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Intervention de Jean-Pierre Jouyet

Réunion du 26 juillet 2007 à 9h30
Convention de sauvegarde des droits de l'homme et adhésion au pacte international visant à abolir la peine de mort — Discussion de deux projets de loi adoptés par le sénat

Jean-Pierre Jouyet, secrétaire d'état chargé des affaires européennes :

Monsieur le président, monsieur le rapporteur, mesdames, messieurs les députés, j'ai l'honneur de vous présenter le protocole n° 13 à la Convention européenne des droits de l'homme signé par la France le 3 mai 2002, ainsi que le second protocole facultatif se rapportant au pacte international relatif aux droits civils et politiques visant à abolir la peine de mort adopté dans le cadre des Nations unies le 15 décembre 1989.

Le processus de ratification de ces protocoles avait été, comme vous le savez, engagé fin 2002. Mais un doute subsistait à la suite de l'interprétation donnée par le Conseil constitutionnel dans sa décision du 22 mai 1985.

En effet, en raison de l'abolition de la peine de mort en toutes circonstances, à laquelle ces deux protocoles conduisent, il était nécessaire de savoir si la ratification de ces deux protocoles pouvait être de nature à faire obstacle à un éventuel rétablissement de la peine de mort par le Président de la République, au titre des pouvoirs exceptionnels qu'il tire de la Constitution, et notamment de l'article 16.

Saisi par le Président de la République le 22 septembre 2005, le Conseil constitutionnel a opéré un raisonnement distinct pour les deux protocoles.

S'agissant du protocole n° 13, le Conseil constitutionnel a estimé qu'il ne contenait aucune clause contraire à la Constitution. Il s'est fondé sur la possibilité de dénonciation de ce protocole découlant de l'article 58 de la Convention européenne des droits de l'homme pour juger qu'il ne portait pas atteinte aux conditions essentielles d'exercice de la souveraineté nationale.

En revanche, le Conseil constitutionnel a conclu différemment s'agissant du second protocole facultatif. Ce dernier, en effet, exclut toute dérogation et n'autorise qu'une seule réserve pour les législations applicables en temps de guerre aux crimes de caractère militaire d'une gravité extrême et commis en temps de guerre. Cette réserve n'est possible qu'au moment de la ratification et le protocole ne peut être dénoncé par la suite. C'est pourquoi, estimant que l'adhésion à ce protocole qui touche à un domaine inhérent à la souveraineté nationale lierait irrévocablement la France, même dans le cas où un danger exceptionnel menacerait l'existence de la nation, le Conseil constitutionnel en a conclu que le second protocole portait atteinte aux conditions essentielles de la souveraineté et que sa ratification ne pouvait intervenir qu'après révision de la Constitution.

Compte tenu de l'objet des deux protocoles, il a été jugé préférable de lier les deux processus de ratification. Comme vous le savez, le Congrès a procédé, le 19 février dernier, à cette révision constitutionnelle et a donné un caractère irréversible à l'abolition de la peine de mort en inscrivant à l'article 66-1 de la Constitution : « Nul de peut être condamné à mort ». Cette révision constitutionnelle est la consécration de l'action engagée par la France pour l'abolition de la peine de mort depuis la loi du 9 octobre 1981. Désormais, la ratification de ces deux protocoles est juridiquement possible. Politiquement, elle marque un engagement fort de la France en faveur des droits de l'homme.

Le protocole n° 13 ratifié par trente-neuf États membres du Conseil de l'Europe, dont vingt-deux États membres de l'Union européenne est entré en vigueur le 1er juillet 2003.

Quant au second protocole facultatif, se rapportant au pacte international relatif aux droits civils et politiques visant à abolir la peine de mort, soixante États membres de l'Organisation des Nations unies l'ont ratifié à ce jour, dont vingt-quatre États membres de l'Union européenne. Il est entré en vigueur le 11 juillet 1991.

Avec la ratification du protocole n° 13 et l'adhésion au second protocole facultatif, la France parachèvera le processus d'exclusion de la peine de mort. Elle s'honorera et renforcera sa réputation de patrie des droits de l'homme.

Je vous remercie, mesdames, messieurs les députés, de l'autorisation que vous voudrez bien donner, pour que la France devienne partie à ces deux protocoles. (Applaudissements sur de nombreux bancs.)

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