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Intervention de Patrick Bloche

Réunion du 12 mars 2009 à 15h00
Protection de la création sur internet — Article 2

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaPatrick Bloche :

Cet article 2, article central de ce projet de loi, vise à créer une usine à gaz, une raffinerie pétrolière, une monstruosité juridique, bref, un nouveau machin, présenté abusivement comme un dispositif pédagogique et dissuasif alors qu'il s'agit en réalité d'un dispositif répressif et disproportionné.

L'avis de la Commission européenne, le vote par le Parlement européen à une très large majorité d'une résolution, reprise dans l'amendement n° 46 , démontrent l'isolement de la France, de manière presque caricaturale.

Vous avez évoqué tout à l'heure le cas de la Nouvelle-Zélande, insistant sur le fait que l'absence d'une concertation analogue à celle ayant abouti aux accords de l'Élysée avait conduit à retarder la mise en oeuvre du dispositif. Vos propos m'ont interpellé et j'ai voulu relire votre audition devant la commission des lois : vous souligniez que le nombre de téléchargements en Nouvelle-Zélande avait baissé depuis qu'avait été mis en place le système de la riposte graduée. Cela a évidemment quelque chose de drôle, je le dis en souriant et sans esprit polémique, car ce système n'a toujours pas été mis en oeuvre, le Premier ministre néo-zélandais en ayant suspendu l'application.

Nous avons tous lu l'avis rendu par l'ARCEP et l'avis rendu par la CNIL. J'entends ici ou là que ce dernier aurait été satisfait par les discussions au Sénat. Notre rapporteur nous expliquera sans doute qu'il a quelques amendements dans la poche la main qui finiront de régler tous les problèmes. Il n'en est rien ! Beaucoup des interrogations de la CNIL restent en suspens et j'espère que l'adoption de nos amendements permettra d'y apporter des réponses.

La création de cette nouvelle Haute autorité, outre qu'elle aboutit à une gabegie financière supplémentaire, repose sur une démarche privative de libertés et de droits fondamentaux, qui ne sont pas seulement ceux des internautes mais ceux auxquels tout citoyen est attaché en démocratie. Cette instance repose sur une sorte d'extraterritorialité juridique : les conditions dans lesquelles elle pourra oeuvrer empêcheraient tout tribunal en France de rendre justice, malgré les mauvaises réformes de Mme Dati.

L'internaute à qui il sera reproché un téléchargement dit illégal recevra un premier mail d'avertissement mais sans que lui soient communiqués les éléments matériels qui fondent cette démarche. Puis, après la recommandation, suivra la sanction suprême, la suspension de l'abonnement. Mais à aucun moment de cette procédure insensée – nous le répétons et nous le répéterons jusqu'à la fin de ce débat – ne sont respectés la présomption d'innocence, les droits de la défense les plus élémentaires ou le principe du contradictoire. C'est la raison pour laquelle nous avons déposé un amendement visant à ce que la suspension de l'abonnement soit soumise à une décision préalable d'une autorité judiciaire.

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