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Intervention de Patrick Braouezec

Réunion du 26 novembre 2008 à 21h30
Nomination des présidents des sociétés de l'audiovisuel public — Motion de renvoi en commission

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaPatrick Braouezec :

Nous entendons beaucoup de chiffres, disais-je. Ils valsent au gré des discours politiques et perdent leur sens.

Faisons donc acte de méthode et reprenons ceux qui émanent de France Télévisions.

Le budget global 2008, relatif au chiffre d'affaires publicitaire et aux parrainages sur France Télévisions, est estimé à 805 millions d'euros. Avec ce texte, l'enveloppe constituée par les recettes dues aux parrainages et aux produits engendrés par la publicité entre six heures et vingt heures, est estimée à 250 millions d'euros.

Il reste donc environ 550 millions d'euros à trouver pour compenser le manque à gagner. Or, le Président Sarkozy a estimé l'enveloppe de compensation à 450 millions d'euros. Il manque déjà près de 100 millions d'euros ! Les bases de calcul sont dès le départ biaisées.

Mais ces 450 millions d'euros étaient censés émaner des deux taxes créées par ce texte : 375 millions d'euros de la taxe sur les télécoms et les fournisseurs d'accès à Internet et 75 millions d'euros de la taxe sur la publicité des télés. Vous aviez donc tablé sur une enveloppe plus ou moins garantie de 450 millions d'euros, à condition d'ailleurs que ces taxes passent le cap de l'autorisation européenne.

Mais la semaine dernière, en commission spéciale, ces mêmes taxes ont vu leur taux presque divisé par deux. Nous sommes ainsi passés, sans préavis, de 450 millions à 240 – 200 venant d'une taxe et 40 de l'autre.

Le manque à gagner pour France Télévisions sera donc de 300 millions d'euros, alors que vous n'avez eu de cesse, toute l'année durant et encore hier et aujourd'hui ici même, de justifier votre réforme par le sous-financement chronique et inacceptable de l'audiovisuel public. Ces 300 millions d'euros, ce n'est pas moins d'un tiers de son chiffre d'affaires publicitaire qui disparaît en fumée ! Où est la pérennité du financement ? Où est l'équilibre dans ces dispositifs ?

Le comble, c'est que les chaînes publiques seront soumises à cette nouvelle taxe. Vous allez taxer le faible produit publicitaire de France Télévisions pour le réintroduire dans son propre budget, pendant que les prix des créneaux avant vingt heures seront cassés, bradés par TF 1, M 6 et consorts, qui vendent sous forme de pack leur espace publicitaire de soirée et d'après-midi ! Évidemment, en s'attaquant à la publicité après vingt heures, on déstabilise le marché d'avant vingt heures. Je ne vous apprends rien, ce sont les règles élémentaires du capitalisme marchand, que vous vous gardez bien d'observer quand cela vous arrange. De surcroît, ces taxes ne seront pas affectées aux besoins spécifiques de la télévision publique et seront, chaque année, tributaires du contexte politique et budgétaire et de ses aléas.

Au bout du compte, nous sommes très loin… du compte. Il manque toujours, au bas mot, 300 millions d'euros.

Mais ce n'est pas fini, car les chiffres que je viens de donner ne sont que ceux sur lesquels le Gouvernement, la commission présidée par M. Copé et les porte-parole ont bien voulu communiquer et qu'ils ont repris en choeur comme le dernier refrain à la mode. Répéter des données pour mieux y croire, pour mieux s'auto-convaincre est une vieille recette. Comme le dit Aldous Huxley dans son prophétique Meilleur des mondes, "soixante-quatre mille répétitions font la vérité". Mais nombreux sont ceux qui ne se laissent pas abuser par ces répétitions, d'autant que la somme globale des omissions est sidérante.

Il est donc utile, devant la représentation nationale, de dire la vérité quant à ces chiffres sur lesquels vous faites l'impasse et qui représentent une addition salée.

Ce sont, d'abord, 70 millions d'euros pour tout ce qui touche au coût des programmes de remplacement, à savoir la création d'une heure vingt d'émission par soir, et y compris un changement d'architecture pour l'ensemble des programmes de la soirée ; ensuite, 40 millions afin de prendre en compte les effets inflationnistes sur les achats de programmes de France Télévisions ; puis 200 millions pour la non-prise en compte financière de la modernisation de France Télévisions, qui implique un investissement colossal dans le cadre du « global média » – les maîtres mots de votre exposé des motifs ;…

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