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Intervention de Gaëtan Gorce

Réunion du 7 octobre 2009 à 15h00
Ouverture à la concurrence des jeux d'argent en ligne — Motion de rejet préalable

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaGaëtan Gorce :

Je suis ravi que vous m'approuviez, mais je doute que vous continuiez à le faire dans quelques minutes.

Si l'on regarde de près l'avis rendu en 2007 par la Commission européenne, qui a mis en branle tout ce processus, c'est moins le monopole qu'elle condamne que la contradiction dans laquelle nous sommes entre le monopole que nous revendiquons et la politique que nous appliquons. Ce qu'elle conteste, ce n'est pas la rigueur de notre législation, c'est votre politique et sa faiblesse : en même temps que nous défendons l'idée d'un monopole public fondé sur une logique d'intérêt général pour réguler les jeux et notamment en limiter l'ampleur, nous encourageons la Française des jeux et le PMU à développer leur chiffre d'affaires, qui croît, et de manière rapide, chaque année.

La Commission européenne nous signale que nous prétendons lutter contre l'addiction, alors même que nous laissons la Française des Jeux développer des jeux comme le Rapido, où l'on peut parier toutes les quinze minutes, bientôt peut-être toutes les cinq minutes. Vous savez, mes chers collègues, car vous êtes bien informés, que le PMU – auquel nous sommes tous attachés – organisait par le passé six courses par jour, alors qu'il en organise aujourd'hui près de quarante-cinq.

Comment pouvons-nous défendre, devant la Commission européenne, l'idée d'un monopole public, comment le Gouvernement et les pouvoirs publics peuvent-ils escompter en retirer d'importantes ressources budgétaires – nous avons bien compris que cet enjeu ne vous était pas indifférent –, s'il ne se conforme pas aux règles qui doivent être celles d'un monopole public : le service public et l'intérêt général ? Tout le problème est là. Vous ne pouvez pas faire l'économie de cette question. Si nous avons été mis en difficulté par l'Europe, c'est pour toutes ces raisons.

Ayant fait justice, si j'ose dire, de la question européenne qui vous place devant vos contradictions, je voudrais aborder l'autre raison que vous évoquez à l'appui de votre texte. Vous prétendez vous conformer au principe de réalité : une concurrence sauvage sévissant sur internet, il vaut mieux, pour ne pas avoir à la subir, la légaliser pour la canaliser. Permettez-moi de faire à ce propos quelques observations. L'attitude du Gouvernement préjuge mal de la fermeté dont vous ferez preuve d'ici à quelques mois pour faire appliquer la nouvelle loi. Car déjà, monsieur le ministre, à votre nez et à votre barbe se déroulent aujourd'hui des pratiques totalement illégales, visibles à l'oeil nu – il suffit d'un clic –, contre lesquelles aucune action n'est entreprise par les pouvoirs publics. J'ai même le sentiment que l'initiative que vous avez prise, au début de la saison de football, par rapport à M. Aulas, ne servait qu'à masquer votre inertie à l'égard de toutes les autres activités. Dois-je vous renvoyer au site de l'OM, à celui de l'OL, à celui du Figaro ? Dois-je citer toutes les publicités que l'on a pu voir depuis des mois pour des jeux en ligne illégaux ? (Applaudissements sur les bancs des groupes SRC et GDR.)

Vous dites qu'il est urgent de protéger le consommateur et le parieur contre l'offre illégale. Mais n'est il pas tout aussi urgent d'appliquer d'ores et déjà la loi, grâce aux moyens qu'elle vous offre, afin que le consommateur soit réellement protégé, fût-ce dans l'attente d'une meilleure législation ? Si vous ne le faites pas, vous ne pouvez prendre prétexte de cette situation pour essayer de nous imposer ce texte. J'allais presque dire que l'arbre de cette initiative avec M. Aulas cache la forêt de votre inertie ou de votre impuissance. (Applaudissements sur les bancs des groupes SRC et GDR.) Et cela, nous ne pouvons l'accepter, tant du point de vue de la législation nationale que du point de vue de l'ordre public.

Au-delà de cette attitude – qui augure mal de la suite –, je voudrais revenir sur la question de fond. La réglementation que vous nous proposez va-t-elle permettre de canaliser véritablement les choses ou sera-elle la porte ouverte à une plus large privatisation, à une libéralisation ? L'année 2010 sera-t-elle celle de la concurrence organisée, maîtrisée, et 2012 – puisqu'il y a une clause de revoyure dans deux ans – celle de la libéralisation généralisée ? C'est ma crainte.

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