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Intervention de Fadela Amara

Réunion du 19 juin 2008 à 15h00
Droits des victimes et exécution des peines — Discussion en deuxième lecture d'une proposition de loi

Fadela Amara, secrétaire d'état chargée de la politique de la ville :

Monsieur le président, mesdames et messieurs les députés, ma collègue Rachida Dati m'a priée de l'excuser auprès de vous. Vous le savez, elle est actuellement retenue par le débat sur la réforme des institutions, en cours d'examen au Sénat.

La proposition de loi que vous examinez aujourd'hui en deuxième lecture a été adoptée à l'unanimité par votre assemblée en première lecture le 17 janvier dernier. Le président de la commission des lois, Jean-Luc Warsmann, et M. le député Étienne Blanc ont pris l'initiative de ce texte, qui fait suite à un rapport très approfondi de la mission d'information de votre commission des lois sur l'exécution des décisions pénales.

C'est un sujet qui vous est cher, monsieur le président Warsmann. Vous avez inspiré les dispositions de la loi du 9 mars 2004 qui avaient déjà considérablement amélioré le recouvrement des amendes et la mise à exécution des décisions pénales. Je vous rends hommage pour votre investissement personnel en faveur d'une réelle effectivité des décisions de justice. Vous avez cosigné cette proposition de loi avec Étienne Blanc, qui en est le rapporteur et qui était également celui de la mission d'information. Chaque fois, monsieur le député, vous avez réalisé un travail considérable et d'une très grande qualité. Permettez-moi de saluer ce travail, qui fait honneur au Parlement.

Je remercie également la commission des lois dans son ensemble pour son initiative et pour la richesse de son dialogue permanent avec le Gouvernement.

Cette proposition de loi permet de donner suite immédiatement à une partie de ses vingt-neuf propositions se rapportant à l'exécution des peines. Rachida Dati s'était engagée à ce que ce texte poursuive rapidement son cheminement législatif. Cet engagement a été tenu. Il vous appartient aujourd'hui de décider si, après cinq mois de travaux parlementaires extrêmement constructifs, le texte peut être adopté définitivement. Le Gouvernement souhaite qu'il fasse l'objet d'un vote conforme de votre assemblée.

Le texte a été enrichi par le Sénat. Je me contenterai de souligner des points ressortissant à deux volets.

Ce texte améliore l'indemnisation des victimes. Il crée un service d'assistance au recouvrement des victimes d'infractions, le SARVI. Il est destiné aux victimes qui ne sont pas dédommagées par la commission d'indemnisation. Chaque année, elles sont environ 75 000 à devoir assurer seules le recouvrement des dommages et intérêts qui leur sont accordés par une décision pénale. Grâce à ce service créé par votre proposition de loi, ces personnes n'auront plus à accomplir elles-mêmes les démarches pour réclamer leur dû, mais s'adresseront au fonds de garantie des victimes d'infractions pénales. Obliger une personne condamnée à dédommager sa victime fait pleinement partie de la peine.

Le fonds de garantie se substituera à la victime. Il remplira ainsi une double mission d'intérêt général : assurer l'entier respect des décisions pénales et améliorer notablement le traitement des victimes.

Le Sénat a apporté deux séries de modifications au dispositif, les unes en faveur des victimes, les autres pour mieux tenir compte de la situation du condamné.

Pour les victimes, le Sénat assouplit les règles d'action de deux manières : il permet qu'une victime qui n'a pas obtenu gain de cause devant la commission d'indemnisation puisse solliciter l'aide au recouvrement du SARVI même si le délai pour agir est dépassé. Le Sénat a également instauré, en faveur de toutes les victimes, un recours contre la décision du fonds de garantie, quand il constate qu'elles sont hors délai pour demander l'aide au recouvrement.

Pour mieux tenir compte de la situation des auteurs, le Sénat a étendu le délai de paiement volontaire des dommages et intérêts à la victime. Car il est dans l'intérêt de tout le monde d'encourager un paiement volontaire dans des délais raisonnables.

Le Sénat a également souhaité tenir compte des décisions qui laissent au condamné un délai pour payer la victime, suivant un échéancier établi en fonction de ses moyens. Dans ce cas, le condamné ne sera pas tenu de payer des frais de service au fonds de garantie. Il serait en effet illogique de faire payer plus un condamné qui respecte le calendrier de paiement qui lui a été fixé.

Ces améliorations apportées par la Haute Assemblée méritent d'être approuvées.

La proposition de loi vise aussi à améliorer l'indemnisation des propriétaires de véhicules incendiés volontairement par des tiers. Votre commission des lois avait souhaité que ces victimes puissent bénéficier de la solidarité nationale. Ces infractions placent en effet les propriétaires de véhicules détruits dans des situations parfois très difficiles. Les incidences familiales et financières peuvent avoir une ampleur sans proportion avec la valeur du véhicule détruit. Le Sénat a reconnu le préjudice particulier subi par ces victimes.

Il a toutefois adopté des amendements qui recentrent mieux le texte sur ses objectifs. Il a, d'une part, exigé que le véhicule ait été détruit par incendie : il ne suffit pas qu'il ait été seulement dégradé ou détérioré, ce qui couvrirait un champ trop large. Le Sénat a, d'autre part, soumis l'indemnisation de la victime à la condition que le véhicule soit en règle du point de vue administratif : il serait en effet anormal que la solidarité nationale joue en faveur du propriétaire d'un véhicule en infraction. L'évolution du texte voulue par le Sénat paraît donc parfaitement justifiée.

Le second volet de la proposition de loi améliore l'exécution des décisions pénales. L'intérêt de vos initiatives parlementaires depuis plusieurs années aura été de mettre au coeur des préoccupations judiciaires la phase trop longtemps négligée de l'exécution des décisions pénales. L'action de la justice ne s'achève pas avec l'audience. L'exécution des peines contribue à lutter contre le sentiment d'impunité et contre la récidive qu'il engendre.

Le Sénat a apporté quelques modifications au texte adopté par votre assemblée, pour lui assurer une plus grande efficacité. Il s'agit, pour l'essentiel, de prendre en considération des situations particulières dans lesquelles peuvent se trouver les huissiers chargés de citer un prévenu en justice ou de lui signifier un jugement pénal.

Votre assemblée a voulu qu'un délai de signification de quarante-cinq jours soit fixé. Le Sénat a souhaité que le parquet puisse, par dérogation, le porter à trois mois.

Cette souplesse évitera que l'huissier ne soit dessaisi trop tôt lorsque la signification ne peut pas être réalisée temporairement. C'est le cas, par exemple, en période de vacances estivales.

Des modalités simplifiées de citation en justice ou de signification des jugements ont également été introduites par le Sénat. Elles permettent de tenir compte d'hypothèses variées : les mentions propres aux personnes morales, les notifications aux personnes détenues, la convocation de personnes résidant sur le territoire de l'Union européenne. Dans tous les cas, ces précisions permettront des gains de temps et faciliteront la signification des actes de justice aux personnes concernées. Les préoccupations du Sénat ont rejoint les vôtres, le Gouvernement s'en félicite et vous propose de les approuver.

Monsieur le président, mesdames et messieurs les députés, les insuffisances constatées par votre mission d'information trouvent, dans ce texte, des réponses concrètes et immédiates. Ce texte constitue une pierre importante apportée à l'édifice que le Gouvernement et le Parlement contribuent à bâtir ensemble : celui d'une justice à l'efficacité reconnue. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

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