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Intervention de Xavier Bertrand

Réunion du 15 avril 2008 à 15h00
Modernisation du marché du travail — Ouverture de la discussion

Xavier Bertrand, ministre du travail, des relations sociales, de la famille et de la solidarité :

Ce projet illustre notre méthode, celle du dialogue social. Tout d'abord, un document – en l'occurrence, il émanait du Premier ministre et était daté de juin 2007 – fixe aux partenaires sociaux un certain nombre d'orientations et un délai, dans le cadre notamment de la loi de modernisation du dialogue social du 31 janvier 2007. Ensuite, les partenaires sociaux négocient ou nous font connaître leurs positions. Lorsqu'ils ont conclu un accord – comme ce fut le cas le 11 janvier –, celui-ci résulte évidemment d'un équilibre et de l'esprit de responsabilité de chacun. Dès lors qu'ils se sont accordés ou qu'ils ont transmis leurs observations, l'élaboration du texte peut débuter.

Ce travail de transposition a été conduit avec eux. Nous avons organisé des réunions multilatérales avec les signataires, ainsi que des réunions bilatérales. Reste qu'une transposition n'est pas forcément simple à exécuter : certaines dispositions demandent à être interprétées, voire précisées, ou complétées, pour être totalement opérationnelles.

Pendant tout le travail d'élaboration du projet de loi, nous avons eu à coeur de rencontrer les signataires à de très nombreuses reprises, de valider avec eux les précisions et les compléments nécessaires et de les soupeser avec précision. Nous avons également rencontré le syndicat qui n'a pas signé. C'est cette méthode, celle d'un dialogue social quotidien, qui donne au texte une légitimité supplémentaire et sans doute une efficacité et une durabilité accrues.

Ce projet de loi permettra de mettre en oeuvre concrètement les avancées considérables introduites par l'accord du 11 janvier, qui façonnent un nouvel équilibre entre flexibilité et sécurité, pour une « flexicurité » à la française. Il apporte tout d'abord des garanties nouvelles aux salariés, en posant un principe essentiel : la forme normale, le droit commun de la relation de travail est le contrat de travail à durée indéterminée. Les représentants du personnel seront désormais informés sur le recours prévisionnel aux contrats de travail à durée déterminée et aux contrats de travail temporaire.

En cas de maladie, l'ancienneté requise pour bénéficier d'une indemnisation complémentaire sera réduite de trois ans à un an. La durée des stages de fin d'études sera comprise dans la période d'essai, jusqu'à réduire celle-ci de moitié. Le montant de l'indemnité de licenciement sera unifié en augmentant celui prévu en cas de licenciement pour motif personnel, et l'ancienneté nécessaire pour percevoir l'indemnité passera de deux ans à un an. Ainsi, un salarié ayant dix ans d'ancienneté devrait désormais percevoir au moins deux mois de salaire en cas de licenciement, contre un mois auparavant pour certains licenciements.

Enfin, ce projet de loi pose le principe selon lequel tout licenciement doit être motivé, et vient clarifier une situation de fait en abrogeant le contrat nouvelles embauches. Désormais, tout salarié dont le contrat de travail est rompu par son employeur connaîtra donc le motif de son licenciement. En effet, l'accord demandait aux pouvoirs publics de prendre les « dispositions nécessaires » – ce sont les termes retenus par les signataires – pour que l'exigence de motivation et de cause réelle et sérieuse en cas de licenciement s'applique à tous les contrats. Je l'ai dit dès lors qu'ont été connus la décision de l'Organisation internationale du travail de novembre 2007 et les arrêts des cours d'appel qui, à la même époque, ont rendu inopérant le CNE. Depuis cette date, tous les CNE sont devenus de fait des CDI comme les autres, puisque la rupture d'un CNE doit toujours être motivée et que l'OIT s'était également prononcée sur la question de la période d'essai.

En définitive, la meilleure sécurisation juridique pour les salariés comme pour les entreprises – je pense en particulier à celles qui ont joué sincèrement le jeu du CNE qui a apporté une réponse à un moment précis – consiste à mettre en cohérence le droit et la réalité dans un souci de pragmatisme afin d'éviter aux entreprises et aux salariés de courir des risques inutiles. Tel était le voeu des signataires de l'accord du 11 janvier 2008. Je pense que nous aurons l'occasion d'y revenir ultérieurement, mais je tenais à souligner ce souci de sécurisation qui répond à l'évolution jurisprudentielle de fin 2007.

Ce projet de loi modernise également les relations individuelles de travail, en offrant des règles plus simples qui s'appuient sur des garanties. Les partenaires sociaux ont voulu mettre en place de nouvelles périodes d'essai interprofessionnelles par catégories, qui seront donc applicables dans toutes les professions et dans tous les secteurs d'activité. Les rares périodes d'essai plus longues que prévoient aujourd'hui les accords de branche resteront applicables, comme le requiert l'accord du 11 janvier 2008. Pour les périodes d'essai plus courtes, le projet de loi ménage une période de transition d'une année avant de les rendre inopérantes. Ce délai permettra aux négociations de branche d'adapter la durée des périodes pour les cas où cela s'avérerait nécessaire.

Le projet de loi permet aussi au contrat de travail ou aux accords collectifs qui seront conclus après l'entrée en vigueur de la loi de fixer des périodes d'essai plus courtes. Ces dispositions clarifient les règles déterminant les périodes d'essai, sans que les durées qui seront désormais possibles soient très différentes de celles actuellement pratiquées.

Le projet de loi rendra également possible la rupture conventionnelle du contrat de travail. Il s'agit là d'une modernisation sans précédent des relations individuelles de travail et d'un changement considérable dans le droit du travail. Cela rejoint d'ailleurs la proposition 145 du rapport de la commission Attali pour la libération de la croissance française. C'est, dans le domaine social, la première concrétisation d'une des préconisations de ce rapport. La modernisation de l'économie souhaitée par les membres de cette commission trouve ici son premier écho concret – qui ne sera pas le dernier, tant nous avons besoin de mettre en oeuvre ce type de préconisations.

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