Découvrez vos députés de la 14ème législature !

Intervention de Noël Mamère

Réunion du 1er avril 2008 à 21h30
Organismes génétiquement modifiés — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaNoël Mamère :

…dont nous demandons la reconnaissance du statut à l'instar de ce qui se passe dans plusieurs pays européens. Le Grenelle de l'environnement a permis de changer la donne tant sur la méthode que sur le fond, et a donné lieu à trois avancées essentielles : la dissémination des transgènes a été reconnue, de même que le principe de responsabilité constitutif du développement soutenable et que le droit fondamental de consommer et de produire sans OGM. M. le ministre d'État l'a, du reste, lui-même rappelé à l'ouverture des débats au Sénat : « D'évidence, ce débat parlementaire est essentiel parce qu'il marque le premier passage de relais du Grenelle de l'environnement à la représentation nationale, des acteurs de la société civile aux élus. »

Hélas, ce projet de loi, manifestement rédigé sous la pression des lobbies productivistes et des semenciers est en net recul par rapport aux avancées du Grenelle de l'environnement. De même, comme l'a excellemment rappelé ma collègue Delphine Batho, il ne traduit ni l'esprit ni la lettre de la directive de 2001.

Je ferai remarquer à Mme la secrétaire d'État que, lorsque le ministre d'État nous explique que l'Allemagne n'a pas appliqué la clause de sauvegarde, c'est, en fait, parce que l'Allemagne a appliqué la directive de 2001 de manière très restrictive, et adopté une loi qui a permis de réduire considérablement les parcelles d'OGM. C'est bien la preuve que la France pourrait appliquer cette directive dans un sens plus restrictif. Tel n'est malheureusement pas le cas.

Voilà un texte, d'un grand laxisme, qui fait la part belle aux semenciers. J'en veux pour preuve trois exemples.

Dès l'article 1er, le texte dérape. Le droit de consommer et de produire sans OGM se transforme en doit de consommer et de produire « avec ou sans » OGM, dérive portée par le Président de la République. Le ton est donné. Les lobbies ont gagné puisque l'on accepte le principe de la coexistence alors que nous savons que les deux libertés ne sont pas compatibles : celle de cultiver avec des OGM et celle de cultiver sans eux.

Parler de liberté de produire et de consommer avec ou sans OGM va donc à l'encontre du relevé de décisions de la troisième partie de la table ronde sur les OGM au Grenelle de l'environnement. Il y était fait état du consensus sur « le libre choix de produire et de consommer sans OGM » et non avec ou sans OGM comme les semenciers essaieraient de nous le faire croire dans leur lettre de mars 2008.

À l'article 2 relatif à la constitution et au fonctionnement de la Haute autorité, vous avez purement et simplement fait disparaître l'expertise pluraliste. Au lieu de vous appuyer sur l'instance de préfiguration, qui a bien fonctionné avec notre collègue Le Grand – même si elle a déchaîné la colère des partisans du Mon 810 – ou sur l'expérience réussie de dialogue entre scientifiques et société civile, vous revenez en arrière. La meilleure preuve en est le changement de nom de cet organisme. Vous diluez la question sensible des OGM dans une sorte de « grand machin » que l'on dénomme aujourd'hui le Haut conseil des biotechnologies, dont notre collègue François Grosdidier a fait remarquer, dans sa lettre aux députés UMP, les limites, et l'impossibilité, pour cet organisme, de travailler dans de bonnes conditions.

Je voudrais rappeler un détail à Mme la secrétaire d'État, qui s'informe sur ce qui se passe dans d'autres pays européens. L'exemple frappe plus que la menace, comme disait Polyeucte. Renseignez-vous, madame, sur ce qui se passe au Danemark où, depuis 1989, il existe des conférences de citoyens, qui ont permis d'associer la société civile à de grandes innovations technologiques. Et lorsqu'il s'agit d'innovations techniques qui engagent notre santé, notre environnement, la biodiversité et le type d'agriculture que l'on veut nous soumettre, c'est à la société de choisir et non aux experts et à leurs séides au sein du Parlement.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Inscription
ou
Connexion