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Intervention de Jean-Claude Fruteau

Réunion du 13 mai 2009 à 15h00
Développement économique des outre-mer — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaJean-Claude Fruteau :

Monsieur le président, messieurs les secrétaires d'État, mes chers collègues, le projet de loi relatif au développement économique des outre-mer arrive aujourd'hui au terme du processus législatif.

Ce débat clôt ce qui est désormais présenté, en raison de la forte poussée de fièvre sociale ultramarine, comme la première étape de la réforme de l'action de l'État en faveur des outre-mer. L'examen par le Sénat avait permis quelques progrès. Le travail réalisé par notre assemblée, grâce à l'esprit de dialogue et d'ouverture qui a animé nos débats – et que je me plais à souligner, monsieur le secrétaire d'État, parce que vous n'y êtes pas étranger – a consacré un certain nombre de dispositions qui améliorent ce projet de loi de manière significative.

Ces avancées, quelles sont-elles ? Je commencerai bien évidemment par celles qui me tiennent particulièrement à coeur, notamment la valorisation de la bagasse comme biomasse qui, dans ce texte, trouve toute la reconnaissance qu'elle mérite et ouvre de réelles perspectives de développement endogène. En effet, l'article 27 A, pour le cas particulier de La Réunion, permettra la consolidation de l'ensemble de la filière canne-sucre-rhum-bagasse dans la perspective des échéances futures qui sont incertaines. Je resterai néanmoins très vigilant sur ce sujet, puisque l'effectivité des dispositions adoptées repose sur la publication d'un décret – publication que j'espère rapide.

D'autres avancées dans le domaine du logement peuvent être soulignées. Je pense notamment à la sacralisation de la ligne budgétaire unique comme socle privilégié du financement du logement social ou aux progrès effectués entre la version initiale du projet et ce texte sur la défiscalisation maintenue pour les primo-accédants.

Dans le domaine de la téléphonie fixe et mobile, ainsi que dans celui des nouvelles technologies de l'information et de la communication, si ce projet ne contient pas de progrès immédiats pour nos populations, il ouvre néanmoins la porte au rétablissement de la justice sociale due à nos territoires. À titre personnel, je serai attentif aux suites qui résulteront de l'adoption de ces dispositions.

Dans d'autres domaines, des progrès sont également à noter : je pense à la place faite à la pharmacopée ultramarine et à la reconnaissance des langues créoles comme appartenant au patrimoine national.

Toutefois, malgré l'intégration de ces points positifs, je ne peux m'empêcher d'avoir des doutes et des regrets.

Parlons d'abord des doutes. Le Gouvernement fait des paris osés, tant sur le volet économique de la loi – c'est un choix politique que je ne partage pas – que sur la réorientation de la défiscalisation en faveur du logement social. Je déplore au passage la disparition, dans le texte issu de la CMP, de la sécurisation juridique adoptée par notre assemblée quant au cumul LBU-défiscalisation : il s'agissait pourtant d'une demande fortement exprimée par l'ensemble des acteurs intervenant dans ce domaine, compte tenu des contradictions qui entachent la législation.

J'éprouve également quelques regrets. La crise qui a secoué nos territoires, malgré l'apparence de calme retrouvé, pèse toujours lourdement sur le fragile équilibre de la paix sociale dans les outre-mer. Or ce texte n'apporte pas de réponse concrète aux principales revendications. Ainsi refuse-t-on toujours la régulation impérative des prix des produits de première nécessité, qui figure pourtant parmi les principales revendications des collectifs. Nos économies n'ont jamais connu, et ne connaîtront probablement jamais, une situation de concurrence pure et parfaite, en raison de nombreux facteurs naturels, et je doute fort que les signes de bonne volonté sur les prix des produits de première nécessité, arrachés par la pression de la rue, perdurent très longtemps. À mon sens, la régulation était impérative : je déplore donc cette occasion manquée.

Le volet social est le grand absent de ce texte, alors même que les attentes et la détresse sociale n'ont jamais été aussi fortes. On nous promet que le second volet législatif – dont on ne connaît bien évidemment pas le calendrier – apportera les réponses tant attendues par les populations grâce notamment aux conclusions des états généraux. Je l'espère vivement, monsieur le secrétaire d'État, mais permettez-moi, là aussi, de nourrir de sérieux doutes, tant est laborieux le démarrage de ces états généraux, qui sont d'ailleurs déjà contestés par les collectifs. Je crains par ailleurs que ces travaux ne fassent fausse route en se focalisant sur les questions institutionnelles, car les attentes premières des populations portent beaucoup plus sur la formation et l'insertion professionnelle, la place des jeunes dans le marché du travail, l'avenir de la santé, de l'éducation, l'évolution du pouvoir d'achat, la capacité à trouver un logement.

Face aux enjeux en présence, les parlementaires de l'opposition ont pris toutes leurs responsabilités dans les débats relatifs à la LODEOM. Désormais, il incombe au Gouvernement de prendre les siennes pour une présentation aussi rapide que possible de ce second projet de loi qui, je l'espère vivement, apportera des réponses concrètes aux préoccupations quotidiennes de nos populations. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

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