuré entre les mains du seul pouvoir exécutif, est resté sous-employé.

À présent, et alors que cette faculté d'initiative référendaire est enfin reconnue au Parlement, elle demeure toujours inapplicable.

Faut-il encore rappeler que le principe de toute souveraineté réside essentiellement dans la nation, et qu'elle appartient au peuple qui l'exerce par ses représentants et par la voie du référendum, pour véritablement mesurer l'urgence à agir ? La Constitution, norme suprême par excellence, ne saurait se résoudre plus longtemps à une vacuité aussi abyssale.

Depuis le 14 septembre dernier et l'adoption de la dernière loi organique sur l'application des dispositions constitutionnelles issue de la réforme, seules les conditions de mise en oeuvre relatives au Défenseur des droits et à l'extension du référendum restent toujours à déterminer.

Aucun projet de loi n'a été déposé pour permettre la mise en oeuvre du troisième alinéa de l'article 11, aucune volonté n'a été affichée en ce sens, et c'est bien le sentiment que nous avons éprouvé en vous écoutant à l'instant, monsieur le ministre.

Les radicaux de gauche déplorent tout autant qu'ils dénoncent cet attentisme préjudiciable à l'heure où, hasard du calendrier, le Gouvernement s'apprête à réformer le statut de La Poste, véritable institution dans la vie de tous les Français.

Plus de 2 millions de nos concitoyens se sont déjà mobilisés lors d'une votation inédite dont le résultat sans appel témoigne, une fois encore, de cet attachement profond de la population et des élus au service public postal qui, au-delà de son rôle économique, génère un lien social indispensable, notamment en milieu rural.

Face à l'enjeu de cette réforme pour l'avenir de nos concitoyens et du service public, pourquoi tant de mépris ?

Avec force, les députés radicaux de gauche appellent donc de leurs voeux l'application de l'article 11 tel que souhaité par la révision constitutionnelle et soutiennent sans réserve la proposition de résolution présentée par le président Ayrault au nom du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.

Fort heureusement, le nouvel article 34-1 de la Constitution est quant à lui applicable. Notre assemblée dispose ainsi d'un nouvel outil pour s'exprimer, que je salue. Permettez-moi d'en user.

Il est grand temps de rendre possible ce qui est nécessaire, à savoir l'extension de l'initiative référendaire aux parlementaires soutenus par les électeurs.

Sur ce point, les conditions d'application de la nouvelle procédure de l'article 11 se révèlent bien imparfaites.

Tout d'abord, la définition du champ référendaire étendu aux « réformes relatives à la politique économique ou sociale de la Nation ou aux services publics qui y concourent » est si imprécise qu'aucun référendum n'a jamais été organisé sous ce chef de compétence. Pourquoi ne pas préciser une procédure exceptionnelle dès lors qu'il est question de réformer en profondeur les services publics, biens communs de la nation ?

Et que penser des seuils retenus pour permettre le recours effectif au référendum ? Un dixième des électeurs inscrits sur les listes électorales, ce n'est pas moins de 4,5 millions de personnes qu'il faut mobiliser, dans des conditions pour le moins incertaines. De plus, il est entendu qu'un tel seuil théorique rend la pratique quasi impossible.

Chez nos voisins européens, la percée démocratique ouverte par cette procédure n'est pas aussi frileuse. En Italie, où le nombre d'habitants est sensiblement identique à celui de notre pays, le seuil est fixé à 500 000 électeurs seulement. Et nul besoin de revenir sur l'exemple de la Suisse pour craindre qu'en l'état, la procédure référendaire d'initiative populaire reste lettre morte. Le seuil fixé à un dixième des électeurs inscrits sur les listes électorales doit donc être révisé à la baisse.

En outre, permettez-moi de douter de l'efficacité d'une procédure qui, initiée par une minorité, soit un cinquième des parlementaires, peut succomber sous le fait majoritaire.

En conséquence, et vous l'aurez compris, monsieur le ministre, l'urgence est déclarée ! Il est impératif qu'un projet de loi organique vienne préciser au plus tôt les conditions de mise en oeuvre de l'article 11 de la Constitution afin d'ouvrir le débat qui, je l'espère, permettra enfin au référendum d'initiative populaire d'exister, et ce dans l'intérêt de notre République. (Applaudissements sur les bancs des groupes SRC et GDR.)

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