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Intervention de François Pupponi

Réunion du 13 mai 2009 à 15h00
Développement économique des outre-mer — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaFrançois Pupponi :

Monsieur le président, messieurs les secrétaires d'État, mes chers collègues, le débat sur le projet de loi pour le développement économique des outre-mer a été riche, constructif et ouvert. Au-delà des considérations partisanes, le Gouvernement a accepté certains de nos amendements, ce dont nous nous réjouissons. Au final, certaines avancées, comme les exonérations de charges sociales ou la reconnaissance de la langue créole, sont satisfaisantes.

Pourtant, il est évident que le projet de loi ne répond ni à l'urgence de la situation de l'outre-mer ni à l'attente légitime de nos concitoyens ultramarins. C'est qu'il n'est pas à la hauteur des enjeux, notamment financiers, que la crise a rendus encore plus cruciaux, comme l'a révélé le grand mouvement social qui a eu lieu dernièrement dans ces territoires. La déception est d'autant plus grande que ce projet était attendu depuis fort longtemps et qu'il avait été annoncé par le candidat Sarkozy. Il aura finalement mis près de deux ans pour venir en discussion au Parlement. Quand bien même une rallonge budgétaire a été consentie, les crédits, en baisse, se révèlent bien insuffisants.

Le projet de loi ne répond pas à l'urgence de la situation, car on était en droit d'attendre un texte spécifique, ambitieux et doté de moyens à la hauteur des enjeux, pour des territoires spécifiques de notre République – spécifiques en raison de leur insularité et de leur éloignement du continent, spécifiques car, même si ces territoires connaissent une relative amélioration sur certains points, avec le ralentissement du chômage, la situation reste délicate et plus dégradée que dans l'hexagone, avec un taux de chômage plus élevé – 22 % –, un retard et une dépendance en matière économique.

Le Président de la République souhaite tendre vers l'autosuffisance de ces territoires, ce qui est légitime. Mais, si le développement endogène peut être un objectif à long terme, il n'est pas incompatible avec la prise en compte, dans nos politiques publiques, du caractère spécifique de ces territoires et ne doit pas lui être opposé.

En ce qui concerne le secteur essentiel du logement, nous redisons fortement qu'une politique de défiscalisation, même si elle offre des moyens supplémentaires, ne suffit pas à satisfaire les besoins. Le financement privé du logement ne remplacera jamais ni l'investissement public ni une véritable politique de logement social. C'est sur la question même de la stratégie que nous menons dans ces territoires que nous devons nous interroger. Les chiffres sont, en effet, très inquiétants. Dans un contexte de hausse démographique où la demande explose et où l'offre s'effondre, comme le rappelait Jean-Yves Le Bouillonnec, 21 910 logements autorisés ont été produits dans les DOM en 2000, contre seulement 16 127 en 2007 ; 11 303 logements ont été réalisés avec les financements de l'État en 2003, contre 7 713 en 2007. En outre, de 6 035 logements locatifs sociaux en 2000, nous sommes passés à 2 365 en 2006. Pour rattraper le retard accumulé en huit ans, il faudrait en construire 60 000.

Dès lors, le risque est grand que la politique de défiscalisation prônée dans votre projet de loi ne masque en réalité le désengagement financier de l'État. Aussi relançons-nous l'idée d'un ANRU exceptionnel, au même titre que le plan national de renouvellement urbain dans nos banlieues, que le programme national de requalification des quartiers anciens dégradés, ou encore d'une loi de programmation sur le logement et l'aménagement du territoire pour les départements et territoires d'outre-mer, afin de rattraper le retard historique qui les affecte.

Tant que l'on ne comprendra pas que ces territoires ont des besoins spécifiques, qui nécessitent des politiques particulières et des moyens extraordinaires, tant que l'on continuera à modifier les dispositifs qui fonctionnent et à réinventer l'eau salée à chaque nouveau projet de loi, au risque de rendre les investisseurs frileux et de décontenancer les acteurs locaux, on ne parviendra pas à résoudre les problèmes de ces territoires qui ont besoin de suivi, de continuité et d'un volontarisme fort. Or, je le répète, c'est l'avenir de notre République qui se joue dans ces territoires relégués.

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