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Intervention de Annick Le Loch

Réunion du 16 juin 2009 à 15h00
Développement et modernisation des services touristiques — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaAnnick Le Loch :

Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'État, chers collègues, il était temps et même urgent de s'attaquer au chantier du développement et de la modernisation de nos équipements touristiques. Il était même d'une importance vitale, en cette période de crise économique, de renforcer un secteur stratégique de l'économie française, représentant près de 2 millions d'emplois et 6 % du PIB. Nous le savons, notre patrimoine historique, culturel et naturel est un atout exceptionnel, mais nous devons avoir en permanence le souci de le valoriser sous peine d'être dépassés et de voir les touristes préférer d'autres destinations. Cela suppose une adaptation constante de nos équipements, en même temps qu'une amélioration qualitative de notre offre touristique.

Le tourisme – c'est en tout cas la vision qui sous-tend les interventions et les amendements socialistes – a une dimension humaine, sociale et durable ; il joue un rôle décisif dans l'aménagement des territoires et la valorisation des espaces ruraux. Ce texte est donc bienvenu et utile mais, malgré les corrections apportées par le Sénat et la commission des affaires économiques de notre assemblée, il convient de l'améliorer encore largement, d'autant plus que le Gouvernement a introduit en commission plusieurs amendements, concernant notamment la TVA, les enceintes sportives et les casinos.

Quels sont les aspects qu'il convient de préciser pour que la loi soit vraiment utile ? J'en évoquerai simplement trois. À l'article 6, vous créez une agence de développement touristique. Vous avez entièrement réécrit cet article en commission : cela témoignerait-il d'une certaine insatisfaction de votre part à l'égard du texte initial ? Malgré cette nouvelle rédaction, des doutes subsistent quant au fonctionnement de cet organisme, issu de la fusion d'ODIT France et de Maison de la France. Quels seront exactement les moyens alloués à ce groupement d'intérêt économique auquel vous confiez des pouvoirs et des missions très importants ?

Ce projet de loi porte l'ambition du développement touristique, mais on peut s'interroger sur les moyens qui vous permettront d'agir concrètement. Dans le projet de loi de finances pour 2009, le programme « Tourisme » voit ses crédits baisser de 10,6 % en autorisations d'engagement et de 8,3 % en crédits de paiement. Combien d'agents travailleront au service de l'agence, désormais opérateur national unique ? Quelle part sera réservée aux missions d'intérêt général et quelle part aux autres missions de l'agence, comme la prospective et la stratégie, comment s'effectueront l'intégration de la direction du tourisme dans une direction générale plus vaste, l'intégration des directions régionales dans une direction régionale aux compétences élargies ? On comprend que vous poursuivez une logique de révision générale des politiques publiques, de regroupement des services de l'État et d'efficacité de l'action publique, mais se pose tout de même la question de l'articulation entre toutes ces structures et du besoin de visibilité de l'action publique en faveur du tourisme.

Dans tout cela, monsieur le secrétaire d'État, que devient le plan Qualité tourisme mis en oeuvre par votre prédécesseur ?

Dans le deuxième volet du texte, consacré à la rénovation et à la modernisation de l'offre d'hébergement, de nombreuses améliorations et précisions sont possibles. Je pense tout d'abord à certains aspects du classement des équipements touristiques. Des incertitudes sur la répartition des responsabilités demeurent. À qui l'organisme évaluateur adressera-t-il le certificat de visite ? Quel rôle précis jouera l'autorité préfectorale ? Les décisions seront-elles systématiquement transmises à l'agence de développement touristique ? Sans rendre le classement immédiatement obligatoire et quels que soient les types d'hébergement, compte tenu des difficultés que cela engendrerait pour nombre de petits établissements, ne faudrait-il pas prévoir au moins un délai au-delà duquel une évaluation deviendrait inévitable ?

Pour les maisons d'hôtes et les meublés, on ne peut pas se contenter non plus de la situation actuelle, avec des établissements échappant à toute évaluation et à tout classement : 170 000 meublés sont aujourd'hui classés sur plus de 2,5 millions. La coercition n'est sans doute pas la méthode la plus efficace, mais il faut que cette loi fixe des objectifs de résultats dans ce domaine, que la représentation nationale pourra contrôler à intervalles réguliers sur la base d'un rapport.

Indépendamment de la question du classement se pose aussi la question de la mise aux normes de certains établissements. En effet, comment faire la promotion d'une destination sans avoir l'assurance que son offre d'hébergement est de qualité ?

Enfin, les députés socialistes auront à coeur d'améliorer le titre III du projet de loi visant à favoriser l'accès aux séjours touristiques. « Travailler plus pour gagner plus » ne résume pas une vie. La possibilité de partir en vacances, le droit de découvrir d'autres lieux, de voir la montagne, la mer ou la ville sont au moins aussi importants pour la construction d'un individu ou tout simplement pour son bien-être.

C'est la raison pour laquelle nous proposerons plusieurs amendements portant sur l'extension et le financement des chèques-vacances ou sur l'introduction d'une plus grande souplesse dans les contrats de jouissance d'immeubles à temps partagé. Les possibilités pour sortir d'un contrat de temps partagé sont encore trop restrictives. De nombreuses personnes se retrouvent aujourd'hui en grande difficulté financière et morale, bloquées dans des contrats dont elles ne peuvent plus assurer la charge.

Plus largement, au travers de ces préoccupations et de tous nos amendements, s'exprime notre souci d'introduire dans le texte, aussi souvent que possible, des améliorations sur les plans social et environnemental, comme la formation professionnelle, le recours aux chèques-vacances, la procédure de réhabilitation de l'immobilier de loisir en cohérence avec le Grenelle de l'environnement, et le conditionnement de la baisse de la TVA par la signature d'un accord de branche et la baisse effective des prix.

La baisse de la TVA à 5,5 % sans véritable contrepartie, sans condition préalable réelle, contraignante, inscrite dans la loi, sera économiquement inefficace et socialement injuste. C'est un enjeu majeur de ce texte. Je veux donc y insister.

En mars dernier, la France a obtenu le feu vert de ses partenaires, notamment allemands, pour appliquer à la restauration et à l'ensemble des activités intensives de main-d'oeuvre un taux réduit de TVA. La fixation du taux à 5,5 % sera effective le 1er juillet prochain. En période de crise des finances publiques, la question de l'opportunité budgétaire d'une telle mesure pourrait être légitimement soulevée mais, aujourd'hui, le débat est dépassé puisque la décision est déjà prise et que le législateur est mis en quelque sorte devant le fait accompli.

Pour plusieurs mesures contenues dans ce texte, on peut d'ailleurs s'interroger sur le rôle de la loi et sur l'intérêt que vous portez au travail du Parlement : la baisse de TVA est déjà annoncée, le passage aux 5 étoiles est déjà effectif, l'agence de développement touristique a déjà réuni son conseil d'administration.

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