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Intervention de Georges Tron

Réunion du 17 avril 2008 à 9h30
Révision générale des politiques publiques

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaGeorges Tron :

…mais pour indiquer, comme Dominique Strauss-Kahn l'avait fait ici même lorsqu'il occupait d'autres fonctions, que nous sommes contraints aujourd'hui d'aller plus loin dans la réforme de nos politiques publiques. À cet égard, je tiens, après d'autres, à vous rendre hommage, monsieur le ministre : vous avez joué un rôle précurseur en créant les stratégies ministérielles de réforme, suivies des audits instaurés par M. Copé, puis de la RGPP, et cela forme un tout cohérent.

Pour ma part, je voudrais attirer l'attention sur un point assez peu développé ce matin, qui n'est guère optimiste : les réformes que vous engagez, dont l'ampleur est parfaitement justifiée, vont avoir un coût qui ne doit pas laisser espérer une réduction de la dépense, en tout cas dans l'immédiat.

En matière de gestion des ressources humaines, ni vous ni nous ne défendons l'idée que toute réduction des effectifs est une mauvaise décision : c'est une position caricaturale qui témoigne d'une conception d'un État complètement figé. Nous devons au contraire avoir une politique des ressources humaines adaptée aux besoins de la société, dont les mutations nécessitent une nouvelle conception des services publics ainsi que l'ajustement des effectifs. À cet égard, je récuse l'accusation maintes fois répétée selon laquelle nous réduirions les effectifs de façon homogène. La discussion du projet de loi de finances pour 2008 l'a montré, certains ministères ont des effectifs en plus, d'autres en ont en moins, et les 23 000 emplois supprimés ne l'ont pas été bêtement.

Plusieurs des mesures inscrites dans le cadre de la politique de gestion des ressources humaines vont peser lourdement sur les finances publiques. Ainsi, nous avons promis de rendre 50 % des économies réalisées par le biais de la politique de réduction des effectifs. Si bien que, sur les 900 millions à un milliard d'euros espérés en vitesse de croisière, il ne restera que 500 millions de marge de manoeuvre. On ne saurait donc nous accuser de ne chercher qu'à faire des économies !

Les différentes réformes que vous êtes en train de mettre en place généreront également des coûts. Ainsi, la fusion des corps, qui favorise la mobilité, devra s'accompagner de l'harmonisation des différents régimes indemnitaires, laquelle se fera par le haut, si l'on en juge par les discussions avec les syndicats. Le projet de loi sur la mobilité des fonctionnaires, adopté récemment en conseil des ministres, prévoit également que tout transfert préserve à la fois le grade et l'échelon d'origine et, dans la même logique, que toute promotion obtenue en détachement sera conservée. Dans le cadre de la restructuration des administrations, l'agent muté aura droit à une prime de 15 000 euros, à laquelle s'ajouteront 6 000 euros d'aide à la mobilité du conjoint, sans compter une prime de 10 000 euros pour ceux qui accepteront des postes que d'autres refusent. Compte tenu du coût de cette politique de la fonction publique, il ne faudra pas attendre de la RGPP des économies substantielles, en tout cas pour ce poste, avant un délai relativement long.

J'ajoute que nous avons promis – c'est valable pour les trois fonctions publiques – l'augmentation des heures supplémentaires, qu'il faudra bien financer, nonobstant les discussions en cours sur le rattrapage de la réduction du temps de travail.

La gestion des ressources humaines est un exemple des mesures qui auront un coût.

Vous me permettrez de conclure sur l'immobilier d'État. M. Jean-Pierre Brard a fort justement rappelé combien la question immobilière était importante et combien la mission d'évaluation et de contrôle s'en préoccupait. Nous sommes dans une situation particulière. La commission des finances a lancé, il y a trois ans, un vaste chantier sur le sujet et nous sommes aujourd'hui au milieu du gué. Au cours des dernières auditions auxquelles nous avons procédé, nous avons constaté une tentative de retour en arrière de nombreux ministères.

Je crois pouvoir affirmer, monsieur le ministre, que votre volonté, d'une part, de réformer les choses,et, d'autre part, de nous permettre d'approfondir la réforme lancée il y a trois ans est incontestable. Cela dit, je voudrais appeler votre attention sur quelques points

Il faut savoir que les sommes en jeu sont énormes. Si vous examinez la totalité des deux vagues de RGPP, vous constaterez, mes chers collègues, qu'environ la moitié des mesures concernent les restructurations des ministères, sous une forme ou sous une autre, et ont donc des conséquences sur le plan immobilier. Le montant global des sommes – puisque l'on a inclus les opérateurs – est de l'ordre de 80 milliards d'euros. Cela signifie que l'on joue sur des restructurations phénoménales. Les différentes auditions des ministères auxquelles nous avons procédé, en présence bien entendu des secrétaires généraux, ont toutes démontré que, dans une première période, les coûts induits par la restructuration liée à la RGPP seront fort importants. Le ministère des affaires sociales a quantifié – c'est, je crois, le seul à l'avoir fait – le volume des coûts induits, et ce dernier est très important.

Je voudrais à nouveau, comme je l'ai fait pour la GRH, insister sur la nécessité, au-delà de la RGPP, de prendre des mesures d'accompagnement, en partant de l'idée selon laquelle, on stabilise une fois pour toutes, le périmètre des ministères et, au sein de chacun d'eux, leur structure administrative. Si l'on continue, comme c'est le cas aujourd'hui, à avoir des modifications de périmètre, les coûts induits finiront par annihiler complètement les efforts de réduction de la dépense générée par la RGPP. Ce point est, à mon sens, majeur.

Deuxième exemple dans le domaine de l'immobilier : un pilotage est nécessaire pour contrôler enfin les dépenses d'entretien. Un rapport de l'Inspection générale des finances, datant de trois ans environ, indiquait concrètement que l'on pouvait économiser plus d'un milliard d'euros par an sur les coûts d'entretien.

Nous sommes actuellement, monsieur le ministre, dans une phase où le Conseil immobilier de l'État – le CIE – a le sentiment que les ministères tentent de reprendre en main la réforme que nous avons mise en place.

En premier lieu, les avis que nous rendons sont contestés et, dans bien des cas, ne sont pas suivis d'effets.

En second lieu, des structures, ministère par ministère, se montent, notamment des Foncières, pour essayer de court-circuiter les Domaines.

En troisième lieu, le pilotage que nous avons induit dans la réforme de 2005 a été un peu oublié.

Nous sommes bien conscients, monsieur le ministre, que dans ces deux domaines – la gestion des ressources humaines et l'immobilier d'État – des marges de manoeuvre existent et qu'il y aura, dans un premier temps, des surcoûts. Des mesures d'accompagnement sont nécessaires pour aboutir à un meilleur contrôle de la dépense publique, qui est notre objectif à tous. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

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