Découvrez vos députés de la 14ème législature !

Intervention de Jean Dionis du Séjour

Réunion du 9 avril 2009 à 9h30
Protection de la création sur internet — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaJean Dionis du Séjour :

Monsieur le président, madame la ministre, messieurs les rapporteurs, mes chers collègues, je tiens d'abord, et malgré nos désaccords, à remercier madame la ministre pour sa disponibilité et celle de son équipe. Les centristes saluent et remercient également les trois rapporteurs, avec une mention spéciale à Franck Riester, qui a toujours défendu les points de vue de notre Assemblée, notamment au sein d'une CMP qui restera de triste mémoire.

Comment permettre aux professionnels de la culture de vivre de leur création dans une société où Internet est devenu le canal de diffusion majeur ? Nous avions déjà essayé de répondre à cette question il y a trois ans, lors de l'examen de la loi DADVSI. Déjà, en 2006, nous cherchions à lutter contre l'ampleur du téléchargement illégal dans notre pays, qui semblait expliquer l'effondrement de certains marchés culturels – notamment celui du CD.

Si nous sommes réunis aujourd'hui, c'est bien que la loi DADVSI n'a pas été à la hauteur – pour le dire plus crûment, qu'elle a été d'une inefficacité flagrante.

C'est donc cette même question de la rémunération de la création à l'heure d'Internet qui a conduit à la signature, le 23 novembre 2007, des accords de l'Élysée. Fondés sur les conclusions du rapport de Denis Olivennes, ceux-ci constituent la colonne vertébrale du projet de loi.

Mais soyons clairs. Les centristes considèrent que la méthode privilégiée pour l'élaboration de ce texte était bonne. Ils se retrouvent également dans les principes fondateurs de la loi : une forte promotion de l'offre légale alliée à l'existence d'un volet dissuasif pour lutter contre le téléchargement illégal.

Notre ligne politique est restée la même depuis 2005 : nous considérons qu'il est indispensable d'élaborer une vision à long terme des modes de consommation des oeuvres culturelles sur Internet tout en reconnaissant la nécessité de prendre des mesures pragmatiques de court terme pour diminuer le téléchargement illégal.

Nos critiques se concentrent donc sur l'insuffisance des dispositions destinées à favoriser l'offre légale des oeuvres sur Internet. Nous sommes profondément convaincus que c'est le streaming, la diffusion de la musique en mode continu, qui fera reculer durablement le téléchargement illégal, et non la riposte graduée, tout utile qu'elle soit à court terme. Nous n'avons d'ailleurs cessé de dénoncer depuis 2005 la cherté de l'offre légale. Aucun effort majeur n'a été fait depuis trois ans pour faire baisser significativement les prix. Un jour, il faudra pourtant bien prendre en compte la spécificité des échanges numériques, caractérisés par un coût de reproduction quasi nul et la persistance d'une qualité intacte, copie après copie.

Les marchés d'avenir que sont le cinéma et la musique numériques ne pourront trouver leur modèle économique qu'en s'élargissant considérablement grâce à des baisses significatives de prix et en s'ouvrant enfin à de nouveaux modèles de consommation des oeuvres comme l'abonnement ou le forfait.

Le groupe Nouveau Centre vous avait soumis un certain nombre d'amendements qui visaient non seulement à rendre l'offre légale plus attractive mais aussi à faire émerger ces nouveaux modèles de consommation des oeuvres culturelles en ligne. On voit d'ailleurs déjà poindre les modèles économiques gagnants. Le spectacle vivant ne s'est jamais aussi bien porté et les systèmes de forfait et d'abonnement permettent aujourd'hui d'avoir accès à des catalogues en streaming toujours plus vastes, tout en permettant la rémunération des ayants droit.

Malheureusement, le texte final reste pauvre pour ce qui est de ce renouvellement du modèle économique de nos industries culturelles. Notre amendement permettant à la HADOPI de saisir l'Autorité de la concurrence a ouvert la possibilité de s'intéresser enfin au fonctionnement effectif de la concurrence dans l'industrie musicale et aux relations contractuelles entre les ayants droit et les diffuseurs, qui sont souvent déséquilibrées. Saisissez-vous donc de cet outil, madame la ministre et mesdames et messieurs les futurs membres de la HADOPI !

Le vent de la révolution numérique se lève mais, comme dit le poète, « il faut tenter de vivre ». À court terme, nous soutenons donc l'existence d'un volet répressif dans la loi.

La riposte graduée est, pour paraphraser bien humblement Churchill, la pire des solutions à l'exception de toutes les autres pour lutter contre un phénomène devenu comportement social de masse. Certes, ce dispositif a des limites : la détection et l'identification des contrevenants seront particulièrement difficiles, elles donneront lieu à de nombreux contentieux et les internautes les mieux renseignés trouveront des voies de contournement. Mais nous considérons, pour utiliser une expression triviale, que nous n'avons actuellement rien de mieux en magasin.

Je le dis à nos collègues de l'opposition : nous pouvons vous rejoindre sur des propositions à long terme, mais il nous semble trop facile de faire l'impasse sur le court terme.

C'est d'ailleurs pour cette raison qu'une majorité de députés du Nouveau Centre, à commencer par notre président François Sauvadet, soutient en majorité votre projet de loi, madame la ministre, tout en étant solidaire des nombreuses propositions d'amélioration que nous vous avons faites tout au long des débats.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Inscription
ou
Connexion