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Intervention de Valérie Rosso-Debord

Réunion du 28 mai 2009 à 15h00
Statut de la société privée européenne et services sociaux d'intérêt général dans l'union européenne — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaValérie Rosso-Debord :

Je souhaite que nous soyons sobres : nous y gagnerons en efficacité.

Ce rapport a déjà été présenté en commission des affaires économiques et le sera, le 10 juin, en commission des affaires sociales.

Cette proposition est fondée sur divers constats. Premier constat : les services sociaux d'intérêt général se situent au coeur du modèle social européen. Au-delà de la diversité des systèmes nationaux, qui est tout particulièrement sensible en matière sociale, il existe une spécificité européenne, un modèle social, par comparaison avec l'Amérique du Nord et avec les pays en voie de développement. Au sein de ce modèle, les services sociaux d'intérêt général tiennent une place centrale. Leur rôle est d'ailleurs encore plus essentiel dans le contexte actuel de crise, d'autant que, par leur nature de services de proximité, ils constituent un secteur relativement protégé.

Deuxième constat : le régime actuel des SSIG apparaît à la fois complexe et inapproprié. Cette situation s'explique par le fait que le droit communautaire n'a que tardivement pris en compte la spécificité des services d'intérêt économique général. Correspondant en partie à la notion française de « services publics », ils recouvrent à la fois les activités de service non économiques, qui incluent des activités régaliennes, telles que la justice ou la police, et les activités de services de nature économique, telles que l'électricité, les services postaux, l'eau, les transports ou les télécommunications.

Les SIEG n'ont longtemps été considérés, en vertu du traité de Rome, que sous l'angle du droit de la concurrence. Ce n'est qu'en 1997, avec le traité d'Amsterdam, qu'il a été admis qu'ils figuraient parmi « les valeurs communes de l'Union » et qu'ils jouaient un rôle dans « la promotion de la cohésion sociale et territoriale ». La possibilité était ainsi offerte d'écarter, le cas échéant, les règles du marché intérieur, afin que ces services puissent accomplir leur mission et bénéficier d'une compensation, notamment sous forme de subvention, en contrepartie des obligations de service public qui leur incombent.

Après des hésitations jurisprudentielles, comme l'a rappelé M. Caresche, le régime des compensations de service public a été précisé par un arrêt Altmark et par le paquet Monti-Kroes qui fixe les conditions pour qu'une compensation ne soit pas considérée comme une aide d'État. Néanmoins, il faut en convenir, le dispositif demeure beaucoup trop lourd et disproportionné pour des opérateurs de petite taille qui ont du mal à procéder à l'ensemble des vérifications.

Troisième constat : de nombreuses voix plaident pour une clarification, mais les annonces d'initiative législative sont pour l'heure restées sans suite. À plusieurs reprises depuis 2006 – M. le rapporteur l'a également indiqué – et tout récemment encore dans un rapport du 31 mars dernier, le Parlement a pourtant invité la Commission à clarifier le droit applicable aux SSIG. Ces demandes ont été relayées par le comité des régions, le comité économique et social européen et, en France, par le Conseil économique et social.

Dans ces conditions, il faut se féliciter que la présidence française ait pu obtenir, en décembre dernier, l'adoption par le Conseil d'une feuille de route sur les SSIG. La perspective d'une intervention législative n'émerge donc qu'avec lenteur. Il est vrai qu'il est difficile de trouver, tant au sein de la Commission que du Conseil, une majorité sur ces questions. Or l'absence de cadre juridique spécifique, c'est-à-dire l'application à ce secteur du droit commun, en quelque sorte à titre résiduel, outre qu'elle est vécue comme une absence de reconnaissance à son égard, a pour principale conséquence d'entériner une situation dans laquelle les procédures autres que la compensation de service public semblent juridiquement plus sûres, favorisant ainsi une régulation par le marché.

La proposition de résolution de notre commission chargée des affaires européennes a suggéré plusieurs formulations de nature à résoudre ces difficultés. Ces propositions sont d'abord de nature juridique, puisqu'il est possible d'adapter le droit national, afin de clarifier le droit communautaire.

En ce qui concerne l'adaptation de notre droit interne, la future transposition de la directive Services constituera l'occasion de qualifier les SIEG en tenant compte de la diversité du secteur, de compléter la notion de mandat et d'introduire la nouvelle catégorie des « associations caritatives reconnues ». Il faudra être tout particulièrement vigilant à ce que les secteurs qui demeureraient inclus dans le champ de la directive Services n'en soient pas moins définis comme des SIEG. Il faut éviter en même temps qu'ils soient exclus de toute notion de mandatement. En effet, si tel était le cas, le bénéfice du régime prévu par le paquet Monti-Kroes pourrait leur être dénié et, par conséquent, leurs financements publics pourraient être remis en cause.

S'agissant maintenant de la clarification du droit communautaire, sur laquelle la Commission et un groupe de travail du Conseil doivent remettre leurs propositions d'ici à la fin de l'année, la priorité doit porter sur les modalités de contrôle des compensations de service public. Aujourd'hui, en effet, non seulement le contrôle est obligatoire, mais les collectivités doivent prouver que la compensation qu'elles versent n'est pas excessive. Afin que la procédure ne soit déclenchée qu'en cas de risque d'atteinte dommageable à la concurrence et de lever ainsi les incertitudes pesant sur les petits opérateurs, il faudrait passer à un contrôle a posteriori.

Au-delà, l'intervention du législateur communautaire permettrait d'accorder aux services concernés la reconnaissance du rôle essentiel qui est le leur. La perspective d'une telle intervention doit cependant s'accompagner, dès aujourd'hui, d'une vigilance toute particulière quant au respect du principe de subsidiarité, compte tenu de la sensibilité des États membres sur ces questions.

Dans cet esprit, le respect de la compétence nationale en matière de SIEG figure explicitement dans le traité de Lisbonne. Bien évidemment, tout particulièrement sur de tels sujets, l'approche ne saurait être exclusivement juridique et doit donc également revêtir une forte dimension politique.

Sur la base des acquis de la présidence française, des auditions du Parlement européen préalable à la nomination de la future commission européenne et, le cas échéant, du protocole du traité de Lisbonne doivent avoir lieu sur les SIG. Une législation européenne pourrait en être issue : elle devra respecter le principe de subsidiarité et les actuels équilibres de la France concernant les associations.

Voici ce que nous avons adopté ensemble, à l'unanimité, avec mes collègues du groupe socialiste. Aussi, monsieur Dolez, permettez-moi de vous dire que nous faisons tous ici de la politique et que nous comprenons donc parfaitement le petit jeu qui consiste à essayer d'introduire, au sein de notre assemblée et à quelques jours des élections européennes, un débat qui n'a pas lieu d'être.

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