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Intervention de François Asensi

Réunion du 14 octobre 2009 à 15h00
Délimitation des circonscriptions des députés — Motion de renvoi en commission

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaFrançois Asensi :

Monsieur le secrétaire d'État, vous avez longuement répondu à M. Le Roux, mais je crois qu'il fallait le faire hier, et vous auriez tout de même dû être plus attentif aux arguments développés à l'instant par M. Lecoq.

Cela étant, je dois reconnaître que vous avez en partie joué le jeu de la transparence en publiant vos travaux, mais je crains que cela ne soit à votre désavantage. Vous mettez en avant la réduction des écarts démographiques qui préexistaient. Mais cette réduction est largement insuffisante, et les travaux que vous avez publiés montrent que certains écarts ont été accrus : les circonscriptions métropolitaines dépassant de 15 % à 20 % les moyennes à l'intérieur des départements étaient au nombre de vingt-huit avant le redécoupage. Elles sont désormais au nombre de trente-sept. Est-ce que vous appelez cela la réduction des inégalités démographiques ? Vous n'avez pas réussi à rééquilibrer. Il y a là manifestement matière à un renvoi en commission pour rebâtir votre texte.

Encore les statistiques que vous publiez ne montrent-elles que la face la plus présentable de votre travail en excluant les circonscriptions d'outre-mer et des Français de l'étranger, où votre bilan est peu reluisant.

La règle législative limitant les écarts par rapport aux moyennes à l'intérieur des départements n'est pas satisfaisante, puisque l'écart maximal de plus ou moins 20 % devrait s'appliquer à la moyenne des circonscriptions sur l'ensemble de la République. Pourquoi, monsieur le secrétaire d'État, ne pas avoir suivi l'avis du Conseil d'État, qui préconisait une égalité stricte entre les circonscriptions, avec des écarts contenus sous la barre des 10 % ?

L'économie générale de ce redécoupage opéré par l'exécutif ne peut exclure le Parlement de son volet technique, car celui-ci en comprend des aspects essentiels.

Ainsi, j'ai cru comprendre au cours des débats d'hier que M. Gaudillère, fin connaisseur de notre histoire électorale, faisait partie de vos lectures. Permettez-moi de rapporter une de ses analyses, publiée dans son Atlas historique des circonscriptions électorales françaises : « Le découpage touche à l'élection, donc à l'un des fondements du pouvoir législatif, et relève à ce titre de la loi. Une application même minimale de la séparation des pouvoirs tolère difficilement l'immixtion du pouvoir exécutif en pareille matière. » Pourtant, vous avez défendu avec ardeur le recours à l'ordonnance en vous appuyant sur une prétendue tradition électorale. Or M. Gaudillère, que je vous invite à relire, rappelle que la majorité des redécoupages se sont faits par voie législative : ce fut ainsi le cas en 1831, en 1875, en 1889, en 1927, en 1985 et en 1986. Sur quels contre-exemples appuyez-vous votre analyse ? Sur les décrets impériaux de Napoléon III en 1852 ? Sur le redécoupage orchestré par l'UNR en 1958, dans le cadre des pouvoirs spéciaux et alors que le Parlement ne siégeait plus et que les généraux félons menaçaient, depuis Alger, la République ?

Par ailleurs, vous vous êtes fait hier le porte-voix de Pierre Joxe en affirmant que le scrutin majoritaire était sans conteste le plus simple à mettre en oeuvre. Vous faites preuve d'une grande modestie car, à la lecture de votre ordonnance, on comprend qu'il vous a fallu déployer beaucoup d'ingéniosité et un grand tact pour découper des circonscriptions sur mesure qui traversent les cantons. Je ne prendrai qu'un exemple, la onzième circonscription des Bouches-du-Rhône, dont voici les limites : « Cantons de : Aix-en-Provence Nord-Est (partie comprenant la portion de territoire de la commune d'Aix-en-Provence délimitée, au nord, par la voie ferrée entre le passage à niveau de la Calade et la limite de la commune de Venelles, à l'est, par la limite de la commune de Venelles, l'autoroute A 51, la route de Sisteron, l'ancienne route des Alpes jusqu'à la limite du canton d'Aix-en-Provence Centre, au sud, par la limite du canton d'Aix-en-Provence Centre, à l'ouest, par la limite du canton d'Aix-en-Provence Sud-Ouest), Aix-en-Provence Sud-Ouest (moins la commune de Meyreuil), Les Pennes-Mirabeau. » Monsieur le secrétaire d'État, ce jour-là, vous aviez dû perdre votre GPS ! (Exclamations sur les bancs du groupe UMP.) Mais quel sens inné de l'orientation vous avez ! Je vous félicite.

Cette invitation au voyage me ramène tout de même au sujet d'aujourd'hui. Voilà pourquoi, en effet, le groupe GDR vous invite, mes chers collègues, à voter la motion de renvoi en commission qu'a excellemment défendue M. Lecoq. (Applaudissements sur les bancs des groupes GDR et SRC.)

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