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Intervention de Catherine Quéré

Réunion du 1er avril 2008 à 21h30
Organismes génétiquement modifiés — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaCatherine Quéré :

Madame la présidente, madame la secrétaire d'État, mes chers collègues, c'est à la fois triste, inquiète et en colère que je m'adresse à vous aujourd'hui. Et c'est aussi en tant qu'agricultrice que je souhaite m'exprimer à cette tribune. Si l'Assemblée nationale adopte la loi sur les OGM telle qu'elle a été amendée par le Sénat, on peut dire sans exagérer aucunement que l'on aura mis fin à la diversité de l'agriculture française. Un sort funeste, en effet, attend l'agriculture biologique et toutes les agricultures conventionnelles engagées dans des démarches de qualité.

Autoriser la culture d'OGM en plein champ, c'est prendre le risque d'une contamination des cultures conventionnelles et biologiques – songeons à ce qui s'est passé dans les Deux-Sèvres –, ce qui revient à leur refuser le droit d'exister ; c'est aussi mépriser les demandes des consommateurs, qui, lors du Grenelle de l'environnement, se sont clairement opposés aux OGM ; c'est enfin ouvrir une ère de conflits sans fin entre producteurs.

Une pollution des cultures conventionnelles et biologiques devra rester exceptionnelle et tout accident devra donner droit à une réparation totale, quel que soit le niveau de contamination. Je vous rappelle tout l'intérêt des pratiques de l'agriculture biologique, respectueuse de l'environnement, créatrice d'emplois ruraux, génératrice de circuits courts permettant le maintien des petites et moyennes exploitations. Supprimer l'agriculture biologique, c'est supprimer tout un pan de notre économie rurale. C'est aussi nier la demande des consommateurs, en nette progression. C'est enfin ignorer le travail des nombreuses collectivités qui se sont engagées dans la distribution de produits biologiques, notamment pour la restauration collective.

Le Grenelle de l'environnement nous avait fait espérer que la future loi OGM protégerait les systèmes agraires, prendrait en compte le principe de précaution et respecterait le droit à produire et à consommer sans OGM. En fait, c'est tout le contraire.

Je vous rappelle que plus de dix ans après leur apparition, les OGM n'ont toujours pas conquis les consommateurs européens, pas plus que la majorité des producteurs. C'est pourquoi le droit de produire et de consommer sans OGM ne peut en aucun cas être remis en cause. L'extension des cultures OGM dans notre pays représenterait un recul de la biodiversité et entraînerait la mainmise des grands semenciers sur toutes les productions. Vous le savez : il n'y a pas de coexistence possible entre OGM et non-OGM, les producteurs biologiques ne pouvant accepter une contamination qui entraînerait la perte de leur label et donc leur disparition. Il paraît impossible de séparer les deux filières de façon totalement étanche. Il faudrait au minimum que l'ensemble des contraintes destinées à éviter la dissémination soit supportées par ceux qui ont fait le choix de produire, de commercialiser et de semer des OGM. Pourquoi les agriculteurs non-OGM ou biologiques devraient-ils en supporter la charge ?

Nous n'avons aucun intérêt à accepter la culture des OGM dans notre pays, car les consommateurs n'en veulent pas, pas plus que les agriculteurs biologiques. En outre, les préjudices et les conflits risquent de se multiplier. Un refus s'impose au nom du simple principe de précaution – inscrit, je vous le rappelle, dans la Constitution au travers de la Charte de l'environnement.

Le Sénat entretient la confusion entre l'intérêt des puissants et celui des générations futures. Vous aurez des comptes à rendre face à la disparition de certaines formes d'agriculture, biologique notamment. La France et les Français ont pourtant besoin d'avoir confiance en leur agriculture. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche et du groupe de la Gauche démocrate et républicaine.)

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