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Intervention de Christian Paul

Réunion du 9 avril 2009 à 9h30
Protection de la création sur internet — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaChristian Paul :

Vous êtes dans l'impasse nommée HADOPI.

HADOPI ne sera jamais, madame la ministre, l'outil de l'exception culturelle. L'exception culturelle, c'est considérer que la culture n'est pas une marchandise. Or tout dans votre discours donne à penser – peut-être démentirez-vous – que le mouvement de marchandisation de la culture sur Internet est irréversible et qu'il ne doit tolérer aucune exception. Avec HADOPI, il n'y a plus d'exception culturelle. L'exception culturelle n'est pas seulement un regard différent sur la culture et son statut dans la société, c'est également la recherche de financements exceptionnels, de financements mutualisés et de financements publics, même si ces derniers sont en régression aujourd'hui. HADOPI a balayé la volonté de mettre en avant l'exception culturelle.

HADOPI est dans l'impasse, et vous avec elle. Il faudra des mois, voire des années pour mettre en oeuvre ce texte, forger les boucliers, inventer des parades. Il y faudra des dizaines de millions d'euros, prélevés sur le budget de votre ministère qui est exsangue, au mépris du spectacle vivant aujourd'hui paupérisé, des dizaines de millions d'euros demandés aux opérateurs, alors que ces sommes auraient pu servir à soutenir la musique et le cinéma.

HADOPI est dans l'impasse. HADOPI, peut-être – souhaitons-le –, ne passera pas pour cause de guérilla juridique permanente, de guérilla technologique de tous les instants, et elle a d'ores et déjà commencé, pour contourner, crypter. Si telle est la mission d'un ministre de la culture, vous serez emportée par cette guérilla !

Enfin, n'oublions pas le Conseil constitutionnel, dont le rôle, dans notre République, est de contrôler l'activité normative des pouvoirs publics, y compris lorsque ceux-ci s'affranchissent des principes constitutionnels et des principes fondamentaux de notre droit. Patrick Bloche vous a tout à l'heure adressé à cet égard une éclatante démonstration, que sa voix, j'en suis sûr, portera jusqu'au Palais Royal.

L'après-HADOPI a déjà commencé. Oubliant le détestable climat dans lequel cette loi a été débattue et votée, nous prendrons des initiatives pour soutenir les éditeurs qui veulent véritablement valoriser les oeuvres et pour défendre l'idée qu'Internet doit financer la culture, comme, en 1984 et 1985, un gouvernement mieux inspiré que le vôtre avait permis que la télévision finance le cinéma. Tel est le chemin qu'il faudrait emprunter. La proposition de contribution créative que nous avons défendue à maintes reprises dans cet hémicycle est maintenant soumise au débat public.

Madame la ministre, mes chers collègues, ce texte fait à notre société une violence insupportable. Il ne fait honneur ni à Beaumarchais, qui n'entendait pas opposer les artistes au public lorsqu'il défendait la conception française du droit d'auteur, ni au pays de grande tradition culturelle et humaniste qu'est la France. Je veux le dire ce matin à cette tribune : le mouvement pour l'abolition d'HADOPI commence aujourd'hui ! (Applaudissements sur les bancs des groupes SRC et GDR.)

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