Découvrez vos députés de la 14ème législature !

Intervention de Bruno Le Maire

Réunion du 5 novembre 2008 à 9h30
Projet de loi de finances pour 2009 — Agriculture

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaBruno Le Maire, rapporteur pour spécial de la commission des finances, de l'économie générale et du plan, pour la sécurité alimentaire :

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, la sécurité sanitaire est aujourd'hui un enjeu de santé publique majeur qui se traduit par de réelles inquiétudes chez nos concitoyens. Il est du devoir de l'État de garantir à chaque Français la protection nécessaire et de mobiliser les moyens financiers et humains pour faire face efficacement à une éventuelle épidémie de grande ampleur.

Les menaces sanitaires sont en effet aujourd'hui réelles.

S'agissant de la santé animale, la fièvre catarrhale ovine touche aujourd'hui quarante-trois départements, notamment celui de l'Eure. Sa propagation est particulièrement rapide et l'évolution de cette épidémie est imprévisible.

Pour ce qui est de la santé humaine, malgré une moindre médiatisation du danger, la menace d'une pandémie grippale reste réelle. Selon l'OMS, quarante-huit personnes ont été touchées par ce virus dans le monde et trente-deux sont décédées en 2007. Le risque de transmission d'homme à homme n'est écarté par aucun des spécialistes que votre rapporteur a pu auditionner.

En 2009, les moyens financiers nécessaires seront mobilisés pour faire face à ces menaces. Les crédits du programme « Sécurité et qualité sanitaires de l'alimentation » progressent en effet de 7,7 % pour les autorisations d'engagement et de 7,1 % pour les crédits de paiement. Priorité est donnée à la lutte contre les maladies animales, dont les crédits devraient progresser de 4,6 % pour les autorisations d'engagement et de 2,1 % pour les crédits de paiement, en particulier ceux affectés à la lutte contre la fièvre catarrhale ovine, ce dont je tiens à féliciter particulièrement M. le ministre de l'agriculture. En 2008, la loi de finances n'y consacrait que 1,2 million d'euros, ce dont votre rapporteur s'était étonné compte tenu de la propagation rapide de la maladie.

De fait, ces crédits se sont révélés insuffisants et l'État devra finalement engager 120 millions d'euros en 2008 pour soutenir la filière. Pour 2009, 13,72 millions d'euros sont prévus, mais, compte tenu des montants consommés en 2008, je m'interroge sur un éventuel complément de ces crédits en cours d'exercice.

En tout état de cause, les négociations actuelles sur la participation de l'Union européenne au financement des vaccins et de la vaccination auront une importance primordiale. Je sais, monsieur le ministre, que nous pouvons compter sur votre détermination dans ce domaine.

Pour finir sur ce programme relatif à la sécurité sanitaire des animaux, je tiens à saluer l'effort du Gouvernement pour rationaliser la dépense publique en remplaçant le service public de l'équarrissage par des dispositifs relevant des filières. Cela représente à la fois une économie pour l'État et un dispositif plus efficace et plus responsable pour les agriculteurs.

Votre rapporteur a aussi souhaité faire le point lors de ses auditions sur la mise en oeuvre du plan « Pandémie grippale » et sur la préparation de la France face à cette menace.

Je me félicite que les orientations prises à l'apparition de cette menace par le ministre de la santé de l'époque, Xavier Bertrand, et par le gouvernement de Dominique de Villepin fassent toujours l'objet d'une attention soutenue, comme en témoignent la poursuite des actions de stockage de vaccins et de masques ainsi que la priorité accordée en 2008 et 2009 à leur financement. Aucune contrainte d'ordre budgétaire ne doit peser sur les choix de santé publique, notamment en matière d'acquisition de masques et de médicaments. En 2008, le plan « Pandémie grippale » a bénéficié de 69,25 millions d'euros, dotation portée à 269,06 millions d'euros en 2009.

Trois questions doivent être tranchées.

La première concerne la place et le rôle exact de l'Établissement public de recherche et d'urgence sanitaire. Compte tenu de l'urgence qu'il y avait à agir contre le risque d'épidémie en 2004, des moyens et des structures variés ont été mobilisés. Il est désormais indispensable de rationaliser ce dispositif. L'EPRUS doit rester le bras armé de la direction générale de la santé, en gérant les stocks de médicaments et de masques et en mettant en oeuvre les orientations stratégiques définies par le ministère de la santé.

De ce point de vue, je tiens à relever deux éléments positifs récents : la nomination d'un nouveau directeur de l'EPRUS après quelques mois de vacance du poste, ce qui était très regrettable eu égard à l'importance de cet établissement public ; l'adoption, par le décret du 22 août 2008, du statut d'établissement pharmaceutique pour l'EPRUS, qui lui permettra de remplir pleinement sa mission.

La deuxième question qui se pose s'agissant de ce dispositif de réponse aux urgences sanitaires concerne la répartition territoriale des stocks de médicaments et de masques pour faire face à une éventuelle pandémie grippale.

Le choix initial de répartir les stocks sur l'ensemble du territoire plutôt que de les concentrer en un point précis impose des contrôles nombreux et des inspections régulières. Je pense néanmoins que ce choix est le seul à même de garantir un accès rapide de la population aux dispositifs de santé en cas d'épidémie. En effet, en cas de pandémie grippale, suivant les informations qui nous ont été données, pour avoir toute son efficacité, le Tamiflu doit être administré à un patient qui présenterait les symptômes dans les vingt-quatre heures. Il est évident que si les stocks sont répartis sur l'ensemble du territoire, l'accès à ce médicament sera facilité.

La troisième question est celle d'un éventuel report des délais de péremption des anti-viraux et des masques. Plusieurs cas doivent être distingués.

Selon les travaux de l'AFSSAPS, le Tamiflu, sous forme de gélules, pourra sans risque voir sa date de péremption repoussée. De même, les masques chirurgicaux, destinés à protéger l'entourage d'une personne contaminée, ont une durée d'efficacité très longue. On peut donc envisager, pour des raisons d'économies budgétaires mais sans atteinte aucune à la sécurité sanitaire, que cette date de péremption soit repoussée.

En revanche, celle du Relenza et des comprimés d'Oseltamivir, produits directement par la pharmacie centrale des armées, ne peut pas être prolongée. Ils sont en effet stockés sous forme de poudre et perdent leurs qualités médicales rapidement dans le temps.

Les réflexions actuelles portent sur la prolongation du délai de péremption des masques FFP2, destinés aux soignants, qui bénéficient d'un mécanisme de protection plus complexe. Ces masques étaient utilisés jusqu'à présent dans le secteur industriel et la question de leur délai de péremption ne s'était, de ce fait, jamais réellement posée. La commission des finances a unanimement considéré que cette prolongation ne pouvait être envisagée que si nous avions l'assurance à 100 % que ces masques conservaient toute leur efficacité au-delà du délai de péremption envisagé.

En conclusion, je tiens à souligner l'importance d'une coordination européenne sur ce sujet de la sécurité sanitaire. La France est probablement l'un des pays les plus avancés et les mieux dotés en matière de préparation à une menace de pandémie grippale ou à une menace de type agricole. Elle devra promouvoir, au conseil « santé » de l'Union, les 15 et 16 décembre prochains, une réponse commune des pays de l'Union européenne face aux alertes sanitaires. Je sais, monsieur le ministre, que vous y travaillez activement.

Enfin, je tiens à relever que ce budget est marqué par un réel effort financier et une vraie prise de conscience des enjeux de santé publique qui avaient été soulignés par votre rapporteur l'année précédente. Ce budget pour 2009 de la sécurité et de la qualité sanitaires de l'alimentation témoigne de la volonté réelle de maintenir notre capacité de réponse face aux urgences sanitaires, notamment face au risque de pandémie grippale. Je vous demande donc, mes chers collègues, de l'adopter. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Inscription
ou
Connexion