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Intervention de Michèle Delaunay

Réunion du 27 mai 2009 à 15h00
Faciliter le maintien et la création d'emplois — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaMichèle Delaunay :

Si nous ne protégeons pas, tant qu'il en est encore temps, cette armature de droit, ce pays sera livré au désordre, sans repères ni cadres pour se reconstruire.

Car ce sont bien les fondements même du droit du travail que vous décidez aujourd'hui d'attaquer. Ces fondements, ce sont les liens entre l'employeur et le salarié – deux personnes, ou plutôt une personne et une entreprise, liées par un contrat. Ce projet de loi dénature ce rapport : nous glissons très sûrement vers la simple utilisation de la capacité de travail.

Nous revenons de nombreuses décennies en arrière, quand les petits paysans pauvres allaient se louer – on disait chez mon grand père « se gager » – là où il y avait du travail.

L'employeur n'est plus une personne, et même plus une entreprise – qui disposerait d'une culture d'entreprise, qui aurait une image, auxquelles le salarié pourrait se référer, sinon s'identifier. L'employeur devient un groupement de personnes anonymes, et le salarié une marchandise immatérielle que l'on peut prêter, et demain louer, selon les besoins et les intérêts du moment.

Quelle est en effet la pièce maîtresse, l'« innovation », selon les signataires de cette proposition ? Ce n'est bien sûr pas directement le prêt de salarié : ce serait trop clair, trop immédiatement choquant ; non, c'est la révision des règles régissant le groupement d'entrepreneurs.

Celui-ci se justifie, c'est vrai, quand il réunit deux petites entreprises proches, et qui se sentent engagées par cette réunion. Pour cela, trois règles ont été mises en place : nul ne peut appartenir à deux groupements ; les entreprises concernées ne peuvent dépasser le seuil de 300 salariés ; leur responsabilité est conjointe. Reconnaissons la sagesse de ces règles.

Vous les dissolvez au contraire. Les conséquences ne sont pas difficiles à imaginer ; c'est d'ailleurs pour moi une interrogation constante depuis les deux années que court cette législature : ceux qui votent et, plus encore, ceux qui conçoivent ces lois imaginent-ils un seul instant leurs conséquences sur la vie des Français qu'elles concernent ?

Nous lisons qu'il s'agit d'un « encouragement à la mobilité » : mais savez-vous ce qu'est la mobilité quand ce n'est pas un projet de vie choisi, quand, dans un couple, les deux conjoints travaillent, ont des enfants scolarisés et viennent d'acheter un appartement ? Savez-vous ce qu'est la mobilité pour une femme ayant des responsabilités familiales ? Immanquablement et j'oserai dire comme d'habitude, ce projet de loi pénalisera d'abord les femmes et le travail des femmes.

Votre projet de loi ne met aucune limite géographique à cette mobilité. Salarié à Limoges, vous deviendrez travailleur à gages à Dunkerque.

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