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Intervention de Valérie Pecresse

Réunion du 30 octobre 2008 à 9h30
Commission des affaires économiques

Valérie Pecresse, ministre de l'enseignement supérieur et de la recherche :

Le budget que je présente est à la fois ambitieux et courageux ; c'est celui des engagements tenus. En dédiant 1,8 milliard d'euros à notre système d'enseignement supérieur et de recherche, en 2009 comme en 2008, le Président de la République respecte en effet l'engagement pris devant les Français pendant la campagne présidentielle : faire de la connaissance le pilier de la croissance et du développement du pays. C'est plus que jamais une nécessité, compte tenu des turbulences financières et peut-être économiques que nous allons traverser. La recherche, l'innovation et la formation sont autant d'armes anticrise, car elles préparent les emplois de demain.

Les moyens budgétaires et fiscaux du ministère vont progresser de 6,5 % en 2009 et de presque 18 % sur la période 2009-2011.

Sur les moyens strictement budgétaires, je tiens à être très précise : si l'augmentation des crédits de paiement entre 2008 et 2009 est de 758 millions d'euros, il faut y ajouter les économies que nous allons réaliser sur les aides aux grandes entreprises, soit 122 millions d'euros d'aides directes recyclées au bénéfice de la recherche publique. Nous avons en effet décidé de supprimer toute une série de subventions au profit du crédit d'impôt recherche, l'instrument le plus performant en matière de soutien à la recherche en entreprise. De la même façon, une réduction de la dépense en matière d'immobilier permettra de consacrer 84 millions d'euros supplémentaires à l'enseignement supérieur. Les opérations immobilières prévues dans le cadre budgétaire seront donc transférées dans celui de l'opération Campus – beaucoup plus ambitieuse, puisque le Président de la République a décidé d'y affecter 5 milliards d'euros. Au total, l'augmentation, par rapport à 2008, des crédits budgétaires pour la recherche publique et l'enseignement supérieur s'élève en réalité à 964 millions d'euros. Il convenait de le préciser, car ces économies budgétaires de 208 millions, obtenues grâce à la remise en cause de certaines dépenses, a été peu remarquée par les commentateurs, habitués à un budget immuable.

À ces crédits s'ajoutent des moyens destinés à des financements innovants : 170 millions d'euros sont consacrés en 2009 aux partenariats public-privé en faveur de l'immobilier universitaire, tandis que les intérêts de l'opération Campus rapporteront plus de 160 millions d'euros par an.

Les sites universitaires qui n'ont pas été sélectionnés parmi les dix grands pôles retenus dans l'opération Campus, mais dont le projet a retenu l'attention du jury en raison de sa qualité ou de son caractère structurant pour un territoire, seront aidés sur crédits budgétaires par le ministère. C'est l'objet des 170 millions d'euros dédiés aux partenariats public-privé en faveur de l'immobilier universitaire. Sur ce point aussi, nous tenons nos engagements.

Le budget triennal représente un effort inédit en faveur de la recherche et de l'enseignement supérieur, destiné à nourrir une stratégie de moyen terme.

S'agissant de l'enseignement supérieur, cette stratégie se décline en plusieurs thématiques. L'enseignement supérieur bénéficiera d'un milliard d'euros supplémentaire chaque année jusqu'en 2010, ce qui permettra d'abord de lancer un grand chantier destiné à améliorer l'attractivité des carrières. La période 2009-2011, c'est d'abord celle du budget des personnels, avec un effort exceptionnel de 252 millions d'euros consacrés exclusivement à l'amélioration des carrières. S'y ajoutent 750 millions d'euros destinés à financer l'augmentation du point d'indice décidée dans le cadre des négociations au sein de la fonction publique. Ce plan permettra de rendre les carrières des chercheurs et enseignants-chercheurs plus attractives à tous les niveaux, qu'il s'agisse du démarrage – augmentation des salaires d'embauche –, des promotions, qui seront accélérées, ou de la fin de carrière, avec l'augmentation des possibilités de promotion à la classe exceptionnelle. L'amélioration concerne également les carrières des personnels administratifs, techniques et de bibliothèque. Par ailleurs, la gestion des ressources humaines sera plus personnalisée, afin de reconnaître davantage ceux qui s'engagent et de récompenser les meilleurs, grâce à des primes d'excellence scientifique ou de qualité pédagogique. Dans une bataille mondiale de l'intelligence, qui se joue beaucoup sur la surenchère salariale entre les pays, notre objectif est de donner à l'ensemble des personnels de la recherche une rémunération et des perspectives de carrière attractives.

Le deuxième axe de notre action est l'autonomie : nous voulons donner aux universités les moyens de devenir autonomes et de rénover leurs formations. Vingt universités, soit un quart des établissements, franchiront le pas dès le 1er janvier 2009. Nous nous attendions à ce que ces universités pionnières soient moins nombreuses : l'ampleur du mouvement – d'autant que quarante-cinq demandes ont d'ores et déjà été déposées pour 2010 – est telle que le ministère devra accomplir un gros effort d'accompagnement. Le processus comprend un audit réalisé par le ministère de l'enseignement supérieur et par celui des finances, puis des préconisations destinées à combler les lacunes en matière de gestion ; enfin, une dernière validation est effectuée par les mêmes ministères. Au rythme actuel, et même si certaines universités ne se qualifieront sans doute pas, il n'est pas impossible que l'autonomie soit réalisée en trois ans au lieu de cinq. Nous avons donc cherché à anticiper cette évolution, car il serait évidemment très difficile de refuser l'autonomie à une université ayant fourni les efforts nécessaires. C'est pourquoi nous consacrerons aux universités quatre fois plus de moyens supplémentaires dans les trois années à venir que dans les trois années précédentes : un milliard d'euros de moyens nouveaux cumulés iront directement sur leur budget, hors dépenses de personnels.

Troisième priorité : bâtir les campus universitaires de demain. L'opération Campus consacre ainsi 5 milliards d'euros à dix sites sélectionnés. Par ailleurs, au milliard d'euros mobilisé chaque année sur crédits budgétaires en faveur de l'immobilier universitaire s'ajoutent des moyens dédiés aux partenariats public-privé : à peu près 800 millions d'euros sur trois ans. L'idée est de redessiner totalement le visage de nos universités et laboratoires de recherche – je rappelle que 80 % de la recherche française est effectuée dans des locaux universitaires.

Quatrième chantier, enfin : l'amélioration des conditions de vie et d'études des étudiants. Dans le domaine du logement étudiant, notre priorité, nous voulons nous donner les moyens d'atteindre les objectifs fixés par le rapport Anciaux, soit 7 000 chambres réhabilitées et 5 000 chambres construites. En 2009, nous serons ainsi à même de réhabiliter plus de 6 500 chambres.

Au total, la dépense par étudiant aura augmenté de 1 000 euros depuis 2007, passant de 7 500 à 8 530 euros par an. Nous prévoyons une augmentation de 37 % d'ici à 2011. Cet effort n'est en réalité qu'un rattrapage : il était nécessaire d'atteindre le niveau des pays qui nous entourent et de rétablir un équilibre entre ce que l'État dépense pour un lycéen – soit 10 000 euros par an – et ce qu'il consacre à un étudiant.

En ce qui concerne la recherche, le secteur privé est très fortement soutenu, grâce au triplement du crédit d'impôt recherche décidé l'année dernière. Dans la situation que nous connaissons, il s'agit en effet d'un outil indispensable pour éviter la délocalisation de nos centres de recherche. Dans l'armement, l'aéronautique, les télécommunications, l'automobile, les témoignages se sont multipliés cette année en faveur du dispositif : dans tous les grands groupes, le crédit d'impôt recherche a permis de renoncer à la décision très difficile de délocaliser le centre de recherche en zone dollar. En raison du cours de l'euro, à 1,5 dollar, et de la qualité de la recherche anglo-saxonne, nous n'étions en effet plus compétitifs.

Le CIR est également un facteur clé de l'attractivité de notre pays pour les investissements étrangers : il fait de la France l'un des environnements fiscaux les plus favorables d'Europe en matière de localisation des centres de recherche. Nous avons ainsi vu revenir des entreprises qui avaient quitté le territoire depuis longtemps, telles IBM ou Microsoft. Il est enfin un accélérateur de croissance pour les PME innovantes. Sa créance devrait donc passer de 1,6 milliard en 2006 à 3,5 milliards d'euros en 2008. En 2009, la dépense fiscale supplémentaire sera de 620 millions d'euros. Cette montée en puissance était nécessaire, car comme l'a montré une étude réalisée dans tous les pays d'Europe, ce ne sont pas les subventions directes, mais les crédits d'impôts qui favorisent le plus l'innovation. C'est pourquoi nous avons réorienté les aides et réévalué tous les dispositifs budgétaires de soutien à la recherche privée, qu'il s'agisse des contrats de l'ANR avec les entreprises, des dispositifs d'intervention pour la recherche industrielle ou des aides à l'aéronautique. Avec le CIR, nous disposons d'un instrument fiscal adapté à la recherche privée. Je rappelle que cette politique nous permet de récupérer 122 millions d'euros de marges de manoeuvre supplémentaires, que nous injectons dans le soutien à la recherche publique.

Au total, 55 % des moyens nouveaux sont orientés vers la recherche privée et 45 % vers la recherche publique. Avec 0,8 % de la richesse nationale mobilisée en faveur de celle-ci, nous atteignons presque l'objectif de 1 % fixé à Lisbonne. En revanche, la recherche privée n'est qu'à 1,25 % au lieu des 2 % attendus. C'est donc sur l'innovation et la recherche privée que notre effort doit porter massivement.

Pour la recherche publique, nous consacrerons, en 2009, 365 millions d'euros de crédits budgétaires supplémentaires. Cette augmentation substantielle permettra d'accompagner les organismes de recherche dans leur réforme, de valoriser leurs performances, de mettre l'accent sur les priorités nationales, d'honorer les contrats que l'État a signés avec eux et de financer l'augmentation des moyens dédiés à leurs personnels. En 2009, les moyens des organismes de recherche augmenteront ainsi de 3,8 %.

Cela permettra aussi de financer les très grandes infrastructures de recherche – GENCI, SPIRAL 2, ITER, XFEL – et d'augmenter le financement sur projet. Le budget de l'ANR augmente ainsi de 45 millions d'euros en 2009. J'ai par ailleurs souhaité que la part de ses financements non thématiques – c'est-à-dire totalement libres, uniquement fondés sur la créativité et l'excellence – soit augmentée de 25 %. En effet, nous avions senti l'année dernière une plus forte tension sur ces projets « blancs » que sur les projets thématiques : le taux de sélection était d'un pour cinq dans le premier cas, d'un pour quatre dans le second. Ainsi, 35 % des financements sur projet seront consacrés aux programmes « blancs ».

En conclusion, ce budget renforce à la fois notre outil de recherche et notre outil universitaire.

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