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Intervention de Victorin Lurel

Réunion du 27 novembre 2008 à 15h00
Nomination des présidents des sociétés de l'audiovisuel public — Rappel au règlement, amendements 303 304 305 306 307 308 309

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaVictorin Lurel :

Avant d'évoquer le sort infligé à RFO, permettez-moi de revenir sur la conception qui est celle du Gouvernement en matière de libertés et de démocratie.

Il me semble qu'il y a des gens éclairés d'un côté comme de l'autre, et que, tous, nous défendons un corpus philosophique fondé sur la liberté. Mais lorsque vous créez, non pas l'entreprise unique mais « l'unique entreprise », pour reprendre l'expression de Jean-Marie Le Guen, et que vous visez à en faire un média global, vous cherchez en fait à créer un bloc monolithique de pouvoirs, un bloc détenu par une seule et même personne : le Président de la République. Or, sur les bancs de l'université, on apprend que la démocratie, c'est la séparation des pouvoirs, ce sont les contre-pouvoirs, et que, dans une démocratie, l'information n'est pas une marchandise quelconque, qu'elle ne peut se réduire aux biens marchands car elle véhicule des idées. L'information, c'est la démocratie. Nous n'admettons donc pas que, pour des raisons de concentration et de surdensification du pouvoir, vous présentiez cette mesure comme une avancée, et ce contre vos propres principes de libéralisme politique. Nous vous le répétons une fois de plus : c'est une régression, on revient vingt-cinq ans en arrière. Nous vous le disons sans esprit de provocation. Lorsque nous nous battons pour cette conception éclairée de la démocratie qui, somme toute, est fort vieille et que le Parlement incarne, souffrez que nous défendions nos principes.

Vous supprimez la définition, la mission et l'identité de RFO – vous faites ainsi disparaître allègrement l'article 44 de la loi de 1986 – en la diluant dans ce grand vase sans fond qu'est l'unique entreprise. Je viens de recevoir des nouvelles du personnel de RFO, toutes catégories et tous syndicats confondus, techniciens, administratifs, journalistes : ils sont actuellement dans la rue et sur le parvis de RFO pour protester contre la conception qui est la vôtre et contre la diffusion centralisée depuis RFO. En effet, en créant l'unique entreprise, vous allez supprimer les chaînes, transformées en simples services.

C'est déjà tout un programme de faire disparaître ainsi des chaînes, notamment celles qui sont dédiées à la création – je pense à France 2 Cinéma et à France 3 Cinéma –, mais, au-delà de la remise en cause des missions qui étaient bien définies à l'article 44 de la loi de 1986, je souligne que RFO pose un problème spécifique : il y a neuf stations, voire dix avec le siège à Malakoff. Je reconnais qu'à Malakoff il y a peut-être un problème de gestion, d'efficacité et de performance, mais on pouvait le régler autrement que par la disparition pure et simple de cet ensemble. Vous justifiez un tel changement par la nécessité d'un traitement égal. Les républicains que sont les socialistes sont sensibles au traitement égalitaire, mais tous mes collègues savent que le fait de traiter de manière égale des situations qui sont différentes, ne serait-ce qu'en raison de contraintes géographiques, mais aussi en raison des particularités des diverses cultures françaises, est une discrimination. Cela commande au contraire une spécificité organisationnelle, que ce texte fait disparaître allègrement et avec beaucoup de légèreté. Madame la ministre, nous sommes bien obligés d'insister là-dessus, de le marteler pour que vous finissiez par l'entendre. Ce n'est pas une perte de temps.

En plus de la centralisation à Malakoff, vous allez transformer les neuf autres stations, celles de Guadeloupe, de Martinique, de la Guyane, de La réunion, de Nouvelle-Calédonie, de Polynésie, de Mayotte, de Saint-Pierre-et-Miquelon et de Wallis et Futuna en simples centres d'actualité télévisée. Il y a manifestement là un projet de centralisation de mauvais aloi.

En outre, vous n'hésitez pas à faire disparaître l'identité et les missions, mais sans donner à RFO les moyens d'évoluer puisque, par un amendement subrepticement présenté hier, à seize heures, vous supprimez la publicité : ce sont 18 millions de recettes qui disparaissent. Il vous faudra donc trouver, en plus des 450 millions pour France Télévisions, 18 millions supplémentaires. Ce sont donc 478 millions qui manquent, et vous ne mettez rien en place !

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