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Intervention de Jérôme Cahuzac

Réunion du 25 octobre 2007 à 9h30
Projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2008 — Article 8 et annexe b

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaJérôme Cahuzac :

Monsieur le ministre, vous avez une tâche difficile. Il vous faut en effet assumer le passé, supporter le présent et nous garantir l'avenir. C'est, je le reconnais, beaucoup pour vous. Vous pouvez, certes, compter sur l'aide de rapporteurs loyaux, dont nous savons à quel point ils connaissent les sujets qu'ils traitent, mais pour représenter le Gouvernement, vous êtes bien seul.

Assumer le passé, c'est d'abord assumer la réforme Douste-Blazy-Bertrand, qui donnait d'ailleurs déjà lieu, en son temps, à une répartition des rôles évidente entre M. Douste-Blazy, qui l'expliquait dans Paris-Match, et M. Bertrand, qui l'assumait devant le Parlement.

Quelles réformes de structures ont donc été mises en oeuvre cette année-là pour que nous nous trouvions confrontés, en 2007, à la situation que nous connaissons et aux prévisions que l'annexe B à l'article 8 révèle comme d'un effroyable pessimisme ? Il n'y a pas eu de réforme de structures, monsieur le ministre, mais seulement des mesures de recettes, comme l'augmentation de la C3S, les déremboursements, l'élargissement de l'assiette de la CSG, l'augmentation de la CSG pour les non-retraités, c'est-à-dire des mesures qui ont certes donné des résultats comptables l'année suivante, mais qui, cette année déjà, et bien moins encore l'année prochaine, ne produiront pas les effets qu'on est en droit d'attendre d'une vraie réforme de notre système de protection sociale. Ainsi, l'article que nous examinons présente en réalité des chiffres qui, même s'ils reposent sur des scénarios économiques incroyablement optimistes, ne suffisent pas à nous garantir l'avenir. Il vous faut donc, je le répète, assumer le passé.

Je vous rappelle à cet égard, monsieur le ministre – si du moins vous voulez bien m'accorder un instant d'attention –, que je vous ai posé hier soir, avant la clôture de la séance, une question à laquelle vous n'avez pas répondu, sans doute parce qu'il était tard et que nous étions tous fatigués. Je vous pose donc à nouveau cette question, puisque, là encore, vous devez assumer le passé.

Pour expliquer le dérapage de près de 4 milliards d'euros de l'assurance maladie en 2007, dû pour les trois quarts aux soins de ville, vous invoquez dans l'exposé des motifs des phénomènes épidémiologiques et les prescriptions pharmaceutiques. Je vous demande donc à nouveau, monsieur le ministre, puisque vous êtes seul au banc du Gouvernement pour assumer le passé, quelles ont été ces épidémies, combien cela a coûté à l'assurance maladie, quels ont été les postes pharmaceutiques qui ont dérapé et combien ils ont coûté et, surtout, quelles mesures vous comptez prendre dès l'année prochaine pour éviter de nouvelles épidémies éventuelles et d'éventuels dérapages sur les postes pharmaceutiques, que l'on ne peut exclure. Comment comptez-vous éviter que nous ne connaissions un nouveau dérapage financier, d'une ampleur comparable ou supérieure au précédent, qui réduirait à néant ce que vous nous annoncez en matière de maîtrise des comptes publics ?

Voilà donc pour ce qui est d'assumer le passé – c'est-à-dire, en réalité, cette année.

Vous avez beaucoup de mal à supporter le présent, car, même si je ne doute pas que vous soyez parfaitement sincère lorsque vous vous efforcez de rassurer la représentation nationale sur ce que sera la situation des comptes dès 2008 et les années ultérieures, rien dans vos réponses ne nous dit ce que vous vous apprêtez à faire pour éviter que les comptes ne continuent à déraper et ne plongent la protection sociale dans une crise financière bien plus grave que celle de 2004, dont vos prédécesseurs avaient déjà dû indiquer qu'elle mettait en péril, par son ampleur, la protection sociale.

Cette ampleur étant désormais relativisée par celle de la crise plus grave que nous connaissons aujourd'hui, quelles mesures de recettes ou de structures entendez-vous prendre, dès l'année prochaine, à l'exception des mesures de recettes que vous nous avez dit exclure – je vous rappelle en effet, au risque de vous agacer, que vous nous avez très clairement répondu que vous n'augmenteriez ni la TVA, ni la CSG, ni la CRDS –, pour éviter qu'après le présent que vous devez assumer de tels dérapages ne persistent ?

Vous devez en effet nous garantir l'avenir. À cet égard, les tableaux annexés à l'article 8 sont d'un pessimisme terrible, à moins qu'ils ne soient d'une lucidité et d'une loyauté à l'égard du Parlement qui vous honorent et dont je vous fais compliment. Aussi digne que soit cette attitude, elle ne rassure pas pour autant la représentation nationale, sur aucun des bancs de cet hémicycle, quant à une possible amélioration de la situation.

Que l'on adopte votre scénario économique bas ou l'autre, plus favorable, dès lors que vous nous indiquez que vous ne prendrez aucune mesure complémentaire, c'est par dizaines de milliards d'euros que le déficit cumulé se sera aggravé au cours de la mandature qui commence.

Monsieur le ministre, j'ignore si la situation vous préoccupe. En vous regardant – quand vous voulez bien me prêter attention –, je n'ai pas le sentiment que vous perceviez comme nous la gravité de ce que nous dénonçons. Mais alors, si je me trompe, rassurez-nous et dites-nous ce que vous allez faire. Si, en revanche, vous pensez que la situation décrite par les tableaux que vous nous fournissez est préoccupante, nous ne pouvons pas, en ce début de mandature, engager notre protection sociale dans un mécanisme qui, selon le scénario économique bas, aggrave de 40 à 50 milliards d'euros le déficit cumulé et, selon le scénario haut, l'aggrave tout autant, ou guère moins.

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