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Intervention de Jean-Marie Le Guen

Réunion du 9 janvier 2008 à 21h30
Rétention de sûreté et déclaration d'irresponsabilité pénale pour cause de trouble mental — Article 1er

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaJean-Marie Le Guen :

Le débat que nous menons est tout à fait à l'honneur du Parlement, et, au-delà des dispositions qui seront votées, il permettra peut-être à une partie de la société – si certains consentent à écouter nos modestes interrogations – d'avancer dans sa propre réflexion.

Cela étant, je voudrais exprimer mon étonnement devant la contradiction entre deux argumentations.

Tout d'abord, notre rapporteur nous dit, avec le soutien de Mme la garde des sceaux, que si nous parlons de la santé, c'est hors sujet. Le texte porterait sur le système pénitentiaire et sur un problème de structures juridiques. On ne s'intéresse d'ailleurs pas tant aux criminels qu'aux récidivistes criminels, ce qui n'est pas exactement la même chose – mais un récidiviste, cela suppose tout de même qu'il a d'abord été l'auteur d'un premier acte criminel. Notre rapporteur nous dit donc que nous sommes dans une logique pénitentio-pénitentiaire, judicio-judiciaire, qu'il faut y rester et qu'il n'est pas question de parler de santé publique. De plus, Mme la garde des sceaux nous a rappelé que nous sommes intervenus lors du débat sur le texte relatif à la prévention de la délinquance, au printemps dernier, pour nous plaindre du renforcement des contraintes liées à l'hospitalisation d'office. Dont acte. Le ministre de l'intérieur de l'époque, qui n'était pas sans avoir une certaine force de conviction, a tout de même dû retirer cinq articles de son projet de loi après que nous eûmes bataillé sur cette question.

En effet, chaque fois que nous examinons un texte ayant un impact sur la santé publique, les forces de l'ordre public, qu'il s'agisse du ministère de l'intérieur ou du ministère de la justice – pour une fois rassemblés –, interviennent pour demander un renforcement de leurs prérogatives par rapport à l'appareil sanitaire. Ils croient agir ainsi en fonction des demandes de celui-ci, mais ils se trompent, ils mettent à bas certaines normes déontologiques et d'approche pratique. Ils devraient plutôt se tourner vers l'appareil de santé publique pour l'interpeller. Après avoir obtenu du ministre de l'intérieur, au printemps dernier, qu'il retire cinq articles de son projet de loi, nous n'osons pas en espérer autant aujourd'hui, même si nous aimerions que vous reconsidériez votre projet de loi parce que, une fois encore, vous empiétez sur le domaine de la santé publique.

Ensuite, M. Dhuicq expose un certain nombre de considérations, justes du point de vue scientifique. Mais je n'interrogerai pas Mme la garde des sceaux sur ce qu'elle pense de la DSM 4 et des normes de l'OMS, ni sur le point de vue du gouvernement français à propos de la réforme des normes de la DSM 5, parce que, s'agissant de santé mentale et de psychiatrie, les sujets dont nous parlons ne sont pas mesurés par la biochimie ou par la radiologie avec des isotopes – fussent-ils du cerveau ! Nous n'en sommes pas encore là – n'est-ce pas, Bernard Debré ? –, nous nous situons seulement aux confins des sciences humaines. Dès lors, est-il légitime de valider la catégorie scientifique dont vous avez parlé, monsieur Dhuicq, c'est-à-dire celle regroupant des individus pervers qui ne seraient pas des malades mentaux, mais qui auraient des comportements de leur propre point de vue irrépressibles ? Bref, vous faites une description mystique du mal absolu. (Protestations sur de nombreux bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.) Il s'agit de personnes qui auraient des comportements nécessairement criminels, non pas par intérêt ou par pathologie, mais par essence.

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