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Intervention de Eudes Riblier

Réunion du 16 juillet 2008 à 17h15
Commission des affaires économiques

Eudes Riblier, président d'Armateurs de France :

, a rappelé, s'agissant des questions portant sur la compétitivité des ports français, que les armateurs sont d'abord des clients et non des opérateurs portuaires – dont les plus grands sont notamment Dubaï Ports World et l'Autorité portuaire de Singapour –, même si certains armateurs, en particulier de porte-conteneurs, sont eux-mêmes devenus des opérateurs portuaires du fait de l'impact des congestions portuaires sur leur activité.

Aussi les armateurs se sont-ils positionnés par rapport à la réforme portuaire plus comme des témoins de ce qu'ils peuvent observer dans les grands ports mondiaux, que comme des opérateurs portuaires. Cette position de témoin ne les empêchera cependant pas d'opter pour la priorité nationale chaque fois qu'ils pourront opérer les navires à Marseille, au Havre, à Dunkerque ou dans d'autres grands ports français, plutôt qu'à Anvers, à Rotterdam, à Hambourg ou ailleurs. De même, les armateurs français sont prêts à réaliser des investissements de superstructure, comme ce fut le cas au Havre, à partir du moment où la capacité d'utilisation des équipements sera sûre et efficace.

Ils sont également prêts à investir aussi bien dans des dispositifs de navette ferroviaire – comme l'a fait le groupe CMA CGM et le président de son directoire, M. Saadé, en raison de la complémentarité qui peut exister entre le transport maritime et le transport ferroviaire – que dans le pré et post-acheminement fluvial, comme c'est le cas avec les navettes qui circulent entre Le Havre, Rouen et Gennevilliers, cela également à partir du moment où la sécurité et l'efficacité des opérations dans les ports français sont raisonnables, ainsi que l'avenir le laisse espérer.

Concernant les autoroutes de la mer, dont on parle, mais que l'on ne voit pas beaucoup, comme le soulignait M. Daniel Paul, il faut remarquer que les navires n'ont pas été financés en tant qu'infrastructure au même titre qu'une voie ferrée ou qu'une route, comme le préconisait dans son rapport le sénateur Henri de Richemont. La liaison maritime Toulon-Civitavecchia peut-elle, en effet, être vraiment considérée comme une autoroute de la mer avec un départ tous les deux jours ? Comment peut-on espérer en effet fidéliser une clientèle de camionneurs, obligée de faire du « juste à temps » ?

C'est à la lumière de ce besoin d'investissements d'infrastructure qu'il convient d'étudier le dossier des autoroutes de la mer, à condition, parallèlement, de lever certaines barrières, notamment en faisant en sorte que les contrôles de sécurité ne soient plus différents selon qu'il s'agit de transport maritime ou routier – un transport de dynamite fait l'objet de mesures de contrôle drastiques sur un navire, mais d'aucun à l'entrée, par exemple, du viaduc de Millau un 15 août.

Pour autant, on ne peut considérer la liaison « Manche-Mer du Nord » comme une autoroute de la mer s'il ne s'agit que de faire du trans-Manche. A contrario, la liaison « Portugal-Norvège » constitue un vrai beau projet d'autoroute de la mer, en évitant à des camions des milliers de kilomètres terrestres, dans l'attente que le ferroviaire puisse éventuellement prendre le relais. Un tel projet suppose cependant des investissements d'infrastructures non seulement extrêmement lourds, mais également multinationaux puisque, à la limite, plus rien de français ne concernerait une telle autoroute de la mer.

En ce qui concerne les problèmes de pollution, il est certain que le transport maritime a longtemps vécu sur un acquis, celui d'être le mode de transport le moins polluant, et qu'il n'a pas compris qu'il devait lui aussi réaliser des efforts en la matière. Aujourd'hui, la prise de conscience s'est faite et le transport maritime est devenu le mode de transport le moins polluant à la tonne kilomètre, sachant cependant qu'il représente 90 % des tonnes kilomètres transportées dans le monde, ce qui tend d'ailleurs à démontrer que ce sujet, comme beaucoup d'autres dans le domaine maritime, ne peut être traité qu'au niveau international. Or, si la France dispose de quelques beaux fleurons, elle n'est en aucune manière en position d'imposer quoi que ce soit à l'ensemble de la communauté armateuriale. Aussi doit-elle s'attacher à toujours privilégier le passage par l'Organisation maritime internationale, car c'est par ce biais que les réglementations doivent être édictées. Tel fut le cas en matière de pollution maritime avec l'utilisation de carburants à teneur en soufre de 0,1 % et non plus de 3,5 %, ou encore avec l'obligation, pour l'alimentation externe des navires, de se brancher dans les ports sur le courant de terre. La réglementation internationale évolue donc, et la France, qui en a été souvent à l'origine, doit s'appuyer sur sa crédibilité en la matière pour faire en sorte que toute réglementation maritime passe par l'OMI.

Concernant les consommations globales de combustibles liées au transport maritime, il sera extrêmement difficile, à l'horizon 2020, de diviser par deux les émissions de CO2. En revanche, les évolutions réglementaires pourront conduire, même avec le doublement du transport maritime international, à diviser par plus de deux les émissions de soufre et de particules métalliques.

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