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Intervention de Taïb Fassi-Fihri

Réunion du 8 juillet 2009 à 11h15
Commission des affaires étrangères

Taïb Fassi-Fihri, ministre des affaires étrangères et de la coopération du Royaume du Maroc :

…car on ne peut traiter ce dossier que de manière globale. Le Front Polisario n'a jamais existé pendant la période coloniale, et aucun « Mouvement de libération du Sahara » ne s'est manifesté pendant toute la période espagnole, la seule et unique revendication émanait du Maroc. La présence espagnole à Tanger a pris fin en 1956, Tarfaya a été rétrocédée au Maroc en 1958 et Sidi Ifni en 1969 puis, pour des raisons stratégiques évidentes, le général Franco a retardé la libération du Sahara, ce qui a permis la naissance du Front Polisario, dont on sait par qui il a été lancé – des personnes qui sont aujourd'hui sur un autre territoire. Actuellement, l'Algérie maintient ses frontières avec le Maroc fermées à cause de ce différend. Permettez-moi de dire que je vois mal la relation entre le droit à la liberté de circulation et une affaire qui est censée ne pas concerner l'Algérie. Le dossier est si complexe que même le Conseil de sécurité des Nations unies n'est pas parvenu à nous aider à le résoudre. Depuis ces dernières années, le Conseil de sécurité a clairement tracé le cadre de la solution politique et le Maroc a déployé des efforts pour y parvenir. Nous considérons que la stabilité régionale peut être atteinte sur la base de notre initiative. Si la volonté politique existe, nous parviendrons à une solution raisonnable.

Vous avez parlé, Monsieur Lecoq, de « l'exploitation des ressources » du Sahara. Allons donc ! L'effort de solidarité nationale en faveur de ce territoire est infiniment supérieur aux ressources locales, comme certains de vos collègues qui se sont rendus sur place peuvent en témoigner.

Vous m'avez interrogé sur les relations entre le Maroc et l'Algérie. Je le répète, le Maroc est désireux de construire son avenir dans un Maghreb uni. Cela étant, nous éprouvons beaucoup de difficultés à mener ce projet à terme avec un pays qui ferme nos frontières communes et qui refuse nos invitations à discuter, qu'il s'agisse de questions économiques, culturelles ou sécuritaires. Nous considérons que chacun est libre de défendre ses thèses devant la communauté internationale, mais que cela n'autorise pas à prendre des populations en otage. Les circonstances ont changé : personne n'a plus intérêt à un Maghreb divisé ; tout le monde souhaite qu'il s'unisse. Le Maroc est tout disposé à contribuer à cette édification, quitte à laisser aux Nations unies le soin de régler le dossier du Sahara. On ne peut que déplorer qu'en dépit de l'extension des pandémies et des guerres sur le continent, l'Union du Maghreb arabe n'ait pu démarrer, mais comment le pourrait-elle avec une frontière fermée entre l'Algérie et le Maroc ?

Si l'Union pour la Méditerranée rend possible la construction d'autoroutes, de lignes à haute tension et de gazoducs, et la mise au point de projets agricoles et agro-industriels, elle contribuera au développement du Maghreb. L'Union pour la Méditerranée a pour premier mérite d'exister, et d'exister en tenant compte des insuffisances du partenariat Euromed puisqu'elle a institué la parité de décision entre pays du Nord et pays du Sud de la Méditerranée qui manquait dans le processus de Barcelone. L'Union pour la Méditerranée n'est pas, pour le Maroc, l'enceinte appropriée au règlement du conflit israélo-arabe ; a contrario l'Union ne doit pas être « prise en otage » par ce conflit. Il faut donc trouver un équilibre propre à assurer la faisabilité d'un projet qui, en soi, peut contribuer à établir la confiance. C'est pourquoi nous devons faire prospérer l'Union pour la Méditerranée, même après le drame de Gaza. Le Maroc s'y emploie.

Il est vrai que les initiatives de coopération bilatérale prolifèrent, mais chacune dans un domaine spécifique. Les relations entre le Maroc et l'OTAN préexistaient à la chute du Mur de Berlin. Depuis la chute du Mur, l'OTAN se préoccupe de nouvelles menaces, provenant pour l'essentiel de l'Est et du Sud musulman. Pour ce qui nous concerne, nous nous investissons en faveur de la stabilité en luttant contre les divers trafics qui transitent par notre territoire.

L'appartenance à la francophonie est un de nos choix fondamentaux. Une volonté assumée s'exprime ainsi. La présence de la Mission laïque française est importante au Maroc, vous l'avez souligné, et l'ambassadeur de France à Rabat pourrait témoigner des incessantes sollicitations dont il est l'objet, visant à trouver une place pour un enfant dans un des établissements d'enseignement de la mission. De fait, l'époque n'est plus où tous les élèves des lycées français au Maroc étaient issus de la classe aisée ; le besoin se généralise. Aussi l'avenir de la langue française au Maroc ne passe-t-il pas seulement par les établissements de la Mission laïque mais aussi par une meilleure prise en charge de l'enseignement du français dans le système éducatif marocain, au côté d'autres langues. Le français véhicule des valeurs que nous partageons ; c'est pourquoi le Maroc est membre de la famille francophone, et il ne saurait être question pour nous de minimiser ou d'oublier la francophonie.

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