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Intervention de Jérôme Cahuzac

Réunion du 19 mars 2009 à 9h30
Projet de loi de finances rectificative pour 2009 — Après l'article 1er, amendement 80

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaJérôme Cahuzac :

En début de séance, un débat a commencé – mais il a vite été interrompu –, sur le point de savoir s'il était possible de déterminer qui, parmi nos concitoyens, était riche ou ne l'était pas. M. Copé a souhaité réactiver ce débat. Je crois que c'est une erreur car, sur nos bancs, nous ne considérons pas que vous êtes les défenseurs des riches. De même nous souhaiterions ne pas être considérés sur les bancs de la majorité comme ceux qui attaquent systématiquement les riches. (Exclamations sur les bancs du groupe UMP.) Nous valons et vous valez beaucoup mieux que cela.

S'il est facile aux deux extrémités du prisme de savoir qui, incontestablement, est riche et qui ne l'est pas, de manière tout aussi incontestable tracer une frontière entre ces deux catégories serait extrêmement compliqué.

Je comprends les raisons pour lesquelles M. Copé a souhaité réactiver ce débat, ce qui, à mon avis, ne fait pas forcément progresser les choses, en tout cas au sein de notre hémicycle.

Prétendre, comme le Gouvernement l'a indiqué, qu'il faudrait épargner les riches – en les imposant raisonnablement selon certains, afin d'éviter de trop imposer les pauvres – nous ramène à une définition au moins aussi compliquée à trouver que celle des riches. Objectivement, ce n'est pas le débat que nous devons avoir aujourd'hui dans notre enceinte. Ce n'est en tout cas pas celui que nous souhaitons avoir sur ces bancs avec nos collègues de la majorité.

À plusieurs reprises, il a été fait référence à la rétroactivité inadmissible de l'imposition. Cet argument me laisse un peu stupéfait. L'impôt sur le revenu est, par définition, rétroactif, puisque nous votons à la fin de l'année, des taux pour des revenus qui ont été constitués tout au long de cette année-là. Par définition, l'impôt sur le revenu est donc rétroactif. Cessons de prétendre que la rétroactivité en matière fiscale est inadmissible. Cela fait des dizaines d'années que notre République se satisfait d'un impôt qui rapporte, bon an, mal an, 50 milliards d'euros et qui, par construction, est rétroactif. Essayons, au moins, de ne plus avoir ce débat-là.

M. Copé a indiqué que le débat était déséquilibré. Je ne partage pas ce point de vue. Il est naturellement déséquilibré dans la mesure où il est peu douteux qu'une majorité se prononcera dans un sens, une minorité dans un autre, mais M. Copé ne faisait probablement pas allusion aux résultats des élections législatives.

Je vois donc mal en quoi ce débat serait déséquilibré.

En revanche, je vois bien ce qui est entrepris dans cet hémicycle. Une ligne a été fixée par le Président de la République Après tout, c'est son rôle. Cette ligne est assumée par le Gouvernement. Quoi de moins surprenant ? Si les ministres ne sont pas d'accord, ils ont toujours la possibilité de démissionner. De surcroît, cette démission est aujourd'hui sans risque, puisque, grâce à la révision constitutionnelle, nos collègues reviennent immédiatement sur les bancs de l'Assemblée.

Cette ligne est peut-être plus difficilement assumée par nos collègues de la majorité, en tout cas par certains d'entre eux et l'on en arrive à la question très épineuse du bouclier fiscal, à propos duquel il ne faut pas énoncer un certain nombre de contrevérités – ce qu'a fait M. Copé, je me permets de le lui dire très respectueusement – qui sont radicalement démenties par les propos, que je crois respectables, de M. Philippe Séguin ; démenties par des écrits que nous pouvons consulter, tout comme vous. Par exemple Mme Lagarde a fait référence au rapport du conseil des prélèvements obligatoires, comme M. Emmanuelli.

Selon ce rapport, monsieur Copé, signé et présenté par le Premier président de la Cour des comptes, l'exode fiscal a coûté, au pays, en 2006, 17,6 millions d'euros. C'est effectivement beaucoup, mais le bouclier fiscal coûte 460 millions. Pouvez-vous m'expliquer la légitimité d'une mesure qui coûte 460 millions et dont l'une des finalités, si j'en crois vos propos, est précisément d'éviter que nous n'en perdions 17,6 ?

Vous êtes un adepte de la culture du résultat. Vous souhaitez l'efficacité économique. Donc, entre 17,6 millions d'un côté et 460 millions de l'autre, le choix ne me semble pas très compliqué à faire.

Il faudrait, d'après vous, épargner les classes moyennes grâce au bouclier fiscal. J'ai cru comprendre que mes propos vous avaient irrité, puisque vous aviez cru bon de m'interpeller par une remarque, pour le moins troublante, qui faisait référence à la vitalité du camarade Staline, dont je ne me suis, pour ma part, jamais réclamé.

Je veux bien que l'on pense aux classes moyennes quand on parle du bouclier fiscal, mais pourquoi n'y avez-vous pas pensé plus tôt – je ne vais pas reprendre la liste que j'ai donnée tout à l'heure, car je suis sûr que vous vous en souvenez – alors que, depuis maintenant un peu moins de deux ans, vous avez créé pas moins de seize taxes supplémentaires, qui ne frappent précisément que les classes moyennes ?

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