Découvrez vos députés de la 14ème législature !

Intervention de Jean-Luc Warsmann

Réunion du 8 juillet 2008 à 15h00
Modernisation des institutions de la ve république — Discussion en deuxième lecture d'un projet de loi constitutionnelle

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaJean-Luc Warsmann, président et, rapporteur de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la République :

À un moment où nos finances publiques connaissent tant de difficulté, il est vital – c'est même le premier devoir que nous avons envers nos concitoyens – que nous consacrions beaucoup d'énergie pour veiller à ce que chaque euro dépensé dans une politique publique le soit à bon escient et que le rapport qualité prix pour nos concitoyens soit le meilleur possible.

Quant à l'initiative concernant l'ordre du jour du Parlement, elle représente une avancée historique. En effet, si nous nous entendons tous pour rétablir le texte de l'Assemblée nationale, ce que je crois possible, nous allons mettre une super priorité dans les mains de la conférence des présidents de l'Assemblée nationale, en lui permettant de consacrer jusqu'à une semaine sur quatre le travail dans l'hémicycle à l'évaluation et au contrôle de l'action du Gouvernement.

Le deuxième objectif, qui n'est pas que symbolique, est la définition du rôle du Parlement dans notre Constitution. Nous allons en effet inscrire dans le rôle du Parlement, en écho à ce qu'a fait le Sénat, le fait d'évaluer les politiques publiques.

L'introduction dans notre Constitution d'un nouveau rôle donné à l'opposition en matière de contrôle me semble aller dans le bon sens. Je l'ai dit en première lecture, je le répète avec la même conviction et la même sincérité : quel que soit le gouvernement, si l'on veut que le Parlement puisse effectuer un travail d'évaluation et de contrôle pointu, objectif et sans être limité par le fait majoritaire, il faut donner à l'opposition un poids de présence supérieur au poids minoritaire qu'elle représente dans l'hémicycle. Là aussi, la révision constitutionnelle répond aux objectifs que nous nous étions fixés, et l'initiative que vous avez annoncée il y a quelques instants, monsieur le président de l'Assemblée, va dans la même direction.

La possibilité que nous ouvrons dans la Constitution pour un gouvernement d'organiser un débat sur un thème particulier est un progrès. Tout le monde le sait, certaines politiques publiques sont très peu législatives, je pense par exemple à la politique en matière d'éducation nationale. Grâce à la révision constitutionnelle, le ministre de l'éducation pourra venir présenter sa politique en matière d'éducation nationale, cette déclaration pouvant être suivie d'un débat, voire, le cas échéant, d'un vote. C'est, là aussi, un renforcement du pouvoir du contrôle du Parlement.

La discussion systématique en cas d'intervention des forces armées et l'autorisation en cas de renouvellement de cette intervention est un autre élément de renfort de ce contrôle qui était attendu depuis des décennies.

Vous avez également évoqué, monsieur le Premier ministre, l'introduction des résolutions. Je n'ai aucune honte à avouer que j'ai fait partie et que je fais toujours partie de ceux qui pensent que les résolutions ne doivent pas être dévoyées. Je considère qu'un des atouts de la Ve République est d'avoir très nettement clarifié les modes de mise en cause de la responsabilité d'un gouvernement. Je ne voudrais pas que l'on se retrouve, demain, dans la situation d'une République précédente, où le vote d'une résolution permettrait de mettre en cause l'action d'un ministre ou d'un gouvernement réformateur. Vous allez proposer, monsieur le Premier ministre, au nom du Gouvernement, un amendement qui apportera des garanties dans ce sens. Je le voterai évidemment avec grand plaisir.

Toutes ces dispositions sont autant d'outils très concrets qui nous permettront à l'avenir de porter à un niveau jamais atteint le travail d'évaluation et de contrôle du Parlement.

Le troisième objectif de cette révision, objectif que nous avons à l'esprit depuis le début du débat, c'est le renforcement des droits de nos concitoyens. En votant la révision constitutionnelle, nous allons permettre à nos concitoyens de saisir le Conseil supérieur de la magistrature. Nous allons ainsi concrétiser un objectif que beaucoup d'entre nous et de nos prédécesseurs avaient eu.

Nous constitutionnalisons un défenseur des droits, ce qui permettra de réels progrès.

Nous permettrons aux justiciables de soulever l'exemption d'inconstitutionnalité, disposition favorable à l'État de droit.

Nous avons introduit, grâce à un vote quasi unanime, un référendum d'initiative conjointe. Je pense que ces termes de « référendum d'initiative conjointe » conviennent mieux que le référendum d'initiative populaire. Dans un certain nombre de situations, cela peut permettre de renforcer le dialogue entre le Parlement et la population.

Nous avons également eu de multiples débats en matière de référendum sur l'élargissement de l'Union européenne. Sans la révision constitutionnelle, que se passerait-il si demain, en 2010, en 2014, un Président de la République venait à signer un traité d'élargissement de l'Union européenne permettant l'intégration, que sais-je, du Montenegro par exemple ? Première solution, l'application de l'article 88-5, avec un référendum. Seconde solution, si le Gouvernement fait ce choix, dépôt d'un projet de loi devant l'Assemblée nationale autorisant le Gouvernement à procéder à la ratification par voie parlementaire – vote par l'Assemblée, vote par le Sénat, nécessité de recueillir les trois-cinquièmes des votes au Congrès. Si les majorités sont obtenues, alors, comme cela a été utilisé pour la Croatie, il pourrait être procédé à l'élargissement sans avoir recours au référendum. L'état du droit actuel consiste en ces deux voies.

Après de multiples discussions, le choix des uns et des autres, et en premier chef celui du Président de la République, a été de faire en sorte que les deux voies apparaissent matériellement dans l'article 88-5 de la Constitution, afin notamment que les observateurs étrangers puissent constater que la Constitution française contient bien toujours l'alinéa relatif au référendum, auquel beaucoup d'entre nous sont attachés, mais également la voie parlementaire. C'est ainsi que, après plusieurs réunions, un amendement a très légèrement, d'un trait de plume, aménagé le droit actuel : il propose de vérifier, avant de réunir le Congrès, que la majorité des trois-cinquièmes est réunie dans chacune des deux assemblées. Cette voie constituera une troisième solution pour ratifier un éventuel futur projet de loi d'élargissement. Je crois que cette solution devrait pouvoir recueillir un consensus.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Inscription
ou
Connexion