Découvrez vos députés de la 14ème législature !

Intervention de Éric Ciotti

Réunion du 15 septembre 2009 à 21h30
Loi pénitentiaire — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaÉric Ciotti :

Je suis, en revanche, plus réservé sur certaines dispositions du second volet de la loi relatives aux aménagements de peine. En effet, comme le soulignait Michel Foucault, il ne faut pas oublier que la prison est une nécessité dans une société où la délinquance est une réalité quotidienne. Elle a, d'une part, un effet neutralisant lorsqu'un condamné est placé en détention – la société est protégée –, et d'autre part un effet dissuasif, la certitude de la sanction constituant un frein majeur à la commission d'infractions.

Or, les profondes modifications apportées par la Haute assemblée à ce projet de loi conduisent à limiter dangereusement les effets salutaires de la sanction. La commission des lois, soutenue par Mme la garde des sceaux, a opportunément atténué certaines dispositions dangereuses introduites par le Sénat, notamment en excluant les récidivistes et les auteurs de faits criminels, de délits de violence ou de faits à caractère sexuel, des dispositions relatives aux aménagements de peine.

J'approuve ces restrictions que j'avais moi-même proposées par amendement. Il en est de même du relèvement à soixante-quinze ans du seuil pour l'octroi de la libération conditionnelle pour cause d'âge ou de la suppression de la notion imprécise de « projet d'insertion ou de réinsertion » à l'article 33, au sujet desquels j'avais déposé des amendements qui ont été adoptés en commission.

Néanmoins, il subsiste dans ce texte des dispositions qui doivent nous inviter à la prudence. Tout d'abord, l'article 32 du projet de loi conduit à faire de la prison une exception en matière de sanction pénale. Alors que l'exemplarité de la sanction doit avoir une valeur essentielle, cet article dispose que la peine d'emprisonnement constitue le « dernier recours » si la gravité de l'infraction et la personnalité de son auteur rendent cette peine nécessaire. Dans ce cas, la peine doit être aménagée sauf « impossibilité matérielle ». Ces dispositions pourraient, si l'on n'y prend garde, bouleverser la nécessaire réparation que l'on doit aux victimes tout en adressant aux délinquants un message risqué de clémence, qui pourrait vite inspirer un sentiment d'impunité.

Par ailleurs, le projet de loi multiplie les recours aux aménagements de peine et leur octroie, désormais, un caractère quasi automatique pour les condamnations à moins de deux ans d'emprisonnement ferme ou pour lesquelles deux ans de prison restent à accomplir. Comment expliquer qu'une peine prononcée publiquement par un juge pénal, par un tribunal, puisse être dénaturée discrètement par un autre magistrat ? Les syndicats de police s'en sont inquiétés. Pour Synergie-Officiers, ce projet de loi pourrait « mettre en péril toute la chaîne de lutte contre la criminalité » et, à terme, avoir « un effet boomerang » sur la délinquance.

Nous sommes certains que vous saurez prévenir ces risques, madame la ministre d'État, car nous connaissons votre détermination et votre courage – si Mme Dumont a évoqué des gardes des sceaux sans idées ni courage, nous connaissons vos idées et votre courage.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Inscription
ou
Connexion