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Intervention de Philippe Folliot

Réunion du 25 juin 2009 à 9h30
Rémunération des salariés concernés par une procédure de reclassement — Discussion d'une proposition de loi

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaPhilippe Folliot, rapporteur de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales :

Cela dit, j'ai tenu – à titre personnel et au nom du groupe Nouveau Centre – à rencontrer l'ensemble des organisations syndicales et patronales, interlocuteurs incontournables pour alimenter mes réflexions sur le sujet.

Je les ai d'abord rencontrés sur place, juste après l'événement intervenu à Castres. Je les ai ensuite rencontrés à l'Assemblée nationale, dans le cadre de l'organisation d'auditions préalables à l'élaboration du rapport. Tour à tour, j'ai eu des contacts avec la CFTC, FO, l'UNSA, le MEDEF, la CGT, la CFE-CGC et, tout dernièrement, la CFDT.

Je ne les ai pas rencontrés par formalisme, mais plutôt par déformation professionnelle, si vous me permettez l'expression. En effet, j'ai effectué l'essentiel de ma carrière dans le secteur de l'économie sociale et solidaire, à la tête d'un organisme paritaire oeuvrant dans le domaine du logement social. Consulter les organisations syndicales et patronales avant de proposer une orientation qui les concerne relève chez moi d'une conviction profonde quant à la nécessité du dialogue social, essentiel à une société apaisée.

Toutes ces auditions m'ont d'ailleurs amené à proposer en commission un amendement qui modifie substantiellement la proposition de loi initiale, afin de tenir compte du relatif consensus qui s'est formé, entre organisations syndicales et patronales, sur l'encadrement des procédures de reclassement à l'étranger. Ainsi, le texte que nous examinons a été approuvé dans ses grandes lignes par l'ensemble des partenaires sociaux que j'ai eu l'occasion de rencontrer.

J'en viens au coeur de ce texte, qui tend à compléter doublement l'article du code du travail relatif aux procédures de reclassement, contenu dans la sous-section 3 de la section 2 du chapitre du code relatif aux licenciements pour motif économique.

La première partie de l'article unique de la proposition de loi précise que les offres de reclassement devront assurer aux salariés une rémunération équivalente à celle qu'ils percevaient dans leur précédent emploi. Cette mention était étrangement absente de l'article L. 1233-4, qui se contentait d'assurer aux salariés concernés un reclassement portant « sur un emploi relevant de la même catégorie que celui qu'il occupe, ou sur un emploi équivalent ».

Désormais, le juge pourra si ce texte est adopté, sanctionner les offres de reclassement assorties d'une rémunération non équivalente, et plus particulièrement celles qui sont humiliantes pour le salarié, ce qui permettra d'éviter les nombreuses dérives dont nous avons été témoins.

La seconde partie de la proposition de loi a trait plus spécifiquement aux offres de reclassement dans un pays étranger, et vise à en préciser les modalités et les spécificités.

En effet, si le problème ne se pose pas pour les pays qui ont un niveau de rémunération équivalent ou supérieur à celui pratiqué en France, il revêt une acuité particulière lorsque ces offres concernent des pays où les rémunérations y sont très nettement inférieures, et nécessite que nous légiférions.

L'internationalisation de notre économie et les écarts considérables des coûts du travail dans le monde amènent de plus en plus d'entreprises et de groupes à délocaliser leurs activités dans des pays à faible coût de main-d'oeuvre. Lors d'un licenciement économique, les employeurs sont donc obligés de proposer à leurs salariés un emploi dans toutes les implantations du groupe auquel l'entreprise appartient, ce qui conduit certains d'entre eux à s'exonérer de fait de leurs responsabilités, en proposant des rémunérations surréalistes dont ils savent pertinemment qu'elles ne seront pas acceptées.

Le dispositif que nous vous soumettons vise à replacer le salarié au coeur de la procédure de reclassement, sans exonérer l'employeur de sa responsabilité.

L'option retenue, après consultation des partenaires sociaux, consiste à donner une base légale à la méthode dite du questionnaire préalable, que certaines entreprises avaient imaginée pour éviter d'avoir à présenter à leurs salariés toutes les offres disponibles, aussi indécentes soient-elles. Cette méthode n'a malheureusement pas été admise par les juridictions de l'ordre judiciaire, alors qu'elle l'a été par celles de l'ordre administratif.

Le reclassement devra continuer à être envisagé dans toutes les implantations du groupe d'entreprises, mais l'employeur devra préalablement demander aux salariés s'ils accepteraient de recevoir des propositions de reclassement à l'étranger, et sous quelles conditions. Les offres concrètes ne seront ensuite envoyées qu'aux salariés ayant manifesté leur accord de principe pour recevoir de telles propositions, et sous réserve qu'elles répondent aux conditions de salaire et de localisation qu'ils auront exprimées.

Les salariés disposeront de six jours ouvrables pour manifester leur accord pour recevoir des offres d'emploi à l'étranger – le silence valant refus. Ce délai, volontairement court, permet de limiter la contrainte que la nouvelle procédure pourrait représenter pour les employeurs. L'introduction d'une obligation nouvelle sera largement compensée par la sécurité juridique qu'apportera une procédure simple, décrite avec précision dans la loi.

La nouvelle procédure ne s'appliquera qu'aux entreprises ou groupes ayant des implantations à l'étranger. Son inscription dans un nouvel article du code du travail permettra de bien la distinguer des règles de droit commun du reclassement qui, elles, sont jugées satisfaisantes, et qui resteront seules applicables en France.

Pour résumer ma présentation, je dirais que cette proposition de loi poursuit deux objectifs. Le premier relève de la morale : il s'agit de faire en sorte que jamais, plus jamais, un salarié ne puisse recevoir une proposition de reclassement indécente, voire traumatisante, au mépris même de sa dignité. (Applaudissements sur les bancs du groupe NC.)

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