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Intervention de André Chassaigne

Réunion du 9 octobre 2008 à 21h45
Grenelle de l'environnement — Article 2

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaAndré Chassaigne :

L'article 2 prétend reprendre les grands engagements internationaux de la France, mais sur plusieurs points, il entérine un recul par rapport à ces engagements. Il ne précise pas, en tout cas, comment ils seront suivis d'effet. On s'y contente d'annonces lapidaires, de ce fait bien imprécises.

Ainsi le Gouvernement réaffirme vouloir diviser par quatre les émissions de gaz à effet de serre de la France ; mais il ne mentionne pas la diminution moyenne de 3 % par an inscrite dans la loi de 2005. Cet article revient aussi sur notre engagement de porter la part des énergies renouvelables à 20 % de notre consommation en 2010, comme indiqué dans la loi de 2005 et dans la directive européenne de 2000, pour repousser l'objectif à 2020.

Les ambitions du Grenelle sont ainsi revues à la baisse ; le gouvernement semble vouloir ralentir la cadence dans la lutte contre le réchauffement climatique, au lieu de l'accélérer.

S'agissant de la dépollution, le projet reprend l'idée d'échanges de quotas d'émissions de gaz à effet de serre entérinée par le protocole de Kyoto et la Commission européenne. Les entreprises peuvent ainsi s'acheter un droit à polluer ou le vendre aux enchères si elles ne l'utilisent pas. C'est la façon néolibérale de promouvoir la dépollution par la recherche du profit. Mais qui croira que le marché, laissé à lui-même, luttera efficacement contre le changement climatique et que des agents économiques guidés par la seule logique de la rentabilité immédiate vont investir massivement et spontanément dans les territoires dont les handicaps sont reconnus et les infrastructures dégradées ?

En affirmant un tel principe, on voudrait faire croire que le combat pour l'environnement n'a pas de coût. Mieux vaudrait dire clairement qu'il est nécessaire de mobiliser de nouvelles ressources pour atteindre les objectifs du Grenelle.

Présenté comme un modèle, ce système européen d'échange de droits ouvre la porte à bien des fraudes. Pour la première année, les autorités ont distribué des droits pour 1 848 millions de tonnes d'émissions de CO2. Or les 11 500 entreprises concernées n'ont émis que 1 785 millions de tonnes. Elles ont donc pu vendre des droits pour 63 millions de tonnes. Le secteur britannique de l'électricité a ainsi réalisé un bénéfice de 800 millions de livres sans avoir participé à la réduction des émissions.

Quant à la taxe carbone, qui était loin de faire le consensus lors du Grenelle, elle sera mise à l'étude. Le coût ne sera-t-il pas supporté par les plus modestes, en particulier les habitants des campagnes où l'habitat est épars, les services publics de plus en plus rares, et où l'on est obligé de prendre toujours plus souvent sa voiture ? Cette taxe carbone donnera bien lieu à une compensation fiscale, mais sur les cotisations sociales patronales, ce qui revient à créer une TVA sociale « carburant ». La charge est ainsi transférée des entreprises aux consommateurs. Pour que cette taxe soit juste, il faudrait que la compensation consiste en une diminution des cotisations sociales salariales.

Enfin, l'État promet des incitations aux investissements dans les économies d'énergie. Mais les critères d'éligibilité ne valorisent que les projets les moins coûteux et les moins ambitieux, ne visant que le court terme. Nous voici en pleine contradiction avec l'esprit du Grenelle.

Dans ces conditions, notre vote en faveur de l'article 2 est extrêmement compromis.

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