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Intervention de Laurent Hénart

Réunion du 23 juillet 2007 à 21h45
Libertés et responsabilités des universités — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaLaurent Hénart :

Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, je ne dirai que quelques mots sur cette loi qui, à mon sens, est une loi de progrès.

Madame la ministre, vous vous attaquez, pour commencer, à la réforme qui était la plus mûre dans l'esprit de la communauté universitaire et de ses partenaires, ainsi que des parlementaires, comme en témoigne l'excellent rapport de M. Claeys et M. Bouvard, rédigé en juin 2006. Ce rapport, adopté à l'unanimité, tant de la mission d'évaluation et de contrôle que de la commission des finances, forme le socle de ce projet de loi.

Mais celui-ci va plus loin, puisqu'il propose une architecture efficace, fort bien décrite par notre rapporteur. Celle-ci définit des responsabilités claires. Il prévoit, d'un côté, un président rééligible, aux pouvoirs renforcés. À cet égard, le mode de scrutin choisi, sur le modèle des élections municipales, me paraît de nature à permettre au président de conduire un mouvement politique dans son université, afin que le contrat soit encore plus clair au soir de son élection. De l'autre côté, le texte prévoit un conseil d'administration resserré, aux pouvoirs renforcés.

Je tiens d'ailleurs à souligner les avancées du projet de loi vis-à-vis du rapport de la MEC. Le projet d'établissement universitaire est pris par le conseil d'administration, lequel crée les UFR, ce qui n'était pas envisagé par la MEC. Autant de manières de lui donner un poids réel et incontournable dans l'animation de l'établissement.

Face à ces pouvoirs, les décisions se prendront dans la transparence, avec le contrepoint de l'État. Tout est public, en effet, dans les délibérations des instances. Le contrôle de légalité du recteur sera effectué de manière annuelle. Quant au contrepoint de l'État, la politique contractuelle prendra, je l'espère, un nouveau tour. L'État disposera ainsi d'une meilleure évaluation en matière de recherche et d'insertion professionnelle des étudiants, comme il pourra aussi affiner ses critères de péréquation. Ainsi, l'intégration de données socio-économiques permettra aux universités qui consentent, pour recruter leurs étudiants, un effort en matière de diversité socioculturelle, d'être payées de retour par la dotation d'État. (« Très bien ! » sur plusieurs bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

C'est là un point essentiel qu'il fallait aborder, avant d'ouvrir des chantiers plus difficiles à délimiter, comme les cinq qui ont été énumérés et qui nécessitent une longue concertation, ainsi que des moyens. Il fallait revoir les règles du jeu. Voilà quinze ans maintenant que nous parlons de la gouvernance des universités et que nous souhaitons que les nôtres soient pilotées comme les autres grandes universités européennes.

C'est pourquoi il est bon de commencer par ce point. Vous montrez ainsi, madame la ministre, la volonté du Gouvernement d'agir avec ambition. Vous donnez aussi aux universités les moyens de participer à ce mouvement au rythme qu'elles choisiront, au cours des cinq années qui viennent. Vous posez ainsi la première pierre de l'édifice.

J'ai été particulièrement sensible au fait que, dans ce projet de loi, vous ajoutiez, aux missions de l'université, l'insertion professionnelle des étudiants. Certes, l'université a pour but la recherche, l'innovation et le transfert des savoirs. Mais, nous mesurons, quand nous recevons dans nos permanences des étudiants et leurs parents, que, dans l'esprit de nos concitoyens, l'université a aussi pour but de favoriser, par des diplômes toujours plus élevés, l'accès à l'emploi et de le rendre plus rapide et plus sûr.

Or, depuis 2000, les statistiques du CEREC, produites conjointement par le ministère de l'éducation nationale et celui du travail, montrent bien qu'il n'en est rien. Parfois, il vaut mieux être titulaire d'un DUT spécialisé et professionnalisé que d'une maîtrise générale ou d'un master de recherche.

De ce point de vue, un effort important doit être fait. À cet égard, madame la ministre, je rejoins vos propos sur la sélection, ou plutôt sur le fait qu'une sélection par numerus clausus n'est ni républicaine ni efficace. Dans le domaine de la santé, notamment, l'État maîtrise le numerus clausus ; mais l'expérience a montré qu'il n'était pas nécessairement à même de pronostiquer les débouchés professionnels qu'offrent les filières.

Je crois plutôt à la professionnalisation des études, que nous devons organiser ensemble, en rendant plus transparents les débouchés professionnels des diplômes, comme nous y a invité Mme Rosso-Debord. Un décret de 1986 prévoit la publication de ce qu'on appelle le « placement » des diplômes, c'est-à-dire le taux d'emploi, un ou trois ans après l'obtention du diplôme. Or, dans la quasi-totalité des universités, ce décret, pris il y a vingt et un ans, n'est pas appliqué.

La première chose est de donner aux étudiants une information dans ce domaine. Ils pourront ainsi s'inscrire en connaissance de cause. La seconde est d'allouer des moyens afin que l'université puisse offrir des filières en alternance. Je crois beaucoup à ce moyen d'apporter aux étudiants une expérience professionnelle. Non seulement ils pourront vérifier qu'ils sont bien faits pour le secteur professionnel vers lequel ils s'orientent. Mais surtout, c'est le meilleur moyen de rapprocher l'offre de formation et les besoins des employeurs privés et publics.

Tout ce qui pourra soutenir le développement de l'alternance dans l'université sera bienvenu. Ce doit être une des priorités de la contractualisation de l'État.

Enfin, en même temps que vous allez développer l'aide sociale et consolider le statut social des étudiants – ce qui est nécessaire –, il faut continuer à faciliter, pour eux, l'exercice d'une profession, notamment l'activité professionnelle à temps partiel, qui leur offre un bon moyen non seulement de découvrir la vie professionnelle dans la filière dans laquelle ils préparent leur diplôme, mais aussi, plus largement, de se confronter à la réalité du travail.

Tout cela ne se fera pas sans moyens supplémentaires. Le chef de l'État a d'ailleurs annoncé un objectif de 50 % d'augmentation des crédits, et je souhaite que cet objectif quinquennal soit fixé dans le cadre d'une loi de programmation. L'Assemblée assurerait ainsi une meilleure lisibilité de ses travaux et garantirait l'efficacité de la réforme qu'elle vote aujourd'hui.

L'autonomie elle-même aura besoin d'être alimentée par des emplois de catégorie A, c'est-à-dire des emplois qualifiés. Nous aurons d'autant plus de mérite à la permettre, avant d'ouvrir d'autres chantiers et de les conduire à terme, que nous le ferons dans le cadre d'une programmation annoncée, concertée et dont le Parlement se portera garant. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

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