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Intervention de Patrick Lozès

Réunion du 16 septembre 2008 à 15h00
Mission d’information sur les questions mémorielles

Patrick Lozès :

Les mots qui ne sont pas fixés trahissent souvent des réalités qui ne sont pas fixées. Si le communautarisme existe dans notre pays, il est aujourd'hui très minoritaire. Dans leur grande majorité, les groupes qui s'expriment dans le débat public demandent la justice sociale et l'égalité. Pouvoir vivre dans les mêmes immeubles ou travailler dans les mêmes entreprises que les autres citoyens, ce n'est pas du communautarisme, c'est une demande de reconnaissance.

Je ne voudrais pas, lorsque l'on parle des brûlures de l'histoire, que l'on oublie la traite « négrière ». Les Antillais ne viennent pas de la lune : ils sont bien le produit d'une histoire, celle de la traite.

Si les Noirs n'existent pas scientifiquement, ils restent aujourd'hui en France un groupe social visible qui est victime de la discrimination. Le conseil représentatif des associations noires de France, que j'ai l'honneur de présider, a été créé ici même, dans une salle de l'Assemblée nationale – et il ne pouvait en être autrement puisque nous plaçons notre action dans une perspective républicaine. Lorsque l'on me demande ce qu'est une « association noire », j'ai coutume de répondre qu'il s'agit d'une association qui est sensible aux discriminations dont les populations noires peuvent être victimes : cela concerne donc tout le monde.

J'évite le mot de « communauté » car j'ignore ce que pourrait être la communauté noire. À mes yeux, une communauté suppose une origine commune, une culture partagée, une identité. Je ne vois pas plus ce que pourrait être la communauté blanche…

La concurrence des mémoires constitue un risque qu'il convient d'analyser avec sérénité. Il est en effet inacceptable, dans notre République, que se développe une concurrence des mémoires ou des victimes. Mais nous ne devons pas nous méprendre sur la signification des demandes qui s'expriment çà et là. Les groupes en question se feront de plus en plus entendre tant que leurs demandes seront traitées par le mépris et balayées d'un revers de la main. Nous prendrons alors le risque de laisser la place à des groupes de plus en plus radicaux qui, eux, se feront entendre si les demandes pacifiques et républicaines ne sont pas entendues.

Il est heureux que l'Assemblée se saisisse de la question de savoir jusqu'où pourrait aller la concurrence des mémoires. Le rôle des représentants du peuple ne saurait se limiter à attendre que l'on frôle la guerre civile, que les bien publics soient endommagés ou que la nation soit mise en danger pour jeter un oeil sur ce que j'ai appelé « les brûlures de l'histoire ».

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