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Intervention de Jean-Jacques Candelier

Réunion du 16 juin 2009 à 15h00
Loi de programmation militaire pour les années 2009 à 2014 — Explications de vote

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaJean-Jacques Candelier :

Monsieur le président, monsieur le ministre, monsieur le secrétaire d'État, chers collègues, nous arrivons au terme du débat sur le projet de loi de programmation militaire. Celui-ci est particulièrement dangereux.

Dangereux, il l'est pour nos libertés publiques, à travers son approche ultrasécuritaire et la réforme du secret défense, fruit d'un laborieux marchandage réalisé entre le président de la commission de la défense et celui de la commission des lois.

Mais dangereux, il l'est surtout pour nos concitoyens : nouvelles bombes atomiques, sous-marins et avions d'attaque, nouveaux moyens de projection pour les opérations extérieures, comme en Afghanistan, ou encore, relance de la vente d'armes dans le monde…

Au total, 186 milliards d'euros seront en grande partie investis dans la guerre et la prolifération de nouvelles armes, alors que les caisses sont déclarées vides quand il s'agit de résoudre les difficultés de notre population.

De plus, nous pensons que la crise mériterait que l'on reconsidère le dogme de la suppression de postes dans la fonction publique. Au lieu de cela, ce projet organise un gigantesque plan social de 54 000 postes. À cause de la RGPP, le ministère de la défense, pourtant régalien, serait même progressivement démantelé.

En fait, au nom de notre intégration dans l'Europe capitaliste, on abandonne des pans entiers de maîtrise publique dans les secteurs du soutien, de la production industrielle et du maintien en condition opérationnelle. On prépare la privatisation de nos fleurons nationaux, DCNS et SNPE, et on accroît le recours aux partenariats public privé.

Toute la philosophie européenne, à l'inverse de la nécessaire maîtrise publique, consiste à désengager les États de leur propre outil de défense, afin d'ouvrir la voie à un juteux marché des armes et de créer des alliances industrielles mondiales pour satisfaire l'appétit des actionnaires.

Car au fond, c'est encore et toujours de la défense des intérêts privés des grands groupes capitalistes dont il s'agit, intérêts requalifiés au passage « intérêts vitaux de la nation », dans le langage diplomatique officiel.

Au nom de la lutte contre le terrorisme d'inspiration djihadiste et de notre intégration dans l'OTAN, ce projet de loi, non content de faire de la représentation nationale la représentante des intérêts privés du lobby des armes, entend également nous aligner sur ses logiques de guerre.

L'installation récente de notre base militaire à Abou-Dhabi, face à l'Iran, marque par ailleurs une nouvelle étape de la politique arrêtée par Nicolas Sarkozy. Première base française créée à l'étranger depuis la fin de l'ère coloniale, celle-ci préfigure, dans un endroit stratégique, car hautement pétrolifère, une possible participation française à des frappes américaines ou israéliennes. Ce positionnement est un recul historique qui illustre la place que le Président entend donner à la France, celle d'une France devenue la sous-traitante des États-Unis.

Par ailleurs, en dépit des voeux pieux sur le nécessaire multilatéralisme, la prévention et le désarmement, le nucléaire reste la clef de voûte de notre stratégie de défense nationale. Celui-ci représente un gouffre financier d'environ 11 millions d'euros par jour.

Nous pensons que le moment est venu d'agir résolument contre la prolifération nucléaire mondiale, source de tous les dangers et de toutes les tensions et d'oeuvrer à la fin progressive et multilatérale du nucléaire militaire ainsi qu'à la dissolution des blocs militaires.

Nous sommes conscients qu'une sécurité durable ne pourra voir le jour que par la satisfaction des besoins vitaux et par des rapports internationaux de coopération et de dialogue dans le cadre du droit international. Cela suppose de considérer que l'autre n'est pas forcément un ennemi et que les plus forts n'ont pas nécessairement raison.

Le seul motif de réjouissance possible aurait pu être l'accent mis sur le renseignement. Or la création du «Conseil national du renseignement » auprès du seul Président de la République illustre à nouveau l'actuelle dérive présidentielle.

Nous constatons qu'en matière de défense, la fameuse «rupture », c'est surtout la rupture à l'américaine entre la nation et sa défense, la rupture avec les personnels du ministère et des industries de défense et la rupture avec la paix.

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