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Intervention de Bertrand Pancher

Réunion du 1er avril 2008 à 21h30
Organismes génétiquement modifiés — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaBertrand Pancher :

Madame la présidente, madame la secrétaire d'État, chers collègues, après de trop nombreux reports, nous discutons enfin de ce projet de loi tant attendu, qui encadre la culture, la commercialisation et la consommation des organismes génétiquement modifiés en France. Si les OGM constituent dans notre pays un sujet de société très sensible, ce n'est pas le cas dans beaucoup d'autres, qui en cultivent depuis longtemps et où le débat semble beaucoup plus apaisé.

Mais en France, loin de laisser indifférent, la question des OGM déchaîne les passions : en témoignent les multiples articles de presse, reportages télévisés ou opérations « coup de poing » qui nous interpellent quasi quotidiennement, de même que l'intensité de nos débats ce soir. Ces interrogations et ces inquiétudes se sont également exprimées lors des travaux de l'atelier du Grenelle de l'environnement consacré aux OGM.

Adopté en février dernier par nos collègues sénateurs, le projet soumis à notre examen nous permet de poser clairement les termes de la problématique des OGM, de débattre de cette technologie et de trancher.

On peut d'abord se féliciter du contenu de ce texte, et je salue à cette occasion le travail remarquable d'Antoine Herth, notre rapporteur, et la pédagogie dont il a fait preuve sur cette question délicate, car le sujet n'est pas facile.

Les principes posés dans ce texte devraient permettre d'apaiser de nombreuses inquiétudes émises par nos concitoyens en encadrant les procédures. Le principe fondamental de la liberté de produire et de consommer avec ou sans OGM, énoncé dans l'article 1er, constitue la pièce maîtresse de toute l'architecture du projet. Dorénavant, la production, l'autorisation, la commercialisation, la culture, l'utilisation et la consommation des OGM seront strictement encadrées par des principes de précaution, d'information et de responsabilité qui sont indispensables à la protection de l'environnement et de la santé publique.

Cependant, je ne suis pas totalement persuadé que le vote et la mise en place de ces principes suffiront à apaiser toutes les inquiétudes qui s'expriment dans la population française, laquelle craint toujours qu'on lui cache des informations et des données. Sur ce sujet comme sur beaucoup d'autres – je pense notamment aux nanotechnologies, qui donneront lieu à des débats similaires – il me semble indispensable d'approfondir les règles de transparence vis-à-vis des citoyens et de les associer au débat.

Si le chapitre III du texte édicte certaines règles, peut-être pourrait-on cependant aller encore plus loin dans la transparence. C'est dans cet esprit que j'ai déposé une quinzaine d'amendements qui visent à renforcer l'information et la consultation du public, afin que celui-ci comprenne mieux – et donc accepte mieux – ces produits génétiquement modifiés et, le cas échéant, puisse également émettre des recommandations.

Cette meilleure information du public est souhaitée par le Président de la République, qui a indiqué le 25 octobre dernier, lors des conclusions du Grenelle de l'environnement, qu'« il faut créer un droit à la transparence totale des informations environnementales et de l'expertise ».

Je pense donc que nous pouvons aller plus loin. Instaurer avec ce texte de nouvelles règles de gouvernance sur les OGM montrerait notre volonté de mettre en place cette « culture de la transparence » tant attendue par tous les acteurs et qui a prévalu tout au long des discussions du Grenelle.

Je suis personnellement convaincu que, comme sur tous les sujets de santé et d'environnement vecteurs de controverses, nous ne réussirons pas à réconcilier les citoyens et les décideurs sans une appropriation collective des décisions, laquelle passe certainement par une bonne maîtrise scientifique et une excellente information. Croire que cela suffit est cependant un leurre : la communauté scientifique ne nous apaisait-t-elle pas après Tchernobyl ?

Il faut veiller à associer les acteurs de la société civile afin de concrétiser le principe de précaution, mais il faut aussi veiller à renforcer la transparence et, surtout, à faire participer toutes les populations concernées Notre projet de loi, en l'état, ne le permet pas suffisamment.

Nous devons être tous convaincus que nous ne pourrons plus jamais prendre de décisions en matière de santé et d'environnement comme nous le faisions il y a encore une vingtaine d'années. Si l'expertise scientifique est indispensable, elle ne peut se substituer à la décision politique. La décision politique est centrale, mais elle ne peut pas faire abstraction de la participation éclairée des personnes concernées par nos décisions. L'ignorer, c'est prendre le risque que le fossé entre l'opinion publique et les décideurs s'élargisse. C'est accepter que 75 % de nos concitoyens refusent les OGM alors que 90 % d'entre eux ne savent pas de quoi il s'agit.

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